Ce mardi 6 avril , les pays ayant négocié l’accord de 2015 à Vienne en Autriche se retrouvent au même endroit, y compris les États-Unis. Restent les obstacles et la méfiance.
La diplomatie peut-elle sauver l’accord sur le nucléaire iranien? Conclu en 2015, il avait permis de limiter et de contrôler les activités nucléaires de Téhéran. mais Donald Trump avait ensuite tourné le dos à ce compromis et rétabli des sanctions. Depuis, l’Iran a de son côté largement enfreint ses obligation internationales. À l’approche de la réunion de Vienne, le pays du Golfe affiche une ligne dure.
Les États-Unis font certes leur retour dans le cercle des pays en charge du dossier nucléaire iranien, duquel ils étaient sortis en 2018. Le département d’État a confirmé l’envoi d’un représentant à Vienne, Rob Malley, pour des discussions avec les Européens, les Russes et les Chinois, mais ajoute qu’il n’avait pas prévu de rencontrer son homologue iranien. Pour Téhéran non plus, pas question de discuter directement avec les représentants de Washington ce mardi. Les délégations n’ont pas prévu de siéger dans la même pièce.
Fermeté également de la République islamique lorsqu’elle exige que les États-Unis lèvent l’ensemble des sanctions qui étouffent l’économie iranienne. Une condition pour que l’Iran freine de nouveau ses travaux d’enrichissement d’uranium.
Mais au-delà de ces messages de fermeté, la question est de savoir si une désescalade progressive peut s’amorcer. Allègement graduel des sanctions contre retour par étapes de l’Iran à ses obligations internationales. « C’est une première étape », indique sur Twitter Rob Malley, qui avait participé aux négociations en 2015 sous Barack Obama. « Les discussions s’annoncent difficiles, écrit-il, mais elles sont sur le bon chemin. »
Un marathon diplomatique, politiquement délicat pour Biden et Rohani
Dans les deux camps, la question de la désescalade est politiquement risquée. Pas si simple pour Joe Biden de faire le premier pas. Car si le président américain veut convaincre Téhéran de réduire sa production d’uranium enrichi, il va devoir alléger les sanctions qui paralysent son économie et en politique intérieure, un tel pas risquerait d’être utilisé contre lui par son opposition et sans doute d’être mal perçu par une partie de son opinion. Une position d’équilibriste d’autant plus difficile à trouver pour Washington après les récentes attaques lancées contre des intérêts américains en Irak par les milices chiites pro-Iran mais aussi après la politique dite de pression maximale de l’administration Trump contre l’Iran avec comme point culminant l’élimination du général Soleimani en 2020.
Côté iranien non plus, un pas en avant pourrait également être mal perçu par la population, à deux mois de l’élection présidentielle. Sur RFI, Vincent Eiffling, spécialiste de l’Iran au Centre d’étude des crises et des conflits internationaux, expliquait que l’Iran, « si l’on s’en tient uniquement aux critères économiques », aurait intérêt à faire le premier pas. « Maintenant, il faut aussi tenir compte de l’état d’esprit d’une bonne partie de la population iranienne, qui n’est plus du tout aussi favorable à l’accord sur le nucléaire qu’elle ne l’était en 2015. Énormément d’Iraniens ont le sentiment que l’Iran s’est fait rouler dans la farine, qu’on a donné beaucoup pour ne rien recevoir en retour. Compte tenu de cela, faire le premier pas, pour l’administration Rohani et pour le camp des modérés, équivaudrait en quelque sorte à un suicide politique. Il faut également prendre en compte le contexte préélectoral en Iran, où tout signe de faiblesse aura des conséquences sur le scrutin présidentiel à venir, notamment pour le camp modéré aujourd’hui aux commandes. »
Dans le meilleur des cas, c’est un marathon diplomatique qui s’annonce pour l’Iran et pour les six autres pays concernés : États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne.
RFI