Le Premier ministre, Dr Choguel Kokalla Maïga, s’est prêté, hier, aux questions des membres de l’organe législatif sur le document, présenté vendredi dernier. Dans une démarche pédagogique, il s’est évertué à convaincre ses interlocuteurs sur la pertinence des actions qu’il entend mener à la tête de l’exécutif
Le chef du gouvernement a échangé, toute la journée durant et jusqu’en début de soirée, avec les membres du Conseil national de Transition (CNT) sur le Plan d’action du Gouvernement (PAG) qui s’articule autour de quatre axes. Comme il fallait s’y attendre, les débats ont été marqués par de nombreuses interventions. Les membres de l’organe législatif voulaient sans doute avoir le maximum d’explications sur le document avant de lui accorder leur quitus. Ils l’ont fait à l’issue des débats par 102 voix pour, 2 contre et 9 abstentions.
Dans l’ensemble, les membres du CNT ont jugé le PAG précis, concis, évaluable, pertinent, bien structuré et ambitieux. Cette appréciation positive n’a pas empêché des questions sur certains axes. Plusieurs intervenants se sont interrogés sur la possibilité de mettre le PAG en œuvre dans le délai de la transition. Aussi, des interrogations ont été émises sur la création d’un organe unique de gestion des élections, la mobilisation des plus de 2.000 milliards de Fcfa nécessaires à la mise en œuvre du document.
L’organisation des Assises nationales de la Refondation (ANR) et son coût à savoir 2,5 milliards de Fcfa, le sort réservé à l’article 39, la relecture consensuelle et la mise en œuvre intelligente de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger ont également suscité des débats. Sans oublier les questions sur la police territoriale, les audits dont celui relatif à la cession des bâtiments publics, les enquêtes sur l’occupation et les démolitions dans la zone aéroportuaire, la légalité du CNT, l’état des lieux du processus de Désarmement Démobilisation et Réinsertion (DDR).
En réponse, le chef du gouvernement a indiqué que le PAG comprend un mécanisme de suivi-évaluation interne et externe. Parlant de ce qui motive la création de l’organe unique des élections, Dr Choguel Kokalla Maïga dira que la réforme du système d’organisation des élections dans notre pays s’impose comme une évidence après plusieurs constats.
Le Premier ministre a d’abord pointé du doigt l’échec de la pluralité des organes intervenant dans les élections. Ensuite, il a évoqué la nécessité de professionnaliser la gestion des élections, en dotant notre pays d’une structure efficace, efficiente et stable.
Dr Choguel Kokalla Maïga a également rappelé qu’il s’agit pour le gouvernement de Transition d’accéder par une volonté politique à une demande forte de l’ensemble des acteurs de la société civile et de la classe politique depuis bientôt 20 ans. Le but étant de minimiser les contestations post-électorales et réduire considérablement le coût des élections.
Concernant les Assises nationales de la Refondation, le chef du gouvernement a indiqué qu’elles ne seront pas des assises de plus car leurs résolutions seront exécutoires.
Aussi, a-t-il précisé qu’il s’agira de dégager des dynamiques consensuelles et convenir des fondements nouveaux sur lesquels il faut rebâtir l’État malien. Pour lui, le but est d’établir le consensus national sur les réformes globales, regroupant les Maliens de la base au niveau central en passant par nos compatriotes établis à l’extérieur.
L’ESPRIT DE L’ÉQUITÉ- S’agissant des fonds nécessaires à la mise en œuvre du PAG, Dr Choguel Kokalla Maïga a expliqué que le gros du financement proviendra des budgets nationaux 2021 et 2022. Et qu’une partie subsidiaire, entre 10 et 15%, est attendue des Partenaires techniques et financiers. Il a précisé que le financement des 2.050 milliards de Fcfa concerne les 9 mois de la Transition.
Sur la question de la légalité du CNT, le Premier ministre dira que ce dossier est dans les mains de la justice et qu’il va s’en tenir à la décision qui sera rendue par les juges. Sur la police territoriale, le chef du gouvernement rappellera qu’il y a eu, en 2018, des discussions au sein du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger qui ont évolué vers cette formulation. Aujourd’hui, le texte se trouve sur la table du CNT.
Sur la question de l’article 39 dont l’application est fortement réclamée par les syndicats des enseignants, le Premier ministre a juré qu’il n’est pas dans une logique de confrontation avec les grévistes. Il a assuré que tout sera fait pour que l’esprit de l’équité qui a présidé l’adoption du texte unifiant les grilles salariales des fonctionnaires, soit une réalité pour tout le monde.
Parlant du DDR, Dr Choguel Kokalla Maïga dira que plusieurs actions ont été réalisées comme la réintégration de 851 combattants ex-membres des forces armées et de sécurité et l’intégration dans les Forces armées maliennes de 1.764 ex-combattants. En ce qui concerne la réinsertion socio-économique, le Premier ministre a indiqué que 167 éléments des groupes d’auto défense des Régions de Mopti et Ségou sont concernés, ainsi que d’autres combattants des mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger.
En plus des effectifs actuels, le chef du gouvernement a annoncé le recrutement de 12.000 éléments qui renforceront le personnel militaire, afin de contribuer à la sécurisation et à la stabilisation du pays. Parlant des actions prioritaires de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, il a cité le processus de DDR, les réformes politiques et institutionnelles, la Constitution, l’opérationnalisation de l’Armée nationale reconstituée, le processus de financement des projets structurants de développement, l’accompagnement et le retour des déplacés et réfugiés, la valorisation du statut des autorités traditionnelles et des Cadis dans la distribution de la justice. Sur le même chapitre, le chef du gouvernement a préconisé une relecture consensuelle et une application intelligente de l’Accord pour la paix et la réconciliation.
En clôturant son propos, le chef du gouvernement a exhorté les membres du CNT à épauler efficacement l’exécutif dans sa tâche de redressement de notre pays. Il a estimé à ce propos que le gouvernement et le CNT sont tous les deux issus des forces du changement dont les aspirations profondes portent sur un Mali remis sur de bons rails à l’issue de la période de Transition.
Pour Choguel Kokalla Maïga, les circonstances exceptionnelles obligent les dirigeants actuels du pays à œuvrer pour mériter le grand espoir placé en eux par les citoyens maliens et les amis du Mali. Il a ajouté que les dirigeants de la Transition soient fiers, dans quelques années quand ils ne seront plus au pouvoir, d’avoir contribué à sortir le pays de la crise profonde qu’il traverse.
Dans son discours de clôture, le président du CNT, le colonel Malick Diaw, a félicité le Premier ministre pour la qualité du document soumis à l’examen de l’organe législatif et pour la clarté des réponses apportées aux questions. Il a rappelé que la situation exige de passer immédiatement aux actions car le temps n’est plus l’allié des dirigeants de la Transition. Le colonel Malick Diaw a prévenu que le CNT veillera scrupuleusement aux résultats obtenus et que son soutien ne fera pas défaut à l’exécutif.
Dieudonné DIAMA
Source : L’ESSOR