Des tensions diplomatiques aux conséquences humanitaires. Récemment, les autorités françaises ont suspendu l’aide publique au développement en faveur du Mali. Une décision consécutive aux tensions diplomatiques qui sévissent entre les deux pays. Comme la réponse du berger à la bergère, la décision des autorités de la Transition ne s’est pas fait attendre : suspension des interventions des ONG bénéficiant du financement du gouvernement français sur le territoire national. Au-delà de cette riposte, quelle réponse face aux éventuelles conséquences ?
Suivant un communiqué en date du 21 novembre 2022, l’Etat malien a demandé la suspension de l’intervention des ONG financées par la France, qui avait interrompu récemment, le financement de son aide publique à destination du Mali. Paris avait indiqué, pour soutenir sa position, des griefs tels que le recours au groupe paramilitaire russe Wagner, dont la présence est toutefois contestée au Mali.
Telle la réponse du berger à la bergère, les autorités maliennes ont à leur tour, décidé de suspendre l’intervention des ONG bénéficiant du financement du gouvernement français au Mali. La décision est sans appel et en rajoute aux tensions qui existent entre la France et le Mali. Dans cette stratégie du « coup pour coup » entre Paris et Bamako, les populations innocentes pourraient payer le lourd tribut, selon certains acteurs humanitaires.
Si gouverner c’est prévoir, il reste à savoir si la réponse de Bamako sera suivie de mesures compensatoires. Le gouvernement de la Transition a annoncé la mise en place d’un comité interministériel pour évaluer l’impact de sa décision sur les populations bénéficiaires afin de proposer des solutions alternatives. Car, le bien-être des Maliens est en premier lieu, la mission des autorités.
S’il est vrai que le Mali attend toujours la lumière du développement venant de plusieurs ONG présentes sur son territoire, force est de constater toutefois que la décision des deux parties aura des conséquences. Selon l’ONU, 7,5 millions de Maliens sur une population de quelque 20 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence, notamment de médicaments et de nourriture, fournie par les ONG internationales.
Vue sous l’angle de la souveraineté, la suspension des ONG étrangères traduit le désir de libération de notre pays de l’influence néocolonialiste. Cela sous-entend que le Mali veut et peut compter sur lui-même et que le Mali entend se tenir debout par ses forces. Ce qui donne de l’espoir dans la mesure où cela nous conduit vers un développement « Made in Mali », sans un concours ou un soutien extérieur, encore moins celui de la France.
Cependant, la décision souverainiste de suspension risque d’avoir des conséquences inattendues, si aucune mesure drastique et holistique n’est rapidement prise. Il faut signaler que nombreuses sont les populations maliennes qui sont déplacées sur l’étendue du territoire à cause de l’insécurité, surtout dans les zones où l’Etat est absent. Cette absence est souvent comblée par les ONG internationales présentes au Mali qui assurent la continuité en assistant les populations.
La France évalue, quant à elle, à 100 millions d’euros, le poids de l’aide au développement en faveur du Mali chaque année, depuis 2013. Mais d’hier à aujourd’hui, il y a réellement lieu de s’interroger sur l’impact réel de cette manne sur le développement du pays en général et la résilience des populations en particulier. En tout état de cause, il faut reconnaitre que le vrai développement d’un pays advient à la suite des engagements et actions politiques endogènes, à fort impact sur le développement.
Ousmane Tangara
Le Challenger