Mise en œuvre en 2006 pour supplanter progressivement la carte d’identité nationale, la carte consulaire ou d’autres pièces moins sécurisées, la carte Nina constitue aujourd’hui un problème majeur pour les Maliens, notamment ceux vivant hors du pays en vue de l’obtention de leur passeport.
Cependant la carte Nina était vue au départ comme une solution pour fiabiliser le fichier électoral malien et doter l’administration malienne d’une base de données fiables sur l’identité civile de tous les citoyens maliens. Toute chose salutaire, car au-delà d’être un outil électoral, la carte Nina est devenue un document indispensable dans le processus administratif du pays. En effet, l’obtention de certains documents est liée à la présentation de la carte Nina ou la fiche individuelle descriptive. D’ailleurs un arrêté ministériel a conféré à la carte Nina la même valeur que la carte d’identité nationale et la carte consulaire. Aujourd’hui elle est devenue un document important, voire obligatoire car sans elle il n’est pas possible de s’octroyer un passeport.
La carte NINA, un problème pour la régularisation des immigrés maliens
La décision du gouvernement de conditionner l’octroi du passeport à la présentation de la carte Nina a été à la base de nombreux problèmes dans le processus de régularisation des maliens établis en Europe, surtout ceux en situation de clandestinité.
En effet chaque année beaucoup de jeunes maliens traversent la mer pour aller en Europe. Beaucoup de ces jeunes n’ont pas de pièces fiables au départ. Une fois établi en Europe en situation de clandestinité, ils tentent de se régulariser en essayant d’abord d’acquérir le passeport du Mali. C’est à partir de là que tous les problèmes commencent, car il faut pour eux la carte Nina ou la fiche individuelle. Or le constat en est que la plupart d’entre eux n’ont pas fait le RAVEC et ceux qui l’ont fait présentent certaines anomalies sur leur fiche d’enrôlement, notamment au niveau de l’âge.
Yaya Diarra un malien établi en France clandestinement, décrit son calvaire en ces termes : « je suis arrivé en France en 2016 en passant par le Maroc. Arrivé en Europe j’ai été appréhendé par le croix rouge et ils m’ont placé dans un service de protection des mineurs. En 2019 les personnels de la croix rouge m’ont dit d’aller me régulariser au niveau du consulat malien en commençant d’abord par avoir mon passeport. Moi n’ayant pas la carte Nina il me serait difficile d’avoir mon passeport malien. Le problème est que j’avais déjà fait le RAVEC avec des donnés qui n’étaient point les miennes. Chez nous au village les gens n’étaient pas bien informés, mon père m’a enregistré avec une pièce qui ne reflète pas mon âge réel qui est de 18 ans. Le RAVEC n’est faisable qu’une seule fois. A chaque fois que je tente de faire un nouveau RAVEC les données de mon ancien compte réapparaissent. Alors que pour le personnel de la croix rouge j’ai 18 ans et il est temps d’avoir mon passeport, ma carte de séjour sur le sol français. Si l’obtention du passeport n’était pas liée à la carte Nina, j’allais avoir depuis longtemps mon passeport et ma carte de séjour. J’appelle le gouvernement malien à revoir cette décision de lier l’obtention du passeport à la carte Nina. Cette carte Nina brise les rêves de beaucoup d’entre nous »
Comme Yaya, beaucoup de jeunes maliens sont dans la même situation et ils ne savent pas à quel saint se vouer.
Cependant, si l’un des difficultés reste les anomalies sur les écritures, l’autre, la plus importante relève de la lenteur des services du consulat des Maliens de France.
Par conséquent, certains de ces jeunes ont manifesté leur mécontentement le 19 février dernier devant le consulat de Paris. Cette manifestation a dégénéré et le consulat a été saccagé occasionnant des blessures. Ces jeunes vivent le calvaire en Europe depuis que la carte Nina est devenue un document obligatoire pour l’établissement du passeport malien et ils ne demandent d’une seule chose le retrait de la carte Nina pour l’établissement du passeport.
On se rappelle tous qu’une commission a été mise en place par le Premier ministre Moctar Ouane afin de trouver des solutions immédiates aux questions relatives à l’obtention de la carte Nina qui est devenue de la croix et la bannière pour les Maliens.
Cette commission doit être en mesure de prendre en compte les aspirations des Maliens de l’extérieur en vue de leur régularisation. D’après Yaya Diarra, les Maliens de la diaspora jouent un rôle important pour le développement de notre pays.
« Chaque mois nous envoyons des milliards au pays. Nous comptons sur les autorités du Mali pour régler ce problème en toute urgence pour le bonheur des milliers de maliens qui souffrent à cause de la carte Nina » a-t-il lancé comme cri de cœur .
Adama Tounkara (stagiaire)
Source: Le SURSAUT