Le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat Libre de la Magistrature, en raison du climat tendu entre les Magistrats et les Hommes de Médias dans l’exercice de leur profession respective, ont organisé, le lundi 17 mai 2021, une conférence de presse dans l’enceinte de la Cour Suprême. Les deux syndicats ont profité pour s’expliquer sur l’état des lieux de la question judiciaire au Mali. Mais aussi et surtout, ils ont profité de l’occasion pour dénoncer « les outrages » de certains médias et citoyens à l’encontre des magistrats à cause de leurs décisions de justice.
La Transition malienne est actuellement confrontée à un front social en ébullition avec la grève en cours de la principale Centrale des Travailleurs (UNTM). Au même moment, en dépit de la démission du Gouvernement Ouane I, le M5-RFP rejette toute participation au Gouvernement Ouane II et menace de manifester dans les rues. Le Mali est donc, plus que jamais, plongé dans une crise sociopolitique. Au même moment, des Hommes de Médias et certains citoyens font aujourd’hui l’objet de plainte ou jugement au motif « d’outrage à Magistrat ». C’est ce moment précis qu’ont choisi le SAM et le SYLMA pour s’entretenir avec eux.
Les magistrats sont-ils des justiciables ? Sont-ils justiciables de l’opinion et de la critique ? Pour les conférenciers syndicalistes du SYLMA et SAM: « Les magistrats sont bien des justiciables. Mais ils ne sont pas, sous peine d’outrage à magistrat, justiciables de l’opinion et de la critique ». Mais comment se fait-il que, bien que les magistrats soient des justiciables, qu’ils ne soient pas justiciables de l’opinion et la critique ? Pour expliquer cette nuance, les conférenciers ont dressé une frontière entre l’outrage à Magistrat et le plein exercice de la liberté d’expression (un Droit constitutionnel). Ils affirmeront que des magistrats, contrairement à ce qui se dit, sont assujettis à la loi sur l’OCLEI. Qu’ils font constamment l’objet d’enquête auprès de l’Office contre l’enrichissement illicite (OCLEI). Auprès duquel, ils sont tenus à faire des déclarations de biens.
A en croire les conférenciers, la Loi protège une certaine catégorie de fonctionnaire : les Officiers ministériels, la fonction de président de la république, les magistrats, dans l’exercice de leurs fonctions. Toute critique ou attaque contre la personne physique d’un magistrat dans l’exercice de ses fonctions, expliquent-ils, est considérée comme un outrage. Mais la décision de justice est critiquable mais cela doit se faire sur la base de faits réels et avérés. Sinon toute critique, sur des bases mensongères, rentre dans le cadre d’outrage à la fonction de magistrat. Mais ils préciseront que la critique d’une décision de justice, dans la mesure du possible, doit être objective et ne pas porter atteinte à l’honneur et la dignité d’un magistrat qui exerce « une fonction difficile, grave et protégée ».
Les conférenciers du SAM et SYLMA, en portant plainte contre X en tant que syndicat, soutiennent qu’ils ne font que défendre les intérêts matériels et moraux de leurs militants et de la fonction judiciaire. Mais, se défendent-ils, cela ne veut pas dire qu’ils sont contre l’exercice de la liberté d’expression qui est un droit constitutionnel auquel les magistrats sont attachés. Car celle-ci est le socle de tout système démocratique. Pour s’opposer à une décision de justice, la personne physique ou morale dispose des voies et recours règlementaires.
Les syndicalistes du SAM et SYLMA ont nié « les allégations de l’UNTM », circulant dans la presse et les réseaux, qui affirment que l’Etat consent une allocation de 2 millions FCFA de primes aux magistrats. Ils ont défié quiconque d’en amener la preuvecontraire. Les conférenciers réfuteront également la thèse qui accuse les magistrats maliens d’être en connivence avec les Autorités de la Transition. D’après eux, leur corps professoral n’est de connivence avec aucun régime. « La magistrature n’est au solde de personne. Elle ne sera au solde de personne », clament-ils. Ils ont aussi affirmé que les acquis qu’ils ont aujourd’hui, datent de la signature d’un décret en 2019 sous l’ère IBK.
Normalement, jubilent-ils, le magistrat doit adopter un devoir de réserve pour ne pas s’expliquer publiquement sur ses conditions ou pour commenter l’actualité. C’est donc au syndicat de le faire. A cet effet, M. les conférenciers affirmeront : « la grève en cours de l’UNTM, c’est pour se protéger. Car, le pôle économique est à leurs trousses. Des biens appartenant à des ténors de l’UNTM sont déjà saisis par le pôle économique ». Mais puisqu’il existe des brebis galeuses dans chaque corporation. Alors qu’en est-il des biens probablement mal acquis par des magistrats véreux ? Seraient-ils aussi saisis par le pôle économique ? De toute façon, que personne ne soit, fut-il sa fonction, au-dessus des lois de la république !
Gaoussou Madani Traoré