Il est à l’origine depuis une dizaine de jours de l’exode de centaines de milliers d’habitants de la ville congolaise de Goma en RDC. Le Nyiragongo, le volcan le plus dangereux d’Afrique, menace à nouveau cette ville située dans l’est du pays. Ce volcan, situé dans le grand rift est-africain, continue d’intriguer les scientifiques et de constituer une menace perpétuelle pour les habitants de la région.
Le Nyiragongo fascine les volcanologues depuis que l’un d’entre eux, le célèbre Haroun Tazieff, s’y est intéressé à la fin des années 50. Il s’était rendu en République démocratique du Congo à l’occasion de l’éruption d’un autre volcan le Kituro, situé lui aussi dans les montagnes des Virunga. Mais déjà à l’époque le Nyiragongo intriguait Haroun Tazieff. Il s’en était confié des années plus tard -en 1963- en expliquant que « Chaque nuit quand il regardait dans le ciel, il voyait au-dessus de la silhouette noire du Nyiragongo un rougeoiement continu, et qu’il y avait au fond de ce volcan quelque chose d’inconnu. Ce rougeoiement avait commencé vingt ans plus tôt et on ne savait pas à quoi il était dû ».
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Et depuis qu’Haroun Tazieff a pu s’approcher du cratère on sait désormais à quoi est dû ce rougeoiement. « Il a un cratère rempli de lave, on voit des bulles qui montent, ça craquelle », explique la volcanologue Valérie Cayol, chargée de recherche au CNRS et auteur de plusieurs articles sur le Nyiragongo. Elle relève également : « il y a peu d’endroits au monde où il y a de la lave dans les cratères ».
« Une lave unique »
La lave n’est pas seulement permanente dans le Nyiragongo mais sa consistance est elle aussi très spéciale souligne Dario Tedesco, professeur de volcanologie à l’université de la Campania en Italie. Ce volcanologue très réputé se trouve actuellement à Goma et décrit une lave extrêmement fluide et très peu visqueuse. « Il n’y a pas de lave semblable ailleurs sur la planète, c’est une lave unique ». Cette fluidité « permet d’atteindre des vitesses exceptionnelles : jusqu’à 100 km/h lorsqu’elle dévale les pentes, ce qui explique sa dangerosité ».
Le témoignage d’un photographe permet aussi de mieux comprendre l’activité et la violence du Nyiragongo. Ce photographe, Olivier Grunewald, est français. Il est aussi réalisateur et auteur du documentaire « Nyiragongo, voyage au centre de la terre ». Il est l’un des rares photographes à s’être spécialisé dans les volcans en éruption. En 2010, en accompagnant une expédition scientifique, il a pu s’approcher de très près, jusqu’à 1 m du cratère de volcan. Il a été frappé par « une colonne de lave de plusieurs kilomètres de hauteur dans une situation d’équilibre ». Selon lui, on parle à tort d’éruption du volcan Nyiragongo « car celui-ci est en éruption permanente, ce phénomène de lac de lave étant considéré comme une activité éruptive ».
Aucun indice permettant de donner l’alerte
Et c’est justement de cette « éruption permanente » que vient le véritable problème pour les populations. Le volcanologue Dario Tedesco en est convaincu lui aussi. Il souligne que ce volcan Nyiragongo n’a donné le 22 mai dernier, et les jours qui ont précédé, aucun indice permettant de donner l’alerte. « Les cassures, les anomalies thermiques permettent généralement, sur un volcan éteint, de constater à l’avance qu’il entre en éruption. Ici elles ne sont pas visibles car elles sont déjà là depuis longtemps ».
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La précédente éruption du Nyiragongo était en janvier 2002. Elle avait fait plus de 100 morts. Depuis, le danger a pris une autre dimension : la population ayant plus que doublé, comme le relève Valérie Cayol, « en 2002 il y avait 500 000 personnes à Goma, maintenant il y en a plus d’un million ». La situation politique instable dans la région du Nord Kivu explique ce déplacement des populations vers la ville. « Ils se sont réfugiés à Goma et ceci accroît le risque ».
Avec cette surpopulation, il suffit désormais d’une éruption même minime pour que les choses tournent mal. Ce fut le cas il y a un peu plus de dix jours. Dario Tedesco relève que le 22 mai, on a assisté à « une toute petite éruption bien moindre que celle de 2002 ». Elle aurait eu de moins graves conséquences selon lui si elle s’était produite en 2002 car « la véritable raison des dégâts actuels sont dus au fait que la population s’est beaucoup rapprochée du volcan »
Au petit matin du 23 mai dernier. La lave s’est heureusement arrêtée à tout juste 300 mètres des abords de Goma. Mais la catastrophe a touché dix-sept villages environnants faisant au moins 32 morts et détruisant des centaines d’habitations.
RFI