Hier, jeudi 16 septembre 2021, le Conseil national de transition (CNT) a adopté deux projets de lois pour amnistier les putschistes. Il s’agit du projet de loi portant amnistie des faits en lien avec la démission du Président de la République, le 18 août 2020 et celui portant amnistie des faits survenus et ayant entrainé la démission du Président de la transition, chef de l’Etat et du Premier ministre, Chef du gouvernement, le 24 mai 2021. Les deux projets de lois qui étaient défendus par le ministre de la justice et des droits de l’homme, garde des sceaux, Mamoudou KASSOGUE ont été adoptés par les membres du Conseil national de transition à la majorité de 99 voix pour, 02 contre et 02 abstention.
Les travaux de cette séance plénière de la session extraordinaire du CNT étaient présidés par le 1er vice-président du CNT, Assarid Ag Imbarcaouane, en présence des autres membres du CNT, du ministre de la justice et des droits de l’homme, garde des sceaux, Mamoudou KASSOGUE et d’autres personnalités.
Selon le rapporteur de la commission des Lois Constitutionnelles, de la législation, de la justice, des droits de l’Homme et des institutions de la République, Me Boubacar N Diallo, le Projets de loi portant amnistie des faits en lien avec la démission du Président de la République, le 18 août 2020 comprend trois articles : l’article1 spécifie les infractions ; l’article 2 étend l’amnistie aux fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles ; l’article 3 énumère les bénéficiaires de l’amnistie.
Avant d’ajouter que les personnes écoutées ont salué l’initiative du Gouvernement de prendre ce projet de loi dans la mesure où son adoption aura vocation à contribuer à la réconciliation et apporter la paix au Mali.
A ses dires, des personnes ressources entendues ont estimé que le présent projet de loi est conforme à l’article 23 de la charte de la Transition issue des concertations entre toutes les fortes vives de la Nation qui stipule que « les membres du Comité national pour le Salut du Peuple (CNSP) et tous les acteurs ayant participé aux événements allant du 18 août 2020 à l’investiture dit Président de la Transition, bénéficient de l’immunité.
A ce titre, ils ne peuvent être poursuivis ou arrêtés pour des actes posés lors desdits évènements. Une loi d’amnistie sera adoptée à cet effet ». Aux dires du rapporteur de la commission saisie au fond, des personnes auditionnées ont exprimé des inquiétudes qui sont relatives à la non prise en compte dans le projet de loi de certaines infractions en lien avec les événements du 18 août 2020.
Ces préoccupations évoquées ci-dessus ont amené la Commission des Lois à proposer des amendements et à formuler des recommandations. « Dans le souci de contribuer à une meilleure mise en œuvre de la loi, la Commission des Lois Constitutionnelles, de la Législation, de la Justice, des Droits de l’Homme et des Institutions de la République recommande au Gouvernement d’informer et sensibiliser les populations sur l’importance de la loi d’amnistie ; de mettre en place une commission de suivi de la loi portant amnistie», révèle le rapport de la commission.
Avant l’adoption du projet de loi, un amendement a été apporté à son article 1er désormais intitulé : « Les infractions ci-après, ainsi que leurs tentatives, prévues et punies par les textes en vigueur, commises sur le territoire national du 18 août au 25 septembre 2020, en lien avec la démission du président de la République, sont amnistiées : insoumission, désertion, provocation à la désertion et réel déserteur, trahison et complot militaire, pillages, destruction, insubordination, rébellion, refus d’obéissance, voies de fait et outrage envers les supérieurs, violence et insulte à sentinelle, voies de fait et outrage à subordonné, abus du droit de réquisition, infraction aux consignes, homicide involontaire, coups mortels, outrage ou violence envers les dépositaires de l’autorité ou de la force publique, trouble grave à l’ordre public, refus d’un service légalement dû, atteinte à la sûreté intérieur de l’Etat, atteinte à la sûreté extérieur de l’Etat, opposition à l’autorité légitime, coup et blessures volontaires, blessures involontaires, violence et voies de fait, menace de mort, enlèvement de personne, arrestation illégale, séquestration de personne, extorsion et dépossession frauduleuse, embarras de la voie publique et atteinte à la liberté de travail ». Selon ses initiateurs, l’amendement a été fait pour prendre en compte des nouvelles infractions.
S’agissant du projet de loi portant amnistie des faits survenus et ayant entrainé la démission du Président de la transition, chef de l’Etat et du Premier ministre, Chef du gouvernement, le 24 mai 2021 et leurs suites jusqu’au 28 aout 2021, le rapport de la commission loi du CNT précise que ledit projet de loi initié par le ministre de la justice et des droits de l’homme, garde des sceaux, Mamoudou Kassogué, a été adopté en conseil des ministres, en sa séance du 14 juillet 2021. Le rapport indique que des dysfonctionnement grave ont été constatés dans la conduite de la transition entre le président de la transition, chef de l’Etat et le vice-président notamment : le non respect de la charte et de la feuille de route de la transition, le risque d’affrontement entre les composantes des forces de défense et de sécurité par la prise de décisions inappropriées et inopportunes ; la dégradation du climat social ayant eu pour conséquences la surenchère des conditions de vie des populations et le manque de confiance des partenaires sociaux aux autorités de la transition, engendrant des crises sociales de tous ordres. « L’épilogue fut la démission du Premier ministre et de son gouvernement, suivi de la reconduction du premier ministre et de la nomination des membres de son gouvernement. Cette situation intervenue à un moment inopportun violait les dispositions de la charte de la transition, aux prérogatives du vice-président chargé des questions de défense et de sécurité », révèle le rapport de la commission loi du CNT.
Les forces armées et de sécurité, ajoute le rapport du CNT, après avoir mesuré, l’ampleur de risque d’affrontement entre les composantes des forces de défense et de sécurité, le non-respect de la Charte et de la feuille de route de la transition, ont obtenu du Président de la Transition, chef de l’Etat sa démission le 24 mai 2021. Aux dires du rapporteur de la commission loi du CNT, le Président de la transition, Chef de l’Etat, avant sa démission, avait déjà reçu celle du Premier ministre et de son Gouvernement. « Pour combler le vide institutionnel, la Cour constitutionnelle a rendu l’Arrêt 2021-02CC/VACNCE du 28 mai 2021 ainsi conçu « Constate la vacance de la présidence de la Transition suite à la démission de Bah N’DAW, président de la transition, chef de l’Etat ; dit que le vice-président de la transition (Colonel Assimi GOITA) exerce les fonctions, attributs et prérogatives de président de la transition pour conduire le processus de la transition à son terme…La Cour Suprême du Mali a reçu la prestation de serment du nouveau Président de la Transition, Chef de l’Etat, le 07 juin 2071. Le présent projet de loi a été élaboré pour amnistier les faits en lien avec la démission du Président de la Transition, Chef de l’Etat, le 24 mai 2021. Ces faits sont entre autres : insoumission, insubordination, homicide involontaire, trouble grave a l’ordre public, atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat », a-t-il dit. Par ailleurs, il dira que le présent projet de loi comprend trois articles : l’article1 traite les infractions couvertes par l’amnistie ; l’article 2 traite de l’étendue de l’amnistie et l’article 3 traite les personnes bénéficiaires de l’amnistie.
Les deux projets de lois qui étaient défendus par le ministre de la justice et des droits de l’homme, garde des sceaux, Mamoudou KASSOGUE ont été adoptés par les membres du conseil national de transition à la majorité de 99 voix pour, 02 contre et 02 abstentions.
A rappeler que le 18 août 2020, l’intervention des militaires réunis au sein du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) avait poussée le président de la République d’alors, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) à rendre sa démission tout en dissolvant le gouvernement et l’Assemblée nationale du Mali. Peu après, des autorités de la transition furent mises en place. En outre, le 24 mai 2021, avec l’intervention des militaires, ces autorités, en l’occurrence le président de la Transition, Bah N’Daw et son Premier ministre, Moctar Ouane ont été conduit au Camp Soundiata de Kati puis rendirent leur démission. Alors pour éviter tout ennui judiciaire pour les auteurs de ces événements dans l’avenir, deux projets de lois d’amnisties ont été votés par le CNT (l’organe législatif au Mali durant cette transition) hier jeudi.
Aguibou Sogodogo
Le Républicain