Le dernier organe de la transition a enfin pris forme depuis ce week-end. Considéré comme incontournable dans une transition pour un pays démocratique, le Conseil national de transition (CNT) faisant office de l’Assemblée Nationale est désormais opérationnel avec ses différentes commissions. Seulement, après la publication du décret fixant la clé de répartition, les autorités de la transition ont été vivement critiquées. Mais avec la publication de la liste des membres, la rupture est désormais consommée entre la classe politique, les organisations de la société civile, les groupes armés et les putschistes.
Il ne pouvait qu’en être ainsi. “Tel on fait son lit, tel on se couche’’, a-t-on coutume de dire. La publication des noms des membres des 121 membres composant désormais le Conseil National de la Transition est l’aboutissement, s’il convient de le dire, d’une entreprise de violation mise sur pied depuis le 18 août, date du putsch contre le Président IBK. Malgré les interpellations faites aux militaires sur leurs propres promesses, mais aussi des principes démocratiques qui gouvernent un pays, ceux-ci n’ont fait qu’à leurs têtes. La violation du choix du Président de transition, du Premier ministre, du gouvernement et pour boucler, le Conseil national de la transition est enfin mise en place malgré les alertes données par une frange de la population. Tel commencé par les militaires, ça devrait finir ainsi. Seuls les myopes et les esprits faibles peuvent espérer un changement dans cette conduite. Il n’est plus un doute sur cette démarche bien identique à celle du régime défunt d’IBK. Mais aussi, il n’y a pas de doute que le principe de cause à effet est bien en gestation en République du Mali. Car, au lendemain de cette publication des listes, une avalanche de communiqués tombe. Il n’est pas exclu que l’on assiste à des ralliements pour la cause. Car, les ennemis sont plus solidaires dans le malheur que le bonheur, nous apprend l’histoire politique. La naissance du M5-RFP est un témoignage vivant que nul ne peut contester au Mali.
Les communiqués de rejet
Pour preuve, le Mouvement du 5 Juin – Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) dans son communiqué, a été limpide sur le décret portant désignation des membres du Conseil National de Transition (CNT).
« Le M5-RFP tient à rappeler sa position clairement exprimée dans sa déclaration du 04 novembre 2020 ainsi formulée : « Le M5-RFP, qui refuse de servir de faire-valoir à un régime militaire déguisé, a unanimement décidé de ne pas participer au Conseil National de Transition (CNT) dans le format proposé. Par conséquent le M5-RFP dénie à quiconque d’y participer en son nom et met en garde les autorités de la Transition contre toute manipulation visant à associer son nom à cette mascarade ».
Cette position de principe a été réaffirmée par courrier du 16 novembre 2020 adressé au Vice-président de la Transition», lit-ion dans ce communiqué
Le M5-RFP, cohérent et fidèle à ses engagements, n’a fourni aucun dossier de candidature et n’a par conséquent aucun représentant au Conseil National de Transition et dénie à quiconque de se réclamer de lui, ajoute le communiqué qui « déplore les pratiques inquiétantes de violations systématiques des textes constitutionnels et légaux par les autorités de la Transition ».
Cependant, le mouvement de contestation tombeur d’IBK, se dit « conscient de ses responsabilités devant le Peuple malien et fidèle au sens du sacrifice des Martyrs de notre lutte pour lesquels justice doit être rendue, le M5-RFP demeure engagé pour la réussite de la Transition, afin de préserver la vision et les impératifs de changement de système qui est l’objectif principal du mouvement national patriotique enclenché le 5 juin 2020 », signé par son porte-parole Choguel K. Maïga.
Pour la CODEM l’entêtement des autorités de la transition sur le décret de nomination des membres du CNT, ‘’renforcer le flou autour de la composition du CNT’’, mais aussi crée un “ manque de transparence sur la représentativité des différentes couches sociales’’. Selon le parti de Osséiny Amion Guindo, “le fonctionnement du CNT va souffrir de légitimité’’.
Les groupes armés du nord rejettent eux aussi cette répartition et les noms des personnes qui sont sur la liste du CNT. Pour ces mouvements, le mandat du CNT finira par un échec. “Car vouloir faire fonctionner un organe aussi important sans la CMA, la Plateforme, la CMI, le M5-RFP, le chérif de Nioro et les partis politiques est un échec sans appel’’, affirme un média proche des groupes armés.
La Coordination des Mouvements de l’Azawad (CMA) qualifie d’“absurde’’ la répartition des sièges au sein du CNT. Le groupe armé signataire de l’accord d’Alger après les différentes rencontres avec les Autorités de Transition afin de niveler tous les différends susceptibles de porter préjudice au lourd challenge d’une Transition est déçu des efforts fournis. Ce groupe armé qui dit participer au Gouvernement de mission “comme l’un des signes forts de cette bonne foi’’ est en regret de constater que “ces louables efforts pour construire la confiance et la paix se heurtent déjà aux jeux habituels de manœuvres dilatoires et de volte-face de la part des autorités en charge de la Transition’’
“En conséquence et au vu du quota insignifiant qui lui a été alloué au sein du CNT malgré tous les gages précédemment obtenus se voit obligée de surseoir purement et simplement sa participation au processus de mise en place du CNT et ce jusqu’au rétablissement de la confiance et du compromis’’, annonce le communiqué de la CMA.
Pa railleurs, il convient de souligner également que les mouvements de l’INCLUSIVITÉ dénoncent leur non-représentation au sein du CNT.
Le Cherif de Nioro, le chérif Madani Haïdara pour ne citer que ceux-là, n’y sont pas non plus. Bref Dicko et ses affidés sont à la manœuvre avec les militaires. Même silencieux, le message passe. Car disait le Philosophe Maurice Merleau-Ponty, “ce silence est bruissant de parole’’. Et comme “qui ne dit rien consent’’, l’Imam Dicko s’attire désormais la colère des martyrs, les politiciens, les groupes armés, la société civile… pour avoir laissé les militaires faire à leur guise. Mais la crainte aujourd’hui est de voir naitre un mouvement de contestation avec ces entités mises de côté dans la composition du CNT.
Bourama Kéïta