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ANTITERRORISME ET DROITS HUMAINS : « IL N’Y AURA PAS DE VICTOIRE MILITAIRE AU MALI SANS LE RETOUR DE L’ETAT DE DROIT » DIXIT LE GÉNÉRAL LECOINTRE

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Dans un peu moins d’un mois, soit le 13 janvier 2021, la France et les pays du G5-Sahel commémoreront le premier anniversaire du sommet de Pau. En prélude à cet évènement, le Général français François Lecointre, Chef d’état-major des Armées, a effectué une visite d’inspection de deux jours, les 11 et 12 décembre 2020, au Mali et au Niger.

A l’occasion de cette visite, le chef d’état-major français des armées est allé à la rencontre des soldats français et de leurs partenaires des forces armées maliennes. Signalons que le Général François Lecointre est un officier qui connait bien la bande sahélo-saharienne qu’il foule pour la septième fois à l’occasion de cette visite d’inspection. A l’issue de cette visite, cet officier supérieur français n’est pas passé par quatre chemins pour faire savoir, en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme dans l’espace du Sahel, qu’« Il n’y aura pas de victoire militaire au Mali sans le retour de l’Etat de droit ».

A propos des constats faits sur le terrain par l’officier français, celui-ci dira « Ce que j’observe sur le terrain, c’est un début de retour dans certains endroits d’autorités civiles : gouverneurs, maires, autorités de police. Objectivement, aujourd’hui, il y a un mieux. Il y a un mieux dans ce retour, peut-être pas de l’Etat de droit, mais de l’État, la réinstauration d’une forme de gouvernance publique dans certains endroits. C’est encore fragile, mais c’est rendu possible par le fait que la sécurité revient malgré tout dans des zones qui, encore une fois, sont un peu plus sous contrôle des forces armées maliennes, qui sont sécurisées par l’opération Barkhane. Et ça, pour moi, c’est un mouvement positif ».

On devrait se réjouir de ce constat, surtout quand il est fait par un officier supérieur français. Nous savons que dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les soldats des pays du Sahel, notamment ceux du Mali, n’ont vraiment pas bonne presse auprès des organisations de défense des droits de l’homme et autres organisations communautaires. L’armée malienne est régulièrement accusée d’exactions contre les civils en général et particulièrement contre les communautés peules. En vérité, l’honnêteté intellectuelle voudrait que l’on reconnaisse que ces pratiques qui, au demeurant, ne constituent que des violations pures et simples du droit international humanitaire, ont pignon sur rue depuis belle lurette dans cet espace géographique, avec un accent particulier au Mali.

On a encore en mémoire les nombreuses accusations portées contre les Forces Armées Maliennes (FAMA), par certaines organisations de défense des droits de l’homme, suite à des preuves irréfutables d’exactions contre les civils ou alors à de découvertes de charniers dont il a été prouvé que des soldats maliens en étaient les auteurs. Si face aux nombreuses accusations ce sont surtout les FAMA qui sont mises sur la sellette, il faut aussi reconnaitre que les armées des autres pays du Liptako Gourma, appelé la zone des ‘’Trois Frontières’’, à savoir le Niger et le Burkina Faso, ne sont pas exemptes, elles-aussi, de reproches sur leurs territoires respectifs.

Mais le plus incongru, face à de telles violations du droit international humanitaire, est le mutisme par lequel s’était longtemps illustrée la France qui est pourtant la principale alliée des pays du Sahel central dans la lutte contre le terrorisme. Ce silence longtemps observé par la France n’aurait-il pas contribué à accentuer davantage la pratique, par les armées nationales des pays du Sahel, des exactions contre les populations civiles ?

En tout cas nombreux sont les observateurs et autres spécialistes de la lutte contre le terrorisme dans le Sahel qui s’accordent à voir en ce silence de la France, une espèce de ‘’complicité’’ dans les actes de violation du droit international humanitaire. Mais fort heureusement et comme pour se dédouaner face à ces accusations, la France a clairement affiché sa position quant aux exactions contre les populations civiles. Pour la circonstance, la ministre française des Armées, Florence Parly, avait vertement critiqué, ce jeudi 18 juin 2020, devant les sénateurs de la commission des Affaires Etrangères, de la Défense et des Forces Armées, ses partenaires du Sahel et avait même menacé de remettre en cause le soutien international si le non-respect du droit international devait continuer et se développer dans l’espace du Sahel.

« Je crois en tout cas que les responsables politiques des pays sahéliens sont parfaitement conscients de l’enjeu. Ils mesurent pleinement la distance qui se creuse chaque fois que des exactions sont commises entre les populations et puis les autorités du pays. Or précisément, tout l’enjeu de cette relance qui a eu lieu au sommet de Pau, c’est de recréer de la confiance. Et nous ne pourrons pas gagner les cœurs collectivement si des exactions telles que celles que l’on peut constater depuis plusieurs mois maintenant se développent et se perpétuent. Puis il y a aussi je crois, une claire conscience que le soutien international dont nous parlons et qui ne se dément pas pourrait à l’inverse être remis en cause si ce non-respect du droit international humanitaire devait se développer », avait prévenu Florence Parly devant les sénateurs français.

Il faut dire que cette sortie de la ministre française des Armées se situait juste au lendemain de la publication d’un rapport d’Amnesty International qui épinglait, sans concession, les armées nationales du Mali, du Niger et du Burkina Faso. S’il est vrai que depuis fort longtemps, les armées nationales des pays du Sahel sont accusées d’exactions et de violation des droits humains, il faut aussi dire que c’est surtout et essentiellement au sortir du sommet entre le G5-Sahel et la France, tenu à Pau le 13 janvier 2020, que les armées nationales des pays du Sahel ont commencé à subir une pression politique de la part de leurs dirigeants.

De ce fait, les armées en question ont été mues par une propension à vouloir, coûte que coûte, prouver des résultats dans leurs missions de lutte contre le terrorisme. Toute chose qui les a entrainé vers un relâchement de leur méthode opératoire, notamment en ce qui concerne le respect du droit humain et du droit international humanitaire, avec pour corollaire des exactions contre les civils.

Source : Le Soir De Bamako

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