Le 14 août 2023, 63 migrants (62 Sénégalais et 1 Bissau-guinéen) ont péri dans le naufrage de leur bateau au large du Cap-Vert. Partis du village de Fass Foye, situé à une soixantaine de kilomètres au nord de Dakar, le 10 juillet 2023, les 101 passagers voulaient rejoindre les îles Canaries. Parmi les 38 personnes rescapées, figurent 4 enfants de 12 à 16 ans.
Un énième drame qui a suscité indignation et désespoir. Dans un message sur les réseaux sociaux, l’ancien Maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, se dit «ému par la disparition, au large du Cap-Vert, de migrants en provenance du Sénégal, à destination de l’Europe, à la quête d’un avenir meilleur. La recrudescence de l’émigration clandestine par voie maritime interpelle notre responsabilité de manière générale, celle de l’Etat en particulier. Chère jeunesse, naître, grandir et réussir, chez soi est possible !»
D’un drame à un autre. C’est l’Odyssée sans fin pour les migrants subsahariens refoulés dans le Sahara par la Tunisie, la Libye et l’Algérie. Incalculable le nombre de ceux qui ne survivent pas à leurs conditions infrahumaines. Les récentes révélations sur les traitements cruels infligés par les gardes saoudiens aux migrants éthiopiens font froid au dos. Human Rigths Watch dénonce le massacre de centaines de migrants venus d’Éthiopie qui tentaient de pénétrer en Arabie saoudite à partir du Yémen. Entre les mois de mars 2022 et juin 2023, «les gardes-frontières saoudiens ont tué au minimum plusieurs centaines de ces migrants et de demandeurs d’asile éthiopiens dans des fusillades supposées les décourager et les empêcher de franchir cette frontière», rapporte l’Ong. Les autorités éthiopiennes ont annoncé l’ouverture d’une enquête avec leurs homologues d’Arabie saoudite pour faire la lumière sur ces allégations. Ces drames se passent, ne font ni froid ni chaud aux dirigeants africains. Les migrants sont le dernier des soucis des gouvernements, organisations sous-régionales voire de l’Union africaine. Alors que la question migratoire est depuis quelques années un fonds de commerce pour des pays arabes contre leurs partenaires d’Europe où les ultranationalistes – à deux doigts des affaires – s’en servent à des fins électoralistes. Les migrants sont présentés comme des criminels, des envahisseurs ou des destructeurs de blancs. Ils n’ont cure de la contribution non négligeable des migrants dans leur économie.Naître, grandir et réussir chez soi, est possible» a écrit Khalifa Ababacar Sall. Il a raison. Il est bel et bien possible de réussir sur place. Ces jeunes qui fuient la misère et le désespoir ne sont nullement responsables de cette tragédie. Ne blâmons pas non plus les dirigeants européens.
N’en voulons pas non plus aux populations européennes pour leurs choix. C’est aux dirigeants africains de créer les conditions nécessaires permettant aux jeunes de rester sur place où les opportunités de réussite existent. Il suffit de créer les conditions pour les exploiter. Mais quoi espérer de personnes dont la seule vision est manifestement de parvenir au pouvoir ?
Par Chiaka Doumbia
Source: Le Challenger