Le Mali a amorcé son véritable virage démocratique un 26 Mars 1991, après de longs mois de combats âpres contre le régime dictatorial du Général Moussa Traoré. Cette date doit rester graver dans toute bonne conscience et elle doit être écrite en lettres d’or au fronton de la République.Jamais une révolution n’a autant mobilisé les maliens, en dépit de leur diversité linguistique, culturelle, cultuelle, voire politique. Ilsont, comme un seul homme et au coude à coude, défié le régime militaro-fasciste du Général Moussa Traoré, pendant de longues semaines, jusqu’au jour fatidique du 26 Mars 1991, où une junte militaire dirigée par le Lieutenant-Colonel Amadou Toumani Touré mit fin à 23 ans de règne sans partage et d’une main de fer. C’est au prix des centaines de vie que la démocratie malienne a été instaurée en 1991. Comment une journée aussi importante comme celle du 26 Mars pourrait être un non-événement, ou du moins vidée de toute sa substance, pour n’être seulement qu’une date symbolique ? Les divergences politiques, les querelles intestines et les conflits d’intérêts des leaders du Mouvement démocratique ont-ils eu raison de la défense des acquis de la démocratie et de l’Etat de Droit, fruits de cette héroïque lutte?
La révolution malienne, c’est-à-dire celle de tout un peuple,a fait des émules dans la sous-région, voire en Afrique, tant elle a été menée par une masse intrépide qui a accepté de payer le prix du sang pour que la démocratie puisse être construite.Aujourd’hui, elle est en passe d’être réduite à une portion incongrue. Cette campagne de remise en cause de la révolution malienne a commencé sous ATT et elle s’est poursuivie sous IBK. Ce dernier l’a tout simplement réduit au dépôt de gerbe de fleur au monument des martyrs. Elle est passée inaperçue, comme si ses détracteurs ont eu le dessus, à travers leur campagne de démolition.
Les fossoyeurs sont toujours à la manœuvre pour faire capoter la belle révolution malienne. Ils ont d’abord réussi à rallier à leur projet de démolition, voire de liquidation de la démocratie, certains caciques du Mouvement démocratique qui n’ont de cesse de rappeler que la démocratie au Mali n’a servi qu’à enrichir des personnes, mais appauvrir le pays. L’échec d’un certain nombre de régimesou de quelques individus devrait-il être un alibi pour remettre en cause la démocratie ?Me Mountaga Tall et Dr Oumar Mariko, pour ne citer que ces deux figures emblématiques du Mouvement démocratique, semblent être les plus virulents critiques et ont fini par donner des ailes aux détracteurs du Mouvement démocratique. Qui ne se rappelle pas de cette affirmation de Me Tall selon laquelle le Mouvement démocratique n’a gouverné le Mali que du 26 mars 1991 au 8 juin 1992. Faisant allusion à l’investiture du premier Président démocratiquement élu au Mali, à savoir Alpha Oumar Konaré.Et pourtant de l’avènement de la démocratie jusqu’à aujourd’hui Me Tall a toujours été au cœur de la gestion du pouvoir, député à plusieurs reprises, sous Alpha et ATT, ensuite ministre sous IBK. Quant à Oumar Mariko, il a été réfractaire à tous les régimes qui se sont succédé au pouvoir depuis 91, et pourtant il devrait partager le bilan des deux derniers régimes, car son parti a pris part au premier gouvernement d’ATT, avec Cheick Oumar Sissoko comme ministre. Dr Mariko a non seulement été lui-même député à plusieurs reprises, mais aussi et surtout, il a contribué à l’avènement d’IBK au pouvoir en 2013.
En somme, remettre en cause l’épique combat pour l’avènement de la démocratie et même le Mouvement démocratique, c’est vraiment faire preuve de mauvaise foi. Il y a certes des failles, il y a eu beaucoup de manquements, mais ceux-ci ne doivent nullement pas permettre d’apostasier le Mouvement démocratique qui a, comme toute œuvre humaine, besoin d’être perfectible. Aux fossoyeurs et à leurs complices pseudos démocrates, le peuple doit leur jeter à la figure cette boutade selon laquelle Rome n’a pas été faite en un seul jour, donc la construction de la démocratie est une œuvre de tous les jours.
Youssouf Sissoko