Alors qu’on pensait avoir trouvé une solution à l’amiable, suite à la libération de 3 des 49 militaires ivoiriens inculpés au Mali depuis le 10 juillet, aucune issue ne s’annonce dans le contentieux en dépit d’un recours à la Cedeao, dont la partition est attendue cette semaine, dans l’antre de l’ONU. Cet épisode intervient notamment dans le sillage d’autres médiations en cours dont celles du président togolais Faure Gnassingbé et de leaders religieux maliens.
Et, quoique les plus hautes autorités n’affichent aucune opposition de principe à la libération des militaires ivoiriens, elles la conditionnent à une contrepartie de leur pays d’origine, à savoir : l’extradition de personnalités maliennes vivant à Abidjan et qui font l’objet de mandat d’arrêt international. Abidjan, qui ne serait pas prêt à répondre favorablement à cette offre, assimile désormais la détention de ses militaires à une «prise d’otage» et de «chantage inacceptable». De guerre lasse, les autorités ivoiriennes s’en remettront finalement à une implication de la CEDEAO et la tenue sans délai d’un sommet extraordinaire de cette organisation sous-régionale à New York, dans la foulée de l’Assemblée générale des Nations Unies. En attendant l’issue de cette implication, cette semaine, les deux parties continuent de se lancer des piques par communiqués interposés. En effet, alors que le Premier ministre par intérim, le colonel Abdoulaye Maïga, a estimé que cette affaire était “purement judiciaire et bilatérale” et subodore une instrumentalisation de la Cédéao par les autorités ivoiriennes, la Côte d’Ivoire accuse le Mali de “manipulation de la vérité” et de chercher “un bouc émissaire” dans l’affaire. Bamako accusé également le gouvernement ivoirien d’être animé par une « volonté d’adversité » et « d’avoir transformé un dossier judiciaire en une crise diplomatique».
Quoi qu’il en soit, la justice malienne, après avoir pris un premier coup de la mise en liberté de 3 des 49 militaires ivoiriens par une procédure galvaudée à tous points de vue, vient d’en prendre un deuxième avec une incursion malencontreuse du président du Conseil supérieur de la magistrature qui n’est visiblement pas dans son rôle en réclamant ouvertement une contrepartie à leur libération comme s’ils étaient condamnés par avance. Or il est de notoriété publique qu’une procédure judiciaire digne de ce nom peut basculer dans un sens comme dans l’autre pour les justiciables, qui sont censés conserver par-dessus tout une chance de disculpation qui rendrait sans objet le marchandage autour des militaires ivoiriens détenus. A moins d’admettre que l’Exécutif tire les ficelles de l’affaire aux détriment de toute dignité de la justice.
Et dire par ailleurs que cette incursion malencontreuse n’a inspiré aucune réaction aux duo syndical des magistrats qu’on a vu faire feu de tout bois avec la simple visite d’un ministre d’IBK à un religieux convoqué par les tribunaux.
Amidou Keita
Le Témoin