Nouvelle escalade de la brouille entre Bamako et Paris : les autorités maliennes ont donc décidé hier d’expulser l’ambassadeur de France.« Après les attaques, la semaine dernière, au sujet du départ du contingent danois de la task force Takuba, la crise diplomatique entre Bamako et Paris a pris une nouvelle dimension », pointe Sahel Tribune à Bamako. « On se rappelle, précise le site, que le ministre Français des Affaires étrangères, Jean Yves Le Drian, avait critiqué la posture des autorités maliennes de la transition : ‘cette junte est illégitime et prend des mesures irresponsables’, avait-il déclaré. Son homologue malien avait répliqué en estimant inacceptable ‘ces insultes et ces propos empreints de mépris’. » Conséquence : l’expulsion, donc, de l’ambassadeur français. « Dans les relations diplomatiques entre le Mali et la France, nous entrons dans une zone de turbulence », commente Sahel Tribune.
« Le point de non-retour ? », s’interroge pour sa part le journal en ligne Malikilé. En tout cas, s’interroge-t-il encore, « par cette mesure, le belliqueux Le Drian comprendra-t-il l’invite du ministre Abdoulaye Diop à ne pas régler les affaires d’État par des invectives et des insultes sur les médias et à faire preuve de retenue et de respect envers ses partenaires ? Quelle riposte envisagera la France dans un proche avenir ? Choisira-t-elle la voie de l’escalade ou de la désescalade dès lors que le Mali n’a pas fermé les portes du dialogue ? »
La Russie plus efficace que la France sur le terrain militaire ?
Pour certains médias maliens, la page est d’ores et déjà tournée avec la France… Et avec les Russes, tout va mieux dans la lutte anti-terroriste. Comme l’affirme L’Aube : « depuis la récente signature historique des accords de coopération et de défense nouvelle génération entre le Mali et la Russie, des progrès substantiels sont constatables sur le terrain, pointe le quotidien malien. L’armée malienne dispose de renseignements en temps réel sur tous les mouvements de troupes sur son territoire, avec une précision d’images au millimètre près, grâce aux satellites militaires russes, qui lui sont ouverts 24h/24 sur toute la zone sahélienne. (Ce qui n’était pas le cas avec les Français, note le journal) Conséquence ? Une série sans précédent de victoires militaires sur l’ensemble des groupes terroristes sur le terrain. »
Des victoires annoncées par l’armée malienne, dont les communiqués sont repris, notamment par le quotidien Le 22 Septembre . L’armée malienne qui aurait donc détruit récemment des bases terroristes dans les régions de Nara, Sikasso, Bougouni, Koutiala, Ségou et Mopti.
De bras en bras…
Dans la presse de la sous-région, on s’interroge sur ce bras-de-fer et sur les velléités nationalistes de Bamako. À l’instar de Ledjely en Guinée : « nous ne voulons plus être sous les ordres de la France ? Quelle noble idée ! Mais il ne suffit pas de le clamer. Pourquoi ne pas traduire cette grande résolution dans notre remise en question ? Pourquoi ne pas la traduire dans la qualification de la formation dans nos écoles ? Pourquoi ne pas la traduire dans l’amélioration des soins dans nos structures sanitaires ? Pourquoi ne pas la traduire dans le raffermissement des liens entre nos États africains ? Enfin, pendant qu’on y est, poursuit Ledjely, retenons qu’une Afrique qui se libère de la France pour se jeter à corps perdu dans les bras de la Russie n’est pas une Afrique libre. Qu’elles s’appellent France, Chine, Russie, Turquie, Inde, Belgique, États-Unis, ces puissances étrangères obéissent à une seule et même logique : l’intérêt. C’est malheureusement ce qu’en Afrique nous n’arrivons pas comprendre. Et c’est bien dommage, soupire le site guinéen. Car nous sommes désormais assez grands pour ne pas continuer à jouer aux adolescents impubères. »
Quelles suites à cette « tambouille » ?
En tout cas, pour ce qui concerne le Mali, voilà où on en est, résume le quotidien Aujourd’hui à Ouagadougou : « la Transition clame partout que le Mali peut et va peut-être se passer de l’ex-Métropole et compter sur Wagner et l’armée russe pour bouter les terroristes hors du pays. La France critique, menace, mais dit continuer le dialogue. »
Et Aujourd’hui de s’interroger : « quelle suite donner à cette tambouille qui est loin d’être une tempête dans un verre d’eau ? Qui pour recoller les morceaux ? La Transition reviendra-t-elle à de meilleurs sentiments ? La France continuera-t-elle à recevoir toutes ces avanies tout en restant impassible ? »
Source: RFI