Dans le village de Dusuman, au nord-est du Nigeria, Moussa a été arraché à son sommeil par une rafale sèche d’armes automatiques en cette nuit de janvier : des jihadistes de Boko Haram étaient venus s’emparer de son bétail, source importante de leur financement.
“Ils sont arrivés autour d’une heure du matin et ont commencé à tirer des coups de feu en l’air”, explique le berger peul dont l’AFP a changé le prénom pour raison de sécurité.
“Ma famille et moi avons fui dans la brousse. Les jihadistes ont emporté mes 36 vaches et 40 moutons”, déplore-t-il.
Le bétail volé est ensuite écoulé grâce à des filières bien établies, impliquant notamment des espions, des intermédiaires, des transporteurs, des commerçants, des bouchers ou des administrateurs locaux “corrompus”, selon Mme Berger.
“A travers ces +partenaires commerciaux+ les jihadistes ont accès au renseignement et peuvent se ravitailler dans les forêts”, explique William Assanvo, chercheur à l’Institut d’études et de sécurité (ISS).
Si une partie du bétail volé est vendue sur des marchés locaux, le reste est exporté à l’étranger.
Les animaux volés au Mali sont par exemple “blanchis”, mêlés au bétail légal puis expédiés vers des pays de la sous-région, comme la Côte d’Ivoire, le Burkina ou le Niger détaille Mme Berger.
“La collaboration tarde”
C’est pourquoi au-delà des jihadistes, “il est nécessaire de cibler” aussi les réseaux auxiliaires, dit Kingsley Madueke.
La nature transfrontalière du trafic impose également une coopération sous-régionale qui n’est pas toujours aisée compte tenu de la situation géopolitique en Afrique de l’Ouest. Le Mali, le Niger et le Burkina Faso se sont retirés de la Cédéao pour former l’AES.
“Nous avons adressé au moins trois correspondances aux autorités maliennes en 2024. Car nous avons enregistré sur le marché ivoirien une augmentation de l’afflux du bétail en provenance du Mali”, explique à l’AFP une source sécuritaire ivoirienne.
“Nous avons besoin d’une collaboration pour assécher le réseau. Pour le moment, cela tarde”, ajoute-t-elle.
Selon les chercheurs, les armées sahéliennes, les bandits, les milices d’autodéfense et les groupes rebelles (au Mali) volent aussi du bétail.
AFP
Source : Mali Tribune