Embourbé depuis 2012 dans une profonde crise, après l’ignoble coup d’Etat perpétré par le capitaine Amadou Aya Sanogo et ses compagnons d’infortunes, le Mali peine toujours à retrouver la meilleure voie pour une thérapie de choc à son mal. Engagé dans une nouvelle transition après le parachèvement de la lutte héroïque d’une frange importante du peuple par la junte militaire dirigée par le Colonel Assimi Goita, le pays de Soundiata Keita semble fracassé par des querelles intestines. La classe politique censée indiquer le chemin d’une gouvernance vertueuse est fortement divisée, voir à couteaux tirés autour de la conduite à tenir pour une transition réussie. Deux camps s’affrontent avec en ligne de mire la prolongation ou pas de la durée de la transition. Les partisans de la prorogation, qui sont du reste ceux qui ont fait chuter le régime défunt, avancent comme arguments la nécessité de mener des réformes pour bâtir le Mali Koura. Les opposants, qui sont ceux du régime déchu, font de la fixation sur le délai imposé par la CEDEAO, à savoir les 18 mois, pas un mois de plus et se disent prêts à battre le pavé si le contraire se produisait. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir comment la classe politique peut être divisée au point de prendre en otage l’avenir du pays ? Mesure-t-elle les conséquences de ses querelles de clochers sur le Mali et même sur le processus démocratique qui est plus que jamais menacé sous nos tropiques ? Le hic est que ceux qui s’opposent à toute idée de réformes étaient les artisans du Dialogue National Inclusif, DNI, qui a balisé le terrain pour toutes ces réformes, qu’elles soient relatives à la révision Constitutionnelle, ou la mise en place d’un organe unique de gestion des élections. Tout est dans les recommandations du DNI. Quelle inconstance de la part de nos hommes politiques dont la position varie selon qu’on soit de la majorité ou de l’opposition. Ils sont tellement discrédités aux yeux de l’opinion au point que cette dernière appelle de tout son vœu aux militaires de rester au pouvoir faute d’hommes politiques crédibles dans le pays.
Le Mali est tombé tellement bas que même la société civile, qu’elle soit religieuse, syndicale, ou associative, qui aurait dû être la sentinelle, vigilante, prompte à agir, pour veiller sur la classe politique, s’est malheureusement fourvoie face au gain facile. Elle s’est même vendue aux plus offrants en fermant bouche, narine et oreille pour ne rien dire, ne rien sentir encore moins entendre des bévues de la classe politique. Corrompue jusqu’à la moelle des os, la société civile a accepté d’être autour du même plat que la classe politique, elle s’est, à la limite prostituée aux différents régimes pour jouir des délices du pouvoir, ce qui a fait d’elle un pantin au service du seul maître du jour. Le Mali est véritablement à la croisée des chemins sinon comment comprendre qu’un Etat dit démocratique où au nom de la séparation des pouvoirs chaque institution est censée jouer son rôle, puisse s’effondrer comme un château de carte construit sur une dune de sable. Tous les acquis du 26 mars sont en train d’aller à vau-l’eau. Tout est sens dessus- dessous, car ceux qui doivent diriger, orienter et surveiller se mettent ensemble dans un complot contre le peuple.
Youssouf Sissoko
Source: Inf@sept