Les premiers responsables des principales centrales syndicales des travailleurs du Mali, à savoir Yacouba Katilé de l’Union Nationale des Travailleurs du Mali, UNTM, Hammadoun Amion Guindo de la Confédération Syndicale des Travailleurs du Mali, CSTM et Dédéou Ousmane de la Centrale Démocratique des Travailleurs du Mali, CDTM, semblent abandonnés en plein vol les travailleurs en allant s’acoquiner à la junte. Ils sont devenus les principaux soutiens de la transition au grand dam des intérêts des travailleurs du Mali qui broient aujourd’hui du noir. Le premier est le Président du Conseil Economique Social et Culturel, le second est membre du Conseil National de Transition et la troisième est ministre de l’Education Nationale. Tous ces premiers responsables ont foulé aux pieds les intérêts des travailleurs maliens pour devenir des fervents soutiens de la transition. Katilé, Amion et Dédéou peuvent-ils être juges et partie ? N’ont-ils pas préféré leurs intérêts à ceux des travailleurs ? Qu’attendent les structures membres de leurs centrales pour réaliser l’alternance ?
C’est au moment où les travailleurs maliens traversent l’une des crises les plus gravissimes, caractérisée par la vie chère, par des conditions précaires de travail et par des grèves dans plusieurs secteurs de l’administration, que les trois premiers responsables des plus grandes centrales syndicales optent pour un soutien sans faille aux autorités, au détriment des travailleurs. Ils sont tous restés muets comme des carpes quand les prix des denrées de première nécessité ont pris de l’ascenseur, alors que les salaires stagnent sans bouger. Ils sont indifférents aux multiples grèves comme celles de deux principaux hôpitaux de Bamako, à savoir l’hôpital du Point G et celui de Gabriel Touré. Ils demeurent insensibles à l’arrêt de travail des promoteurs d’écoles privées qui ne réclament que leurs dus. Katilé, Amion et Dédéou n’en ont cure des délestages intempestifs de courant et de coupures incessantes d’eau. L’histoire retiendra que c’est au moment où les travailleurs ont besoin de plus de protection, de plus de soutien que les premiers responsables des trois principales centrales syndicales les abandonnent en plein vol, voire les sacrifient sur l’autel de leurs intérêts égoïstes. Les travailleurs du Mali sont orphelins et sont sans défense face à la toute-puissance de l’Etat, qui les maltraite avec la complicité des premiers responsables des trois centrales syndicales.
Katilé, Amion et Dédéou peuvent-ils être juges et partie en même temps ?
La réponse est négative, car les places qui sont les leurs, ne peuvent nullement leur permettre de défendre les travailleurs. Katilé président du Conseil Economique, social et culturel, bien que l’UNTM est membre de droit de cette structure, ne demeure pas moins un aveugle soutien de la transition, au point de se fendre d’un communiqué de soutien au controversé projet de la nouvelle constitution après la remise du rapport de la commission de finalisation au Président de la transition. Il est allé jusqu’à engager les travailleurs sans demander leur avis. Cette allégeance sordide s’expliquerait par des ambitions que le secrétaire général de l’UNTM nourrit dans un futur proche. Quant à Hammadoun Amion Guindo de la CSTM, il aurait dû se faire remarquer au CNT en interpellant des ministres sur des sujets d’intérêt national et de préoccupations majeures, mais au lieu de cela il a préféré se taire et jouir des avantages et privilèges liés à son poste. Les travailleurs des différentes fédérations qui composent sa centrale syndicales sont des laissés pour compte, comme la SECMIMA dont les travailleurs sont abusivement licenciés ou ils sont en insécurité sociale et physique. S’agissant de Dédéou Ousmane de la CDTM, bien que sa centrale est la plus petite en termes de nombre de comités qui la composent, mais elle n’aurait pas dû être là où elle se trouve, à savoir membre du gouvernement, auquel d’ailleurs les revendications des travailleurs sont adressées. Son choix de rentrer dans le gouvernement pourrait être interprété comme un abandon de ses camarades en plein combat. Donc on ne peut pas être juge et partie en même temps.
Qu’attendent les structures membres de leurs centrales pour réaliser l’alternance ?Si le syndicalisme, c’est le droit à la consultation, celui de participer à la conception, à l’exécution des grandes politiques économiques, sociales, à la construction de la paix, de la sécurité, et de la bonne gouvernance, Katilé, Amion et Dédéou ne sont plus dans des bonnes prédispositions morales pour jouer ces différents rôles, car ils ont déjà pris fait et cause pour les gouvernants, ceux auxquels ils auraient dû soumettre leurs doléances. Alors il revient aux travailleurs de différentes centrales de prendre leur responsabilité en réalisant l’alternance à leur tête pour le bonheur des travailleurs maliens. Surtout qu’ils ont tous fait plus de dix ans à la tête de leurs centrales. Il est tant qu’une nouvelle génération émerge et donne au syndicalisme toute son aura. Pour rappel l’UNTM, cette centrale historique a joué un rôle de premier plan dans le combat pour l’avènement de la démocratie.
En somme, rien que pour la vie chère, la lutte contre la corruption et la délinquance financière, la crise financière sans précédent avec ses conséquences de chômage, les trois centrales syndicales auraient dû réagir pour qu’il y ait des mesures d’accompagnement. Mais leurs premiers responsables ont préféré jouir des privilèges et abandonner des milliers de travailleurs à leur triste sort.
Youssouf Sissoko
Source: L’Alternance