Le Mali est semblable à ce roi excédé par la dilapidation de ses deniers par ses différents gestionnaires de l’État et dont l’histoire est racontée ici. Cela pourrait expliquer pourquoi le nouveau gouvernement tarde à se mettre en place.
Il était une fois un roi sage, parcimonieux sans être avare et respectueux des us et coutumes locaux. Dans son pays, la règle était que si le roi nommait un intendant, il n’avait plus le droit de le démettre jusqu’à la fin de son mandat qui était de trois ans. Et ce, quelles que soient les malversations qu’il commettait.
Il avait donc un blanc-seing sur la gestion des finances du royaume pendant la durée de son mandat. Cependant, au terme du mandat, un collège de sages, après évaluation de la gestion de l’intendant, émettait une recommandation au souverain sur la pertinence ou non de son renouvellement.
« Méthode originale d’appel à candidature »
C’est pourquoi, tous les trois ans, à l’approche de la nomination de l’intendant, c’était un branle-bas de combat dans tout le royaume. Le roi reconnaissait lui-même que depuis qu’il était monté sur le trône, seul l’intendant, que lui avait laissé son défunt père, lui avait donné satisfaction. Et, depuis sa disparation, n’ayant jamais eu la main heureuse, tous les trois ans, il changeait d’intendant. Cela le désolait tant, qu’il vivait des moments très stressants, pendant les mois qui précédaient la nomination de l’intendant. Il fit part de son désarroi à un vieil homme dont la sagesse avait traversé la frontière de son royaume et qu’il avait mandé dans son palais.
- Sir, lui dit l’hôte, il y a une façon très simple de déceler, parmi les différents prétendants, le plus probe parmi eux. Il vous suffit, pour cela, d’organiser la danse des prétendants.
- En quoi consiste cette danse, sage homme ?
- Sir, vous ferez ériger deux pièces et un vestibule. La première pièce communiquera avec le vestibule qui s’ouvrira sur une grande esplanade où prendront place toutes les personnalités du royaume ainsi que le peuple avec les meilleures troupes de danse du royaume le jour de la nomination. La seconde pièce sera placée après l’esplanade. L’épreuve consistera, pour chaque prétendant, à accéder à l’esplanade après avoir traversé la première pièce et le vestibule. Arrivé à l’esplanade, le prétendant entamera une danse au rythme des tams-tams et, à votre niveau, il exécutera un saut acrobatique. Ensuite, toujours en dansant, il rejoindra la deuxième pièce où il sera accueilli par un collège de sages dirigé par un de vos conseillers. Le plus apte à accomplir l’épreuve sera votre choix, Sir.
- Mais, je ne comprends pas sage homme. Comment à partir à cette épreuve pourrais-je savoir que j’ai effectué un choix judicieux ?
- Sir, dit le vieil homme, vous avez raison, car je ne vous ai pas donné tous les détails. Dans la première pièce ainsi que dans le vestibule seront placées bien en vue de grandes jarres contenant plusieurs objets de valeurs : des perles rares, des pierres précieuses, des pièces d’or et d’argent, des pièces d’étoffe en soie, etc. Chaque prétendant, à l’abri du regard, fera le trajet : de la première pièce à la deuxième pièce en passant par le vestibule et l’esplanade. Ce n’est qu’après la fin de la prestation d’un prétendant qu’un autre sera autorisé à entamer son parcours. Et, croyez-moi Sir, que les plus cupides d’entre eux s’en serviront si bien qu’ils ne pourront même pas exécuter des pas de danse à fortiori sauter. Alors, vous comprenez pourquoi Sir, le plus prompt à danser est celui qui sera le plus digne de votre confiance ?
Convaincu de cette méthode originale d’appel à candidature, le roi l’appliqua pour nommer son intendant, et il ne fut point déçu.
« Ébranlé, affaibli, humilié par ses propres enfants »
A analyser de près la situation de notre pays, le Mali est semblable à ce roi excédé par la dilapidation de ses deniers par ses différents gestionnaires de l’État et on comprend pourquoi le nouveau gouvernement tarde à se mettre en place. En effet, héritiers d’une gestion catastrophique et de gabegie de toutes sortes, il semble que le président de transition, son vice-président et son premier ministre n’ont pas encore trouvé de danseurs capables de trépigner alertement et allègrement malgré le nombre élevé de candidats. La plupart d’entre eux, poursuivis par leur passé, seraient amarrés à de lourds bolets de bagnards du moyen-âge, les empêchant de se déplacer à fortiori d’exécuter un pas de danse !
Espérons que le temps mis pour déceler les impétrants se traduira, dans quelques semaines, à poser des actes forts et significatifs qui redonneront espoir au citoyen ordinaire et annonceront les prémices d’un nouveau Mali tant souhaité. Car le Mali est, depuis plus d’une décennie, « ébranlé, affaibli, humilié par ses propres enfants ».
#Mali Bah Ndaou president de la transition : le Mali est ébranlé, piétiné, humilié. Ebranlé, Affaibli, humilié par ses propres enfants, par nous-mêmes, par personne d’autre que nous-mêmes. (…) Il peut chavirer et il chavirera si nous continuons à le faire tanguer. »
— Kaourou Magassa (@KaourouM) September 25, 2020
Source : Benbere