Le président français a également appelé à un retour de l’État dans les territoires délaissés du Sahel et promis d’y renforcer la lutte antiterroriste.
Emmanuel Macron a appelé, ce mardi 16 février, à « décapiter » les groupes djihadistes affiliés à Al-Qaïda qui constituent toujours une menace au Sahel, et a exhorté les pays de la région au « sursaut » politique et à un retour de l’État dans les territoires délaissés. Le président français participait, en visioconférence depuis Paris, à un sommet G5 Sahel réunissant depuis lundi à N’Djamena cinq pays du Sahel : le Mali, le Burkina Faso, le Niger, la Mauritanie et le Tchad. Cet événement vise à dresser un bilan des actions menées depuis le sommet de Pau, il y a un an.
En dépit des succès tactiques revendiqués, le tableau demeure très sombre. Plus de huit ans après le début, dans le nord du Mali, d’une crise sécuritaire qui continue à étendre ses métastases à la sous-région, quasiment pas un jour ne se passe au Mali, au Burkina Faso et au Niger sans qu’une attaque soit à déplorer. La barre des deux millions de déplacés a par ailleurs été franchie au mois de janvier. Depuis le sommet de Pau, où Paris avait annoncé l’envoi de 600 soldats français en renfort au Sahel et désigné l’organisation État islamique au grand Sahara (EIGS) « ennemi n° 1 » dans la région, « nous avons réussi à obtenir de véritables résultats dans la zone des trois frontières », entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso, et l’EIGS « a perdu son emprise et subit de nombreuses pertes », a souligné Emmanuel Macron.
Mais les organisations affiliées à Al-Qaïda regroupées au sein du GSIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans) continuent de revendiquer de multiples attaques, a souligné Emmanuel Macron, en promettant « une action renforcée » pour « essayer d’aller décapiter ces organisations », « dont la plus haute hiérarchie continue à nourrir un agenda djihadiste ». De son côté, le Mali s’était dit prêt, courant 2020, à ouvrir des canaux de discussion avec ces groupes affiliés à Al-Qaïda, dont la katiba Macina. Des émissaires ont été envoyés vers Iyad Ag Ghaly et Amadou Koufa, deux figures du GSIM, nébuleuse djihadiste liée à Al-Qaïda qui est responsable de nombreuses attaques.
Macron veut « donner une perspective aux populations du Sahel »
Très peu d’informations ont filtré sur ces contacts jusqu’au renversement du président Ibrahim Boubacar Keïta en août 2020. Les militaires, qui ont depuis mis en place une transition censée rendre le pouvoir aux civils dans un délai de 18 mois, ont affiché leur volonté de donner un nouveau départ au pays. En octobre 2020, lors d’une visite à Bamako du ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, qui avait exclu toute discussion avec les djihadistes, le Premier ministre malien de transition, Moctar Ouane, avait souligné que le « dialogue national inclusif », vaste concertation nationale tenue fin 2019, avait « très clairement indiqué la nécessité d’une offre de dialogue avec les groupes armés » djihadistes.
Si la France ne cache pas vouloir réduire sa présence militaire au Sahel, Emmanuel Macron n’a finalement pas évoqué, mardi, de réduction des effectifs de l’opération antidjihadiste Barkhane, qui compte actuellement quelque 5 100 hommes au Sahel. « L’intention est là, les modalités seront décidées au cours des prochaines semaines et prochains mois », selon l’Élysée. Le président français a également salué, mardi, la décision annoncée la veille par le président tchadien Idriss Déby Itno d’envoyer 1 200 soldats dans cette zone des « trois frontières ». C’est « une décision forte et courageuse qui viendra conforter la force du G5 Sahel », a-t-il commenté.
En outre, le chef de l’État a remercié les pays européens participant au nouveau groupement de forces spéciales Takuba, « qui acceptent ainsi de mutualiser le risque du sacrifice ultime que prennent nos soldats ». Au-delà du volet militaire, le président français a insisté sur la nécessité de « donner une perspective aux populations du Sahel », en appelant à un « deuxième sursaut : celui du retour de la sécurité et des services aux populations » et en réclamant « une impulsion au plus haurt niveau de l’État » pour réinvestir les territoires délaissés de la région. « C’est par le collectif et l’action concrète sur le terrain que nous réussirons. La France continuera d’y prendre sa part parce que je sais que chacun est ici mobilisé », a conclu Emmanuel Macron.