Le rapport 2019 du Vérificateur général présenté aux autorités de la transition épingle la gestion du PDG de la pharmacie populaire du Mali (PPM). La vérification, qui porte sur les opérations de recettes et de dépenses, au titre des exercices 2016, 2017, 2018 et 2019 (1er trimestre), décèle de nombreuses irrégularités administratives et financières. Si des irrégularités administratives sont assorties de recommandations, les financières ont donné lieu à des dénonciations aux autorités judiciaires.
Au titre des irrégularités administratives :
Les irrégularités administratives sont relatives aux dysfonctionnements du contrôle interne dont les principales se présentent comme suit :
• Le Président Directeur Général (PDG) n’a pas fait valider le manuel de procédures administratives, financières et comptables de la PPM. Aucune des trois versions du projet de manuel, établies respectivement en 2002, 2010 et 2016, n’a fait l’objet de validation par la Commission de suivi des systèmes de contrôle interne dans les services et organismes publics conformément à la réglementation en vigueur.
• Le PDG n’a pas respecté des modalités de paiement des fournisseurs.
Il a procédé aux paiements des fournisseurs sur des comptes bancaires différents de ceux mentionnés dans leurs contrats.
• La Commission d’ouverture des plis et d’évaluation des offres a retenu un candidat dont l’offre ne répondait pas aux critères exigés.
Elle a proposé comme attributaire de l’appel d’offres n° 02/2017, relatif à la fourniture de médicaments antituberculeux, le soumissionnaire ayant présenté dans son offre des documents rédigés en anglais non accompagnés de la traduction en langue française conformément au
DAO.
• La Commission de réception a accepté des médicaments en violation des délais de péremption. Elle a admis, sans réserve, des produits dont les délais de péremption étaient inférieurs à ceux fixés dans les contrats correspondants. Cette irrégularité a contribué à l’augmentation des stocks de produits périmés et à des pertes financières importantes.
• Le PDG et le Directeur des Finances et de la Comptabilité (DFC) n’ont pas exigé d’un fournisseur la fourniture de la caution d’avance
102 de démarrage. Ils ont payé, au titulaire du marché n° 01430/DGMP/
DSP 2018, relatif à la fourniture des vaccins de 16 816 doses de shanchol, 15 008 doses de vaxigrip et 220 098 doses de stamaril, une avance de démarrage sans la constitution, au profit de la PPM, d’une garantie à concurrence du montant accordé. De plus, l’avance payée représentait 50% du montant total du contrat, ce qui est supérieur au taux maximal de 30% prévu par la réglementation en vigueur.
Au titre des irrégularités financières :
Les irrégularités financières s’élèvent à 236,41 millions de FCFA dont les principales se présentent comme suit :
• Le PDG a irrégulièrement revu à la hausse le montant des jetons de présence. Il a, par décision, fixé le montant des jetons de présence des administrateurs à 150 000 FCFA au lieu du taux réglementaire de 75 000 FCFA. Le montant total irrégulièrement payé aux administrateurs est de 1,05 million de FCFA.
• Le PDG a irrégulièrement attribué des indemnités de carburant. Il a attribué à des agents une indemnité de carburant supérieure à celle indiquée dans l’Accord d’établissement de la PPM. D’autres agents ont également perçu lesdites indemnités alors qu’ils n’y sont pas éligibles suivant l’Accord d’établissement. Le montant total irrégulièrement payé aux agents au titre d’indemnités de carburant s’élève à 18,08 millions de FCFA.
• Le PDG a irrégulièrement distribué les produits de la vente des DAO à des membres du personnel. Il a accordé des « primes de motivation », sur les recettes issues de la vente des DAO, à des membres du personnel contrairement à la réglementation en vigueur. Le montant total de ces irrégularités s’élève à 37,25 millions de FCFA.
• Le PDG et le DFC n’ont pas reversé à l’ARMDS les 20% des produits issus de la vente des DAO. Le montant de ces produits non reversés s’élève à 7,66 millions de FCFA.
• Le PDG et le DFC ont effectué des dépenses fictives. Ils ont justifié des décaissements, effectués en 2016, par des contrats et actes d’engagement établis en 2017. Ils ont également payé des fournitures et prestations en l’absence des pièces justificatives requises, notamment les contrats, les factures, les attestations de service fait ou procès-verbaux de réception. Le montant cumulé de ces dépenses s’élève à 101,68 millions de FCFA.
• Le gérant d’un point de vente de la PPM ne reverse pas l’intégralité des recettes encaissées. Il n’a pas procédé à la remise sur le compte bancaire de la PPM, l’encaissement des créances clients dont les chèques ont été libellés en son nom. Ces montants n’ont pas, non plus, été retrouvés dans la comptabilité de la PPM. Il n’a également pas enregistré, dans sa comptabilité, des recettes encaissées en espèces. Le montant total de ces irrégularités s’élève à 36,47 millions de FCFA.
• Le DFC a irrégulièrement justifié des dépenses d’entretien du parc automobile. Il a présenté des attestations de service fait à l’appui des dépenses d’entretien de véhicules différents de celles retrouvées chez les prestataires circularisés par la mission. Le montant total de ces irrégularités s’élève à 34,22 millions de FCFA.
QUE RECOMMANDONS-NOUS POUR CORRIGER LES MANQUEMENTS CONSTATÉS ?
Au Président Directeur Général de la PPM :
– élaborer et procéder à la validation du manuel de procédures conformément à la procédure en vigueur ;
– respecter les critères du DAO lors de l’évaluation technique des soumissionnaires ;
– procéder aux réceptions de médicaments conformément aux dispositions du contrat ;
– respecter les délais d’utilisation prévus dans le contrat lors des réceptions de médicaments ;
– respecter les taux et les conditions de garantie avant tout paiement d’avance aux fournisseurs.
TRANSMISSION ET DÉNONCIATION DE FAITS PAR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL AU PRÉSIDENT DE LA SECTION DES COMPTES DE LA COUR SUPRÊME ET AU PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LA COMMUNE III DU DISTRICT DE BAMAKO CHARGÉ DU PÔLE ÉCONOMIQUE ET FINANCIER RELATIVEMENT :
– à l’augmentation irrégulière du taux des jetons de présence pour un montant de 1,05 million de FCFA ;
– à l’attribution irrégulière de l’indemnité de carburant à des agents pour un montant de 18,08 millions de FCFA ;
– à l’attribution irrégulière des primes de motivation à des membres du personnel pour un montant de 37,25 millions de FCFA ;
– au non-reversement des 20% des produits issus de la vente des DAO à l’ARMDS pour un montant de 7,66 millions de FCFA ;
– aux dépenses fictives pour un montant de 101,68 millions de FCFA ;
– au non-reversement des montants des chèques émis au nom du gérant en lieu et place de la PPM pour la somme de 34,20 millions de FCFA ;
– aux recettes non comptabilisées des ventes de médicaments pour un montant de 2,27 millions de FCFA ;
– aux dépenses d’entretien du parc automobiles non justifiées pour un montant de 34,22 millions de FCFA.
SOURCE : RAPPORT 2019 DU BUREAU DE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL Avec INFO-MATIN