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Stabilisation du mali et du Sahel : Sortir de la logique guerrière de la France pour voir le bout du tunnel

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Certains voisins ne se cachent pas pour jeter la pierre à notre pays considéré comme l’agent de déstabilisation de la sous-région à cause de la gestion qui a été faite de la rébellion de 2012 éclipsée par l’extrémisme religieux devenu un terreau fertile du terrorisme. Mais, consciencieusement, ils savent qu’ils disent cela pour se donner bonne conscience devant leurs peuples sinon que le Mali ne peut rien contre cette crise multidimensionnelle qui lui a été imposée depuis l’Elysée et le Quai d’Orsay pour le déstabiliser et mieux profiter de ses richesses. Malheureusement, nos dirigeants continuent à courber l’échine et à faire confiance au pyromane pour éteindre l’incendie.

«La forêt rétrécissait, mais les arbres ont continué à voter pour la hache car elle était intelligente pour convaincre les arbres que, parce que le manche était en bois, il était l’un d’eux», rappelle un proverbe turc. Aujourd’hui, la France incarne cette hache dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, nous dirons même dans ses relations avec l’Afrique, notamment ses anciennes colonies. Elle s’est rendue «indispensable» dans la lutte contre le terrorisme. Sans sa présence militaire, c’est le «chaos au Sahel» !

Et pourtant cette menace a été planifiée par cette même France pour se remettre en selle dans la bande sahélo-saharienne où sa suprématie était de plus en plus contestée par la Jamahiriya arabe libyenne du regretté Mouammar Kadhafi, la Chine et de nombreux pays émergents. Et nous continuons naïvement de croire que c’est ce même pays qui peut nous aider à enrayer cette menace. Il nous dicte ses principes et nous impose sa volonté. Et nous le suivons malgré notre conviction que l’option militaire ne peut jamais venir à bout du terrorisme.

C’est inexplicable que, de la colonisation à nos jours, les élites maliennes voire africaines n’aient pas toujours compris que la France nous mène par le bout du nez dans le sens de ses intérêts. Si faire disparaître le Mali était aujourd’hui sans ses intérêts, elle allait se donner les moyens d’y parvenir. D’ailleurs, la colonisation n’a été qu’une course contre la montre entre Anglais et Français notamment pour des raisons économiques.

«La France doit répandre son influence sur le monde et porter partout où elle le peut sa langue, ses mœurs, son drapeau, ses armes, son génie… Les races supérieures ont le devoir de civiliser les races inférieures», a martelé Jules Ferry en juillet 1885 devant la Chambre des députés.

Détruire le système éducatif pour briser la colonne vertébrale de la résistance africaine

Cette idée «d’une colonisation bienfaitrice» n’était en fait qu’une astuce pour dissimuler ses enjeux économiques dont la satisfaction passait par la reddition et la soumission des rois de l’époque et aujourd’hui par celle des élites africaines. «J’ai voyagé à travers l’Afrique, je n’ai pas vu de mendiants ni de voleurs ; j’ai vu des personnes avec de hautes valeurs morales et je pense que nous ne pouvons conquérir ce continent, à moins que nous ne brisions sa colonne vertébrale qui est sa spiritualité et son héritage culturel», a déclaré Lord Macaulay devant le parlement britannique le 2 février 1835.

Il a ainsi proposé de détruire le système éducatif  et culturel en place pour permettre à son pays de parvenir à ses fins coloniales. Ainsi, a-t-il ajouté, quand «les Africains penseront que ce qui vient de l’extérieur, en particulier de l’Angleterre, est meilleur à ce en quoi ils croyaient, ils perdront l’estime de soi, leur culture et ils deviendront ce que nous voulons qu’ils soient : une véritable nation dominée».

Et c’est ce que nous vivons depuis, principalement par la faute de nos élites dirigeantes. Chaque fois qu’un peuple d’Afrique est sur le point de se rebeller contre la politique néocoloniale de la France, elle trouve un moyen de changer de visage par le truchement de nos élites. Complexées, celles-ci pensent que sans la France et d’autres pays impérialistes, nous allons tous mourir. Et que la «vraie» civilisation est celle qu’ils nous font gober pour être davantage à leur merci.

Le lavage de cerveau et la pression sur l’élite dirigeante font que celle-ci est incapable de réfléchir, donc d’analyser de façon lucide que c’est la France et d’autres pays riches qui font que nous ne pouvons pas décoller. Convaincus que nous ne pouvons rien faire sans eux, nous acceptons tout ce qu’ils nous imposent comme stratégies et schémas de développement sans tenir compter de nos réalités, de l’environnement socioculturel et économique de nos Etats. Et chaque fois que la France sent qu’une ancienne colonie risquer d’échapper à son emprise, elle crée un phénomène : coup d’Etat, démocratie à l’aune des valeurs occidentales, dévaluation de la monnaie, guérilla… et aujourd’hui le terrorisme.

La rébellion de 2012, qui a été le terreau fertile pour le règne de l’extrémisme violent au Sahel, était un deal entre des mercenaires touaregs et la France qui a réussi à les retourner contre le Guide Mouammar Kadhafi afin d’assassiner ce dernier et détruire totalement le modèle de développement de la Libye qui prouvait que, avec toutes nos richesses naturelles, nous n’avons pas besoin de l’occident pour émerger. Aujourd’hui, la lutte contre le terrorisme est utilisée par l’Hexagone comme une épée de Damoclès pour forcer les dirigeants sahéliens à gouverner leurs pays dans le sens des intérêts français voire européens.

Créer le chaos pour détourner l’attention et piller les richesses

La présence militaire française au Sahel n’est pas de nature à apporter la stabilité attendue. Elle vise plutôt à maintenir une situation de chaos pour détourner l’attention du peuple des décideurs et profiter pour piller les richesses du pays. C’est pourquoi Macron est farouchement opposé à tout dialogue avec Iyad Ag Ghali, conformément aux recommandations de la Conférence d’entente nationale (CEN) et du Dialogue national inclusif (DNI).

C’est pourtant l’unique voie de sortie aujourd’hui pour le Mali puisque l’option militaire prônée par la France et ses alliés est sans issue certaine. La preuve est que les arrivées massives de commandos canadiens, britanniques, allemands et maintenant des pays de l’Est n’ont apporté aucun résultat quant à la situation sécuritaire, bien au contraire. C’est donc un piège sans fin pour les peuples du Sahel.

«Pour trouver la paix, il faut que les Maliens se parlent entre eux, que ce soit les jihadistes ou de l’autre côté. Il faut trouver la solution parce que la guerre, ça n’arrange personne. Combien d’années ça va prendre pour combien de victimes ? Et on finit toujours par négocier. Il est temps de trouver la solution», a déclaré Ahmada Ag Bibi, ancien cadre d’Ançar Dine d’Iyad Ag Ghali et aujourd’hui l’un des leaders du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) qui était l’invité d’Afrique dans la matinée du 5 avril 2021 sur RFI.

«Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa sont des Maliens bien connus. Iyad a été un leader touareg dans le passé. Et le Dialogue national inclusif a recommandé de négocier avec Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa…», a-t-il rappelé. Ce dialogue est possible et ce ne sont pas les intermédiaires qui manquent. A commencer par Ag Bibi lui-même qui a été le médiateur des autorités maliennes dans la libération de feu Soumaïla Cissé, de la Française Sophie Pétronin et des deux Italiens. «Je suis un Malien. Si le gouvernement me le demande, je suis prêt à rendre ce service, il n’y a pas de problème», a assuré l’ancien député du Rassemblement pour le Mali (RPM, ex-parti au pouvoir) de Kidal.

Tout comme on peut compter sur l’imam Mahmoud Dicko (qu’Iyad Ag Ghali écouterait d’une oreille attentive) pour nouer le fil du dialogue entre le gouvernement et les jihadistes d’origine malienne. En tout cas si nous voulons la paix et la stabilité de notre pays, nous ne pouvons plus rester dans la logique guerrière de la France et de ses alliés. Il est temps que nos élites s’assument pour défendre les intérêts réels des Maliens.

«Quand tu confies la garde du troupeau à l’hyène qui s’est déguisée en chien berger, au lieu de le sécuriser, elle cherchera à savoir combien de brebis elle pourra manger par jour. Une fois le troupeau décimé, elle viendra te donner des leçons sur comment s’occuper d’un troupeau sous prétexte qu’elle a eu la charge d’un troupeau même si le résultat aura été chaotique», déplorait un activiste sur twitter en rappelant que «c’est en gros ce qu’est le Mali depuis des décennies» avec la France.

Y mettre fin dépend du courage de nos décideurs et de l’engagement de chaque malien à ne plus laisser le sort du pays se décider dans les salons feutrés de l’Elysée ou du Quai d’Orsay !

Source : Le Matin

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