L’Untm rompt le calme du climat social autour du Premier ministre Moctar Ouane en déposant sur la table du gouvernement un préavis de grève de 96 heures.Assortie d’une menace de généralisation du mouvement qui risque, cette grève, si elle n’est pas arrêtée à temps, pourrait perturber gravement le maigre équilibre économique du pays. Mais aussi de freiner net la Transition dans son élan. Face à cette équation pour le moins périlleuse pour le pays, le Premier ministre aura-t-il la marge de manœuvre suffisante pour parer à toute éventualité ?
Avec cette nouvelle hostilité de l’Untm, c’est encore une fois la pression sur le Premier ministre Moctar Ouane, qui va devoir se battre comme un beau diable pour ramener l’accalmie sur le front social. Un front apaisé dont il a besoin en ce tournant décisif de la Transition. Ce, pour se mettre à l’évidence sur des questions importantes de la vie de la nation.
Les responsables de la centrale syndicale, en menaçant le gouvernement d’une nouvelle grève, à caractère illimité, si les revendications ne sont pas satisfaites, savent bien qu’ils mettent sous pression le Premier ministre qui, ces derniers temps, est interpellé sur divers sujets de la vie nationale, les uns aussi préoccupants que les autres.
Eh bien, dans ce cocktail explosif, au plan des urgences et des contraintes, notamment sur les questions politiques et institutionnelles, si l’Untm s’y mêle avec cette probabilité de perturber le climat social, il est donc évident que le Premier ministre aura du pain sur la planche. Lui qui a jusqu’ici réussi à maintenir une certaine accalmie sur le front social, aura certainement du mal à voir s’effriter ce maigre acquis, d’autant qu’ilsait par ailleurs que l’entente sociale, ce forum social qu’il doit organiser, selon la charte de la transition, ne s’en sortira pas indemne.
Voilà pourquoi il est plus qu’urgent pour le Premier ministre d’anticiper sur ces discussions corporatives qui vont nécessairement débuter entre les deux partenaires stratégiques et de ne pas, pour cette raison, laisser trainer les choses jusqu’au pourrissement des rapports sociaux.
Certes les négociations syndicales engagent plus particulièrement des négociateurs gouvernementaux, sous l’égide du département de tutelle, avec l’œil bienveillant d’une commission de médiation.Mais, pour ce coup-ci, en raison même de l’enjeu politico-social sous-jacent, il est important que le Premier ministre Moctar Ouane soit proactif et prévoyant, ne serait-ce que dans les coulisses, pour ne pas se laisser dépasser par les évènements.
On a appris dans l’entourage des travailleurs que les syndicalistes de la Bourse du travail ont reproché un moment au Premier ministre de trainer les pieds sur des points revendicatifs qui ont déjà fait l’objet d’accord avec le syndicat et qui sont aujourd’hui remis en question du fait qu’ils n’ont pas connu un début d’application, conformément au procès-verbal de conciliation, signé entre les deux parties. Si tel est le reproche de l’Untm à l’endroit du Premier ministre, ce dernier doit incessamment activer le cadre de concertation existant en la matière et se mettre à la disposition des syndicalistes de la Bourse du travail.Lesquels, pour la circonstance, ont besoin d’un signal fort du côté des décideurs, allant dans le sens de la satisfaction de leurs doléances.
Rien n’est trop important pour le Premier ministre que la confiance retrouvée et renouvelée avec les partenaires sociaux, à l’image d’une Untm déterminée à se faire entendre par les autorités nationales. Le gouvernement de la Transition, qui n’aura plus à espérer sur quelque délai de grâce que ce soit, en raison justement de l’urgence et des priorités qui s’annoncent devant ellesait bien que les choses vont aller très vite, à un rythme infernal, tel qu’elle ne pourra pas se passer de l’accompagnement des partenaires sociaux pour pouvoir maintenir le cap.
La menace de la grève de l’Untm est intervenue en ce moment crucial, de la trajectoire de la transition, où les contraintes s’entachent ; les unes plus préoccupantes que les autres, pour les autorités nationales qui devront faire face également à l’ébullition du front politique. Qu’il s’agisse du chronogramme des élections ou de la suppression de l’aide publique allouée aux partis politiques, en passant par la sempiternelle question liée aux réformes politiques et institutionnelles, la transition cherche le compromis difficile sur toutes ces questions en vue de s’acheminer vers une fin tranquille de son terme échu.
C’est donc pour toutes ces raisons que le Premier ministre Moctar Ouane doit s’employer, y compris en scrutant la voie prisée de la diplomatie souterraine, pour tenter de garder l’initiative du dialogue avec les syndicalistes, engagés dans cette nouvelle épreuve de force avec le gouvernement. Les points qui fâchent, inscrits dans l’ordre des discussions, n’ont aucun mystère pour le Premier ministre, lequel sait sur chacun de ces points ayant déjà fait l’objet d’accord, ce qu’il faut, dans la juste proportion, pour retrouver plus rapidement la confiance des syndicalistes.
Sur cet aspect diplomatique des choses, on peut compter sur l’approche participative du Premier ministre qui lui permettra à coup sûr non seulement de briser le mur de méfiance vis-à-vis des travailleurs syndicaux, mais aussi de les faire partager, au bénéfice des vertus du dialogue, la nécessité de ne pas rompre le fragile équilibre social dont ils auront tous besoin en tant que partenaires sociaux, pour faire avancer les choses.
Oumar KONATE
Source: La Preuve