Les injonctions de la CEDEAO au Comité national pour le Salut du Peuple –CNSP- tenant les rênes du pouvoir depuis le mardi 18 août 2020, suscitent indignation et colère dans l’opinion nationale malienne. Persuadée qu’elle n’est que le syndicat des chefs d’Etat ne défend que ses propres intérêts.
Des ballets diplomatiques incessants aux multiples et infructueuses tentatives de médiation entre le M5-RFP et le régime d’IBK, de juillet jusqu’en août, les émissaires de la CEDEAO sont retournés chez eux, sur la pointe des pieds. Outrés. Mardi 18 août 2020, coup de tonnerre dans l’après-midi: le président Ibrahim Boubacar Keïta. IBK est cueilli à son domicile en compagnie de son Premier ministre, Boubou Cissé. Auparavant, dans la matinée, plusieurs membres du gouvernement restreint et certains officiers généraux avaient été mis aux arrêts.
Depuis, les condamnations de principe, mettant au ban de la société les putschistes, fusent de partout. Les différentes chancelleries, l’Union africaine, la CEDEAO, l’Union européenne, l’ONU… demandent le rétablissement de l’ordre constitutionnel. Cerise sur le gâteau, la CEDEAO somme la junte de rendre au président déchu son fauteuil.
Niet catégorique de celle-ci. Idem pour l’intéressé lui-même, le président déchu, IBK. Cinglant camouflet pour les faucons de l’organisation : Alpha Condé, Alassane Dramane Ouattara et Mahamadou Issoufou du Niger. Ces pseudo-démocrates feignent d’ignorer que ces officiers qu’ils pensent ainsi punir sont en parfaite phase avec leurs concitoyens. En atteste le meeting de soutien en leur endroit le 19 août 2020 sur la désormais emblématique Place de l’Indépendance.
Pour le juriste Makan Moussa Sissoko, la Constitution est intacte, le président a démissionné dans les règles de l’art, le Premier ministre révoqué, l’Assemblée et le gouvernement dissous. Abondant dans le même sens, l’avocat Me Christian Bomo Ntimbane, estime qu’il n’y a pas eu de coup d’Etat, plutôt une prise de position de l’armée en faveur du peuple. C’est l’armée qui est venue à la rescousse du peuple.
Pour notre part, il convient de faire un décryptage : les laudateurs aveugles du régime IBK ont plutôt plaidé pour leur propre chapelle menacée. Ils n’ont nullement cure de la misère de la populace malienne.
La Grande muette a tout juste brisé l’omerta pour parachever l’action du peuple, qui ruait de plus en plus dans les brancards. Le porte-parole de la junte, Colonel Ismaël Wagué, n’a pas dit autre chose sur la Place de l’Indépendance.
L’homme-fort du 26 Mars 1991, Lieutenant-colonel d’alors, Amadou Toumani Touré – ATT – n’a jamais porté de gant pour justifier son putsch : ‘’Quand les politiques faillissent, l’armée ne peut s’empêcher de prendre le pouvoir‘’.
C’est pourquoi il importe de nuancer le jugement porté sur les putschistes. Béchir Ben Yamed, fondateur de l’hebdomadaire international, Jeune Afrique, s’est exprimé sans ambiguïté, en juin 2003 dans les colonnes du journal : ‘’Le légal peut, par ses fautes, cesser d’être légitime et à l’inverse, l’illégal peut fort bien se légitimer par ses actes’’ s’est-il expliqué.
Des questions nous taraudent l’esprit: qu’est-ce que la CEDEAO a entrepris pour éviter à IBK une gestion calamiteuse du pays 7 longues années ? Pourquoi n’a-t-elle pas tiré la sonnette d’alarme sur les fautes de gouvernance de leur copain IBK et l’ampleur de la corruption sous son régime au grand dam des pauvres Maliens de la CEDEAO ? Pourquoi n’a-t-elle pas déploré les 23 victimes de la FORSAT le 10 juillet dernier aux alentours de la mosquée de l’imam Mahmoud Dicko ?
Au lieu d’assener à IBK ses quatre vérités, la CEDEAO a plutôt opté pour la politique de l’autruche, brandissant les vertus d’un dialogue de façade, ayant atteint ses limites. A la lumière des questions posées ci-haut, la troïka CMAS – FSD – EMK n’a pas fait dans la dentelle, en exposant des griefs suffisants pour une démission du président Ibrahim Boubacar Keïta. Le bien-fondé des actes posés par le M5-RFP et la noblesse de ses idéaux ont été soldés grâce à l’action salvatrice des officiers du Comité national du Salut du Peuple.
Mohamed Koné Correspondant à Kadiolo
Source : Le Challenger