Alors que l’Afrique du Sud tente de sortir de la crise économique provoquée par la pandémie, le pays se questionne sur le sort à réserver aux entreprises publiques. Nombre d’entre elles ont souffert de pertes importantes cette année, alors qu’elles connaissaient déjà des difficultés financières avant la crise. Désormais, elles demandent au gouvernement de les renflouer, mais les caisses du pays sont déjà de moins en moins remplies.
Devant le Parlement, la direction du Trésor a dépeint un tableau bien sombre au début du mois : les entreprises publiques du pays accumulent les pertes, et certaines, comme le groupe audiovisuel SABC ou la poste, demandent une rallonge, qui s’élève au total à près de 500 millions d’euros.
Une situation loin d’être nouvelle, puisque l’état a déjà versé près de 10 milliards d’euros ces vingt dernières années pour soutenir ses entreprises, sans parvenir à les remettre à flot.
La compagnie nationale d’électricité Eskom est le cas le plus emblématique, comme le détaille Derrick Botha, analyste pour Fitch Solutions. « Eskom est sans doute l’entité qui épuise le plus les finances publiques, ce n’est pas une situation soutenable. En juillet dernier, sa dette s’élevait à près de 25 milliards d’euros. Donc c’est l’entreprise publique qui a le plus de dettes, sans compter que la fourniture d’électricité est vitale pour l’économie du pays. »
Et ça ne va pas mieux pour la South African Airways, qui attend un plan de sauvetage, ou du côté de la compagnie d’armement Denel qui risque la liquidation. Selon William Gumede, professeur associé à l’université du Witwatersrand, ce bilan s’explique en partie par des années de mauvaise gestion sous la présidence de Jacob Zuma. « Ces compagnies ont pour la plupart été dirigées par des personnes sans aucune expérience. Des contrats ont très souvent été attribués à des membres de l’ANC, en remerciement pour leurs services rendus au parti et non pour leurs compétences. Et nombre de partisans de l’ANC pensent que les compagnies publiques sont spéciales et n’ont pas besoin de faire du profit, contrairement à des groupes privés. »
Si le gouvernement souhaite désormais sauver certaines de ses entreprises, cela pèsera sur ses finances, qui sont déjà dans le rouge. La dette sud-africaine devrait s’élever à 80% du PIB d’ici la fin de l’année fiscale.
Il faudra donc faire des choix politiques difficiles selon Nazmeera Moola, en charge des investissements dans le pays pour le gérant d’actifs Ninety One. « Il y a peut-être certains secteurs où cela aurait du sens que l’Etat viennent en soutien de ces compagnies, mais dans l’ensemble, des décisions doivent être prises pour choisir de quelles entités il faut accepter de se séparer. J’espère voir certaines privatisations, il faut que l’on aille au-delà de la tentative de maintenir le statuquo. »
L’option de la privatisation est aussi défendue par l’Alliance démocratique, le principal parti d’opposition. Mais la Cosatu, la puissante centrale syndicale du pays, s’y refuse pour l’instant fermement.
RFI