Ce n’est pas en trois mois (janvier-mars 2023) avec un personnel et du matériels insuffisants que l’opération de mise à jour des donnés NINA des populations maliennes pourrait être une réussite. Le Ministre de la Sécurité Intérieur, le général Daoud Aly Mohammedine doit revoir sa copie.
Par décret n°2022-0639/PT-RM du 3 novembre 2022, le Président de la Transition, colonel Assimi Goita, a signé le décret portant sur l’institution et la règlementation de la carte nationale d’identité biométrique sécurisée.Une disposition du décret souligne que le système de gestion et de production de ladite carte est placé sous la responsabilité du ministre chargé de la Sécurité. La carte est établie ou renouvelée sur le territoire national par les Commissariats de police, les brigades de gendarmerie et les Sous-préfecture.
Comme pour lier l’acte à la parole, trois mois après, c’est-à-dire en début janvier 2023, le ministère de la Sécurité et de la Protection civile annonçait, la mise à disposition d’un site pour vérifier et mettre à jour les données de la carte NINA (numéro d’identification nationale).
Il avait été dit que sur la page d’accueil du site, « les utilisateurs ont la possibilité d’authentifier et de vérifier leurs données biométriques. Ce qui permettra d’avoir des bonnes données personnelles inscrites sur la future carte nationale d’identité biométrique sécurisée ».
Aussitôt lancé, nombreux sont nos compatriotes à se rendre dans les centres indiqués dans le décret. Qu’elle a été leur surprise de voir que plusieurs commissariats n’avaient pas été dotés de matériels d’enrôlement. Cela ne leur à point décourager. Des jours après, avec l’acquisition des premiers matériels, voilà que les commissariats de police sont pris d’assaut. Comme pour la carte nationale d’identité, les gens se bousculent aux portes des commissariats très tôt le matin, à 5 heures, histoire de s’inscrire sur la liste de présence.
Forte affluence
Ce jour 15 février 2023, il est 5 heures, la devanture du commissariat de police de Torokorokorobougou (ex 4e Arrondissement), connait une grande affluence. Plus de place pour les retardataires. La longue liste comporte plus d’une centaine d’inscrits.
Il est 6h45. « Est-ce la liste de ceux qui sont venus pour la mise à jour de leurs données ? », demande M.G ? Oui ! répond B.K. Il est à la 120e place sur la liste.Quand vint l’heure du travail, c’est-à-dire à 7h30, le commissariat s’ouvre au grand public. En lieu et place des inscrits pour la carte biométrique, un agent de police fait appel aux demandeurs de cartes nationale d’identité de se présenter avec les documents. Ils sont les premiers à entrer dans le commissariat.
A 9h30, la section de la carte biométrique sécurisée commence le travail. Les vieilles personnes sont les premières à entrer. Pendant ce temps, plus de 200 personnes en majorité des jeunes assis sous des arbres, échangent et critiquent la façon dont procède le commissariat dans l’opération.
De leurs échangent, on retient grosso modo que les problèmes sont entre autres : l’insuffisance d’agents chargés de la collecte des données, la faible quantité de d’appareils pouvant prendre les empreints et autres.
« Nous sommes plus de 200 à nous inscrire. Ce n’est pas deux agents avec deux machines qui peuvent faire ce travail surtout que l’identification d’une seule personne peut prendre plusieurs dizaines de minutes », a déploré Famoussa Keita. Une autre difficulté : « c’est quand l’agent en plein travail dit que son appareil est déchargé ». De deux agents, les demandeurs se retrouvent avec un seul pour ce commissariat. Chose incompréhensible pour Djenebou Souckou.
Autre difficulté. Contrairement à ce qui avait été annoncé dans le décret, l’opération de mise à jour des donnés Nina n’a toujours pas débuté dans les Sous-préfecture. Pourquoi ? Pour l’heure, le ministère de la Sécurité n’a jusque-là pas donné d’explication. « Au tout début de l’opération, les gens venaient en nombre. Puisque nous leur avons dit que nous n’avons pas été saisis pour faire ce travail, ils ne viennent plus », a affirmé un personnel d’une sous-préfecture joint au téléphone.
Troisième grande difficulté. Si au début de l’opération, il était possible de vérifier et de mettre à jour ses données, depuis un certain temps, le site semble rencontrer des difficultés. « Via mon téléphone, je n’arrive pas à accéder au site. Après plusieurs tentatives, je suis obligé d’aller dans un Commissariat de police. Pourtant Si le site est fonctionnel, les attroupements devant les Commissariats et autres brigades de gendarmerie allaient diminuer », a affirmé Mamadou Doumbia, conseiller municipal.
Dans l’enceinte du Commissariat, nous avons pu avoir les impressions de deux agents chargés de la collecte des données, qui ont accepté de se prêter à nos questions sous anonymat. Selon eux, cela fait des jours que l’affluence est au rendez-vous mais, qu’ils font de leur mieux pour satisfaire les demandeurs. « Nous collectons les données lundi, mercredi, jeudi en raison de 30 à 35 voire 40 personnes par jour », a laissé entendre un d’eux. A la question de savoir s’ils ne peuvent pas enregistrer plus, ils avancent que le travail est délicat à remplir « Il faut beaucoup d’attention pour le faire. Pour éviter de commettre des erreurs, nous sommes obligés de prendre un nombre assez limité ».
Déphasage avec les réalités
C’est dans ce cafouillage qu’un communiqué du ministre de la Sécurité Intérieur, le général de brigade, Daoud Aly Mohammedine, en date du 14 février 2023, dit constater « une faible mobilisation des populations pour la mise à jour des donnés NINA ».
Pour beaucoup de demandeurs de cartes, le communiqué n’a sincèrement pas sa place. Ils estiment que le ministre est en total déphasage avec les réalités du terrain. « Les Commissariats sont bondés de monde jusqu’à ce qu’ils n’arrivent pas à satisfaire les gens. Pendant ce temps, le ministre nous parle de ‘’faible mobilisation’’ et de fixer l’opération dans le temps (31 mars 2023) ».
« Comment avec autant de problèmes rencontrés et le court délai, il est possible de mettre à jour les données de la carte Nina de millions de Maliens ? Cela est possible sauf si le ministre veut bâcler le travail et nous faire sortir des cartes comportant encore des erreurs », a dénoncé cet enseignant qui est à la 4e fois de se rendre au Commissariat de police, mais sans succès.
Il faut dire que si le général de brigade, Daoud a réussi avec la phase de publicité de l’opération, celle du travail proprement dit est la plaie. Et, si rien n’est fait à ce niveau, il est à craindre que l’opération ne soit un échec. Pour que cela ne soit pas, le ministre général doit revoir sa copie en pensant à d’autres scenarios. Il s’agit pour lui, d’augmenter le nombre des agents et de leurs matériels ; de penser à un système d’équipes mobiles qui vont sillonner les quartiers, villages, entreprises et administrations comme ce fut le cas pour l’enrôlement des cartes Nina.
Djibril Diallo
Source: Arc en Ciel