Il avait promis de retourner dans sa mosquée au milieu de ses ouailles après le renversement du président IBK. Certains y avaient vu le signe d’une sagesse raffermie, mais c’était mal connaître l’homme. Quand on vit aux crochets de l’Etat sous tous les régimes, l’on ne saurait accepter se voir écarter du râtelier. Le naturel revient vite au galop…On l’appelle depuis un certain temps imam, c’est-à-dire celui qui dirige la prière musulmane en congrégation. Avec lui, le mot a pris un sens plus large, couvert d’une solennité exceptionnelle. Il est le leader charismatique qui, au nom de l’islam, donc au nom d’Allah par le truchement du saint Coran et du Prophète Mohamed, tient lieu de Guide éclairé pour émettre des directives aux croyants. C’est ce Mahmoud Dicko qui a organisé dimanche dernier, 28 novembre 2021, dit-on, une séance de lecture du saint Coran pour faire des bénédictions pour le salut du Mali en proie à de nombreuses turbulences. Mais personne ne s’y est mépris. Le bon curé au passé et au présent sinueux, n’a réussi qu’à attirer quelques poignées de ses ouailles, demeurées d’ailleurs médusées devant son discours qui partait dans tous les sens. Les Maliens, aux proclamations endiablées de l’homme et qui ne sont donc plus dupes de sa bonne foi, ont compris dans leur écrasante majorité qu’il s’agissait juste d’une rentrée politique qui ne disait pas son nom. Le virevoltant imam avait déjà donné le ton lors d’une de ses prêches du vendredi dans sa mosquée de Badalabougou en affirmant, en substance, que le pouvoir est aujourd’hui entre des mains peu sûres qui n’ont pas été à la hauteur des espérances nées de la chute du régime IBK. L’on ne saurait trouver mieux pour déclencher un casus belli. L’imam est donc ressorti de sa mosquée, avec bazookas et canons, et il était clair qu’il allait relancer les hostilités dont il a été sevré, cette fois-ci en ayant dans sa ligne de mire la transition, précisément le colonel Assimi Goïta, coupable de lèse-majesté pour n’avoir pas voulu le recevoir en ses rangs et qualité d’Envoyé de Dieu. Ceux qui chercheraient une base idéologique au réveil de l’hydre du Mali auront tout faux, comme toujours. L’imam Dicko a depuis longtemps étalé les raisons profondes de ses barouds successifs contre les régimes de l’ère démocratique. Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une affaire de prébendes. L’homme vit depuis des décennies aux crochets de l’Etat, en tout cas depuis son avènement à la tête du Haut Conseil Islamique où il avait poussé la suffisance et le calcul, jusqu’à restituer publiquement à un Premier ministre qu’il tenait en grippe la somme rondelette de cinquante millions de nos francs à lui octroyée pour la tenue d’un congrès, celui de son parti politique à naître de la CMAS. Mais il avait omis de dire que cette enveloppe qu’il ‘’ne pouvait accepter’’ venait après plusieurs autres, discrètement empochées et royalement dépensées. Au demeurant, il obtint la tête du Premier ministre en question, dont le limogeage, loin de sauver le prince, précipita au contraire sa chute. Dicko n’avait pas digéré d’avoir été écarté un tant soit peu du cercle fermé des décideurs justement par le fait du Premier ministre qu’il avait imposé à IBK.Nouveau visage du Coronavirus politique malien
L’homme ne peut pas supporter d’être sevré des prébendes et des rentes de l’Etat. Les autorités actuelles sont soumises à cette hargne pour les mêmes raisons. Elles n’ont pas fait acte d’allégeance et n’ont pas dénoué les cordons de la bourse nationale pour nourrir des gens qui n’apportent rien au Mali. Colonel Assimi Goïta et Dr. Choguel Kokalla Maïga ne sont ni IBK, ni Abdoulaye Idrissa Maïga, encore moins Soumeylou Boubèye Maïga et Boubou Cissé. L’on cherche désormais des alliés circonstanciels urbi et orbi pour leur mettre des bâtons dans les roues. Il leur reste à prouver qu’ils ne sont pas comme les autres et que le Mali est au-dessus des clans et des intérêts personnels et sordides. Force doit rester à la loi et à l’Etat. Aucune alliance d’avec des forces occultes au Mali et en dehors ne prospérera. Le temps des Tartuffe est révolu.
S’abriter derrière les écritures saintes pour parvenir à ses fins sordides est devenu pour Mahmoud Dicko une couverture extrêmement comme commode. Mais il a beau être rusé, le voile s’est progressivement levé sur lui. Sa prétendue lecture du saint Coran pour bénir le Mali, suivie d’une conférence de presse, une première en la matière, a été un meeting politique qui a lamentablement échoué. A part quelques figures d’hier de la CMAS quasiment esseulées dans la masse, on n’a pas vu de lieutenants aguerris aux côtés de celui qui cherche à nouveau à s’arroger le rôle de pourfendeur particulièrement écouté et adulé des masses. Mahmoud Dicko a perdu longtemps de sa superbe et il n’est malheureusement pas conscient qu’il ne peut plus incarner le magistère de la République en lieu et place des honnêtes gens. On n’a pas besoin de télescope pour remarquer que même les coreligionnaires de Mahmoud Dicko, prêcheurs et autres imams de la même chapelle que lui, n’ont pas cru devoir s’afficher avec lui le dimanche passé. D’ailleurs, répondant d’avance à ses péroraisons inévitables, Mahi Ouattara, imam de la mosquée Rahmane de Sébénikoro, sans le nommer, a décoché contre lui des philippiques assassines en dénonçant un profiteur machiavélique caché derrière le noble paravent de l’islam pour satisfaire à chaque soubresaut son appétit gargantuesque, non sans susciter dans sa lancée des instincts grégaires. Ce n’est pas là la seule défection. Les politiciens en mal d’arguments et de popularité qui cherchent, au nom d’une inclusivité de mauvaise saison, à participer à la gestion de la Transition, n’ont pas non plus jugé opportun de venir près du nouveau visage du Coronavirus politique malien, Mahmoud Dicko.
Haut lieu d’espionnage contre la patrie
Le beau-père d’Issa Kaou N’Djim en était réduit, tout compte fait, à pérorer. Il a passé plus de temps à se justifier, à lancer des diatribes et des anathèmes contre les dirigeants de la Transition, à relater ses rêves prémonitoires improbables, dans le but de se faire passer pour un saint homme que les enfants n’ont pas respecté et qui, pire, conditionnent avec espèces sonnantes et trébuchantes « ses petits-enfants à l’insulter sur les réseaux sociaux. » Toujours mentionnant Allah entre mensonges et faussetés, comme son élève IBK, il promet une dure chute aux tenants de la Transition. Bref, son discours, incohérent et divagateur, a ennuyé son auditoire qui, on s’en doute, ne reviendra pas répondre à son prochain appel s’il l’émettait. En réalité, cet imam Dicko paiera bientôt pour son imposture cycliquement renouvelée, il ne se taira pas parce qu’il ne le peut plus, jusqu’à sa déchéance inéluctable. Signe qui ne trompe pas, le Haut Conseil Islamique (HCI) est respectueusement passé le vendredi précédent le meeting coranique de Dicko chez le Président de la Transition, et le Chérif de Nioro s’est ouvertement démarqué de l’imam de Badalabougou. Des vocaux acerbes avaient en plus circulé sur lui parlant de sa collusion avec l’ambassadeur de la France. Toute l’énergie déployée aux fins de démenti par les quelques thuriféraires qui lui restent encore n’a réussi à convaincre personne. Les Maliens sont convaincus qu’il est depuis belle lurette un pion aux mains de puissances obscures et occultes et que la justice immanente ne tardera pas à jeter dans une malédiction handicapante. Son Centre, pour tout le monde, plutôt que d’être dédié à la paix dans les pays du Sahel, est une officine où se nouent beaucoup de contacts avec les Occidentaux et certains ressortissants de pays arabes (revoir l’article d’Amadou N’Fa Diallo publié le 18 février 2021 dans notre édition n° 425 à l’occasion de la publication du Manifeste de Mahmoud Dicko). En somme, un haut lieu d’espionnage contre la patrie.
Pour ses raisons, sa tentative de repositionnement est très mal appréciée par la majorité de nos concitoyens. A ce rythme, en attendant la justice immanente, il risquerait de faire, un de ces jours, les frais de la clameur publique. En tout cas, son masque n’est plus efficace pour continuer d’avancer incognito en bernant les Maliens…
Sy Eric
Source: Le National