L’accord trouvé entre les deux parties se résume à deux points essentiels : le cessez le feu ; permettre aux paysans de faire leurs travaux champêtres et aux bergers de paître leurs animaux… Les belligérants ont promis de respecter cet accord pendant 10 jours. Il a pris effet depuis le lundi 30novembre 2020. Comment tout cela est-il arrivé ? Suivez notre regard dans les coulisses des négociations.
La paix des braves ! On peut le dire ainsi. C’est le mardi 1 décembre 2020, dans la soirée, que la fumée blanche est sortie de la cour du Marabout Komane Tanapo sise à Faladiè cité. Sous sa médiation, les belligérants dans la zone de Niono ont décidé de fumer le calumet de la paix. Les deux parties ont donné leur parole. Il n’y aura pas d’attaques pendant dix jours à Niono. Cette décision a pris effet depuis le lundi 30 novembre 2020 et il fallait la donner une forme plus digeste devant des témoins.
C’est ainsi qu’en plus des deux parties concernées, le Marabout Komane Tanapo a fait appel au Haut Conseil Islamique et d’autres personnalités engagées depuis des années dans la résolution de la crise au centre du Mali.
Devant Tanapo et les témoins réunis, les deux camps opposés (les chasseurs représentés par leurs chefs, l’autre partie, par des personnalités qui ont une forte notoriété au sein de leur communauté), ont promis une trêve de dix (10) jours afin de faciliter les activités quotidiennes dans une atmosphère de paix d’antan.
Une fois l’accord conclu, les témoins surtout les représentants du Haut Conseil Islamique n’ont pas manqué de remercier Komane Tanapo pour ce travail hautement patriotique arraché dans la plus grande discrétion. Car arriver à une paix aussi importante demande un long processus semé de beaucoup d’embuches.
Qui est Komane Tanapo ?
Komane Tanapo est un Marabout de la région de Ségou qui œuvre pour la paix et le vivre ensemble entre les communautés maliennes depuis des décennies. Sa largesse ne souffre d’aucune ambiguïté et ses actions menées dans la plus grande discrétion sont reconnues et relatées par de nombreux citoyens.
Koname est engagé pour la résolution de la crise dans le centre du Mali depuis des années. Dans le Macina, Niono, San, le pays dogon… ses initiatives personnelles sont multiples. Mais, il n’aime pas que ses actions soient médiatisées. J’ai été personnellement témoin plusieurs fois. La seule motivation qui l’anime lorsque l’on veut savoir pourquoi il se décarcasse autant, en termes d’efforts physiques et financiers, en lieu et place de l’État malien, sa réponse a tout le temps été la suivante : « Je ne peux pas voir mon prochain dans des difficultés et ne pas faire quelque chose. Tout acte que je pose, je le fais à cause de Dieu. Pas pour autre chose. »
Cette bonne nouvelle concernant la zone de Niono, y compris Farabougou, doit être un acte illustratif à imiter dans toutes les zones de conflit dans le centre et par-delà le Mali tout entier. Le message s’adresse singulièrement au Pays Dogon où le conflit a été le plus médiatisé durant ces dernières années et où le climat reste toujours délétère.
Au sujet de cette partie du Mali où vivent ses cousins à plaisanterie, Komane Tanapo a déployé d’énormes efforts. Le dernier en date est son approche à l’endroit des chasseurs de Dan Na Amassagou. Il est allé à la rencontre du Chef d’État-Major du mouvement, Youssouf Toloba, à Fiko (village situé entre Sévaré et Bandiagara) pour parler de paix et ensemble dégager les voies et moyens qu’il faut afin d’y parvenir. Cela avait donné lieu à plusieurs rencontres effectuées dans la ville de Sévaré en présence des représentants des chasseurs, des ‘’djihadistes’’ des notabilités de Mopti, des représentants des autorités administratives, des religieux… Malheureusement, tout ce qui avait été convenu lors des assises n’a pas été respecté.
Ce n’est pas le lieu d’accuser X ou Y, mais il est nécessaire de faire le bilan de la crise au pays dogon. Où en sommes-nous aujourd’hui ? Les choses vont de mal en pis. Si ses interventions suivies par les bonnes intentions affichées par les belligérants avaient été respectées, ce moment allait trouver que la crise a été dissipée ou endiguée.
Malgré ces points énumérés ci-haut, Komane se montre toujours disponible pour accompagner le processus de paix au Pays Dogon car selon ses proches, il est en mission de Dieu.
Comme on aime le dire habituellement, mieux vaut tard que jamais. Il est temps de saisir cette disponibilité qui n’a autre intérêt que la paix au bénéfice des communautés.
Pour le cas de Niono, les deux camps ont clairement affirmé devant tout le monde qu’ils ont un profond respect envers Komane au regard de sa disponibilité et les efforts multiformes qu’il déploie pour la paix. Ils ont promis de ne pas le décevoir.
Pour preuve, prenant les acteurs présents à témoins, les chefs des Chasseurs sont entrés en contact avec leurs camarades sur le terrain afin de leur expliquer le contour de l’accord et ce qu’il faut maintenant faire. Idem pour les représentants de l’autre partie qui étaient déjà venus avec un seul message. La trêve est validée. Ce qui leur restait à faire, c’était de faire le compte rendu à toute la hiérarchie de leur camp hier matin.
Après les dix (10) jours, si les promesses prises sont respectées, s’ouvrira le processus de paix et de réconciliation proprement dit. D’ores et déjà, des actes positifs constatés sur le terrain en début de semaine ont été soulignés par les deux parties.
Ce geste de Komane Tanapo est une épine enlevée dans les pieds des autorités de la transition. Si elles jugent nécessaire de l’accompagner, elles n’auront plus besoin de prendre les choses à la case départ. C’est-à-dire identifier les vrais acteurs, avoir leur confiance, parvenir à les rassembler et parler de comment parvenir à la paix. Ce processus est-il même possible de la part de l’État seul ? A mon sens, cela ne relève que de l’utopie car il y a un véritable climat de méfiance. Les communautés pensent que c’est le laxisme de l’État qui a favorisé la crise et le fait qu’il traîne toujours le pas, sans se soucier des affres vécues par les populations, a contribué à exacerber la situation.
Komane, à lui seul, a labouré et défriché le champ de récolte. Il revient juste à l’État de faire de lui, le véritable levier national tout en l’appuyant dans ses œuvres humanitaires.
Cher Cousin, continuez à faire taire les armes et essuyer les larmes. Dieu vous le reconnaitra et vous récompensera autrement !!!
Boubacar Yalkoué
Source: Le Pays