L’Union européenne a sanctionné lundi dix membres de la junte au pouvoir en Birmanie et deux sociétés qui lui assurent un financement pour condamner la répression violente des manifestations en faveur de la démocratie.
Marquant concrètement sa condamnation, l’UE a ajouté à sa liste noire dix nouveaux membres de la junte birmane, que les Européens jugent directement impliqués dans les prises de décision et responsables à ce titre de l’affaiblissement de l’État de droit en Birmanie. Les deux sociétés sanctionnées sont la Myanmar Economic Holdings Ltd (MEHL) et la Myanmar Economic Corporation (MEC).
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Le principe de ces nouvelles sanctions avait été décidé le 22 mars, lorsque les Européens avaient sanctionné onze personnes, dont le général à la tête des putschistes, Min Aung Hlaing. La semaine dernière, la Haute-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a dit craindre un conflit généralisé comme en Syrie et exhorté les États à « prendre des mesures immédiates, décisives et effectives » pour forcer les militaires à mettre fin à la répression.
Répression par la torture
Les généraux putschistes font face à des manifestations constantes pour réclamer le retour à la démocratie et répriment presque quotidiennement dans le sang ce mouvement de contestation. Selon l’association birmane AAPP, 3229 personnes sont actuellement détenues et au moins 17 détenus sont morts sous la torture. Par ailleurs, des mandats d’arrêts ont été émis contre 930 personnes, impliquées de près ou de loin au mouvement de désobéissance civile selon la junte.
Parmi ces personnes, un étudiant en sciences politiques à l’université de Rangoun, membre d’un syndicat. « Certains étudiants de notre syndicat ont été interpellés le 3 mars, en tout 300 ont été arrêtés lors d’une manifestation dans le quartier Tham, à Rangoun. La grande majorité a été libérée le 24 mars, mais notre responsable syndical est toujours en prison où il a été torturé. D’autres prisonniers ont subi des tortures terribles », témoigne-t-il, au micro de RFI.
L’étudiant en sciences politiques assure aussi que « la junte procède en ce moment à des arrestations en pleine nuit pour faire cesser les manifestations ». « Ils essayent de faire peur aux gens, d’instiller la peur pour stopper la contestation. Mais on ne s’arrêtera pas, ils ne nous font pas peur. Je suis moi aussi sur la liste des personnes recherchées et pourtant je continue à m’opposer à la junte. Comme je fais l’objet d’un mandat d’arrêt, je me cache. Mais en tant que membre d’un syndicat étudiant, je continue à œuvrer de manière clandestine à la création d’un système éducatif démocratique et fédéral. »
Un sommet de l’Asean
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et son prédécesseur, Ban Ki-moon, ont par ailleurs pressé l’Asean d’agir en vue d’un règlement de la crise, au cours d’une visioconférence de dirigeants du Conseil de sécurité sur les relations entre les Nations unies et les organisations régionales. « J’exhorte les dirigeants à décider d’actions immédiates et concertées pendant le sommet » spécial sur la Birmanie des pays de l’Asie du Sud-Est prévu pour le samedi 24 avril, à Jakarta, en Indonésie, et auquel le chef de la junte doit prendre part, a déclaré Ban Ki-moon.
La situation chaotique depuis le putsch, qui a renversé le 1er février le gouvernement civil dirigé par la lauréate du prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, doit être discutée à l’occasion du sommet de l’Asean.
RFI