Les 62 bougies de l’accession du Mali à l’indépendance ne sont pas passés inaperçus. Alors que la menace djihadiste est au plus vif, les autorités de la Transition ont choisi d’entretenir le plus long possible le flambeau commémoratif en n’épargnant aucune largesse pour rendre l’atmosphère festive suffisamment pompeuse. Par-delà la traditionnelle Journée du 22 Septembre, la commémoration s’est même exceptionnellement étendue au jour suivant – communément appelé pont -, avec le dessein évident de magnifier et mettre en relief la fierté nationale. Pour ce faire, de nombreuses localités de l’intérieur ont dû accompagner la cadence en rivalisant d’ardeur à la jovialité et à l’animation festive. C’est du moins l’ambiance rapportée par les médias publics ayant pris soin de promener le projecteur à travers le pays, tout le long du week-end.
Sauf que la communion ne paraît pas assez répandue et aussi partagée pour faire ombrage à d’autres préoccupations et motifs d’inquiétudes beaucoup plus réelles. En clair, le 62 eme anniversaire de l’indépendance du Mali, qu’on a visiblement voulu fêter quoi qu’il en coûte, intervient dans un contexte qui commande davantage de sacrifice que de réjouissance en rappelant du même coup que la lutte pour la souveraineté reste inachevée et n’est pas accomplie au point de justifier une jubilation. En effet, la communion aura laissé en rade des milliers de concitoyens persécutés et vassalisés dans les contrées de plus en plus nombreuses où la loi des forces obscurantistes se construit sur les ruines de ´a souveraineté nationale. Et ceux qui ne supportent plus la lourdeur de leur tribut n’ont d’autre choix que de se rabattre sur les grandes agglomérations où les symboles de l’Etat résistent encore aux vagues terroristes. C’est le cas de Gao qui accueillait, dans la foulée de la commémoration de l’indépendance nationale, des milliers de civils chassés par les djihadistes a Talataye ou incités au sauve-qui-peut par le défaitisme du général et non moins chef de milice d’autodéfense, Elhaj Gamou. Et pour cause, aucune résistance digne d’une affirmation de souveraineté n’a pu suppléer au retrait des forces françaises.
Idem à Menaka où les observateurs sont unanimes à admettre un maille territorial périlleuse et annonciateur d’un assaut définitif de la ville. Le spectacle n’est pas plus enviable dans la région de Tombouctou également contrôlée majoritaire par la percée djihadiste, tandis que celle de Kidal connaît un statut mitigé depuis une décennie, consécutivement au renversement du pouvoir central par une première junte putschiste.
Il est loisible de comprendre, somme toute, que la persistance des défis de recouvrement de l’intégrité territoriale contraste manifestement avec les affirmations pompeuses de souveraineté que contrarient du reste un défaut évident d’inclusivité du sentiment national.
En définitive, plutôt que de distraire pour les animations festives, il serait peut-être préférable de sonner le clairon pour une grande mobilisation nationale de recouvrement du territoire sur lequel s’exerce cette souveraineté nationale.
A KEÏTA
Le Témoin