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En Europe de l’Est, la percée meurtrière du Covid-19

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La pandémie de Covid-19 ne cesse d’empirer dans de nombreux pays d’Europe de l’Est. La situation est particulièrement inquiétante en Russie, en Ukraine et dans les Balkans. Avec en toile de fond, un refus des mesures de protections sanitaires comme la distanciation ou le confinement, et un échec des campagnes de vaccination.

Plus de 400 morts en Roumanie le 26 octobre, plus de 500 en Ukraine, plus de 100 en Bulgarie : le bilan quotidien du Covid-19 dans de nombreux pays d’Europe de l’Est ne cesse de s’aggraver. Rapporté à la population de ces pays, ce bilan désastreux fait actuellement de la région la plus touchée du monde. « La vague que subissent aujourd’hui plusieurs pays d’Europe de l’Est et les Balkans est l’une des plus importantes quand ce n’est pas la plus importante vague de la pandémie de Covid-19 depuis son origine, s’alarme Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale à l’Université de Genève. Comme en Europe de l’Ouest on a affaire à une augmentation de la transmissibilité du variant Delta et à une augmentation de la virulence. »

La différence avec les pays d’Europe occidentale, c’est que les taux de vaccination sont très faibles dans les Balkans comme en Ukraine ou en Russie : de 20% à 40% dans le meilleur des cas. Et ce, même dans des pays qui ont eu relativement tôt accès à des vaccins, comme la Serbie ou la Russie. La conséquence, c’est un nombre de cas graves et de décès bien plus élevé durant cette nouvelle vague que dans les pays où la couverture vaccinale est supérieure à 60% « Ce qui rend particulièrement préoccupante la situation dans les Balkans et en Europe centrale et de l’Est c’est le niveau de mortalité qui grimpe à des niveaux très alarmants, pointe Antoine Flahault. La couverture vaccinale est trop faible et l’on trouve beaucoup de personnes non vaccinées dans les hôpitaux. »

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Défiance des populations

L’échec des campagnes de vaccination est donc au cœur de cette flambée meurtrière de Covid-19. À l’origine de cet échec, il y a le manque de confiance des populations locales vis-à-vis de leurs dirigeants. « La défiance à l’égard du vaccin est à l’image de la défiance envers des élites politique qui sont perçues comme corrompues, peu fiables et peu efficaces, décrypte Nadège Ragaru, directrice de recherche à Sciences-Po et spécialiste de l’Europe du Sud-Est. Dans certains pays, comme la Bulgarie, les élites politiques ont elles-mêmes tenu des propos extrêmement ambivalents. Cette parole fluctuante n’a pas favorisé la mise en œuvre du vaccin. » En Bulgarie comme en Roumanie, la crise sanitaire se double d’une crise politique. Ni les dirigeants ni la classe politique n’osent prendre de mesures contraignantes de peur de se mettre à dos les électeurs. En Serbie, la mise en place d’un « pass sanitaire » a suscité un tel tollé que le gouvernement a finalement décidé de ne l’imposer qu’à partir de 22 heures.

« Fausses informations »

Dans cet échec de la vaccination, l’impact des réseaux sociaux a également été décisif : l’afflux massif de fausses informations sur le Covid-19 dans la région a eu comme conséquence une forme de déni sur les conséquences de la maladie, et comme corollaire un refus de la vaccination. « Depuis une quinzaine d’années, la parole politique publique n’est plus crédible, de très nombreux citoyens ont cherché ailleurs une parole qui serait plus vraie et ils l’ont souvent trouvée sur les réseaux sociaux, relève Nadège Ragaru. Cette habitude a débouché sur une très forte réceptivité aux « fake news » portant sur la dangerosité ou la réalité du Covid-19 d’abord, sur les masques ensuite, et enfin sur les vaccins. Cela a débouché sur une délégitimation des politiques de prévention et de lutte contre le Covid-19. »

La situation est d’autant plus préoccupante que le système de soins est loin d’être aussi solide dans ces pays que dans ceux d’Europe occidentale. Seul espoir : que la population, face à la flambée du nombre de cas et de décès, finisse par prendre le chemin des centres de vaccination. « Il faut toujours faire confiance au bon sens des gens, souligne Antoine Flahault, de l’Institut de santé globale à Genève. Les hommes sont habitués à lutter contre les grands fléaux et lorsqu’ils voient leurs proches menacés ils finissent par prendre les mesures qui sont préconisées par les scientifiques, même s’ils y sont réticents. » Une prophétie « optimiste » qui semble déjà se profiler en Ukraine où les autorités observent, depuis une semaine, et non sans soulagement, une montée en flèche du nombre de vaccinations.

RFI

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