Au Mali, les pesanteurs socioculturelles freinent l’autonomisation économique des femmes. Qu’elles soient fonctionnaires ou évoluant dans le secteur informel, beaucoup de femmes ont du mal à s’épanouir économiquement. Le mariage se pose le plus comme un obstacle.
Le Mali se classe dans la catégorie des pays à faible niveau de développement humain avec un indice de développement humain (IDH) de 0,442 en 2015. L’IDH est une mesure moyenne des réalisations de base en matière de développement humain dans un pays. Et l’indice des inégalités de genre au Mali est de 33,7%. Les sièges parlementaires sont occupés par 8,8% des femmes et 7,3% de celles adultes ont atteint au moins le niveau d’éducation secondaire, contre 16,3% pour leurs homologues masculins.
Les Maliennes représentent 52% de la population rurale et vivent à 64,2% en dessous du seuil de pauvreté. Seulement 5% sont des propriétaires terriennes. Dans certaines contrées rurales, leurs charges alourdies par des travaux comme le ramassage du bois, le puisage de l’eau, les empêchent d’être autonomes, selon le rapport de la stratégie de genre du PNUD-Mali 2018 – 2020.
La loi N°2015-052 du 18 décembre 2015, instituant des mesures pour promouvoir le genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives, milite en faveur d’une participation équitable basée sur le genre dans la vie politique et la gestion des affaires publiques. De ce fait, elle favorise également à la contribution des potentialités de la femme et de l’homme dans le développement du pays.
Se débrouiller pour gagner sa vie
Aphame Kadia Doumbia, journaliste chez Malijet et directrice de l’agence de communication Mak-media rappelle que les femmes occupent une place importante dans la société malienne. En plus des travaux domestiques, beaucoup font des activités génératrices de revenus. « Cela permet d’aider leurs familles et d’atteindre un niveau social plus élevé. Si un mari gagne 100 000 francs CFA par mois et sa femme aussi, ils peuvent faire beaucoup de choses avec la somme collectée dans leur foyer. Comme l’entretien de la maison, des enfants, la scolarité et la santé surtout. J’encourage les femmes à entreprendre. L‘entrepreneuriat féminin est un secteur qui apporte beaucoup de ressources, non seulement matérielles mais aussi humaines ».
Les amazones de l’informel sont les vendeuses ambulantes. Épuisée d’avoir sillonné le grand marché de Bamako, Fatoumata Diawara, une vendeuse d’arachides confie son désarroi : « Que les fonctionnaires ont de la chance ! Quelle que soit la conjoncture, eux ils sont sûrs de toucher leur salaire, alors que nous devons proposer nos articles en nous exposant aux conséquences de la vente au bord du goudron. Je n’ai pas eu la chance d’aller à l’école, mais je me débrouille pour gagner ma vie. Et je peux obtenir 5000 francs CFA par jour comme bénéfice », évalue-t-elle.
Rokiatou Traoré, vendeuse de pomme de terre au grand marché de Kati, ajoute : « Je pratique ce métier depuis plus de quinze ans. Mon mari est décédé et c’est à moi de prendre ma famille en charge. Mes enfants ne sont pas encore assez grands pour pouvoir s’occuper d’eux-mêmes. C’est grâce à ce que je gagne honnêtement en vendant des pommes de terre que je parviens à joindre les deux bouts».
« Mon mari m’a interdit de travailler »
Nous nous sommes aussi intéressés aux femmes non actives appelées encore femmes ménagères. Aminata Touré, domiciliée à Sikoroni, est mariée depuis dix ans. Elle dit se sentir mal à l’aise du fait de ne pas pouvoir travailler : « C’est grâce aux travaux que les femmes font quotidiennement qu’elles peuvent gagner de l’argent et subvenir à leurs besoins sans passer par le mari. Je souhaite travailler, car un mari ne peut pas satisfaire tous les besoins de sa femme. Hélas, le mien refuse », témoigne-t-elle.
Oumou Sissoko, ménagère domiciliée à Kalanba Coura a des problèmes dans son foyer à cause de son travail. « Mon mari m’a demandé d’arrêter d’aller au travail. Cela a créé une dispute entre nous. Du coup, je me suis dit qu’il fallait que j’arrête d’aller au travail pour avoir la paix dans mon foyer ». L’État malien encourage les femmes à entreprendre, mais le problème se trouve principalement au niveau de la société qui doit être compréhensive et indulgente.
Source : Benbere