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Scrutin du 29 mars 2020 : Les législatives de la dissémination du Coronavirus

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Dr-Brahima-Fomba

Ainsi donc, en dépit du bon sens, de l’esprit de responsabilité, de la conscience politique et de l’humanisme tout court, le gouvernement malien s’est arc-bouté sur son scrutin législatif macabre qui vient de se tenir hier 29 mars 2020, avec sans aucun doute, de nombreux électeurs qui s’en sortent contaminés par le coronavirus. Les résultats de ce scrutin morbide sont d’ores et déjà connus, puisque les électeurs n’auront voté que pour un seul et unique candidat proposé et parrainé par IBK, son gouvernement : le coronavirus ! Pour oser exposer ainsi, sans aucun scrupule, sa propre population au danger mortel de cette pandémie de coronavirus au motif fallacieux de la tenue d’une stupide élection qui ne répond même pas aux standards démocratiques, il faudrait à un régime politique d’être irresponsable, énivré par son pouvoir d’Etat et d’agir en bande organisée avec de pseudos politiciens pour la plupart mercantiles et avides d’avantages matériels qu’ils attendent du mandat de député ne serait-ce que pour amortir l’argent de la corruption électorale qui, dans notre pays, a substitué le bétail électoral au collège électoral.

 

Le régime du Président IBK se reconnaitrait-il dans ces gros traits qui autorisent à organiser des élections dans le contexte morbide de coronavirus qui prévaut ? L’histoire nous le dira. Toujours est-il que dans son discours du 25 mars 2020 qui a confirmé les législatives d’hier, IBK s’est camouflé sous le manteau du DNI dont il prétend que la décision de tenue du scrutin législatif d’hier émane. En vérité, le manteau du DNI n’est qu’un habillage grotesque ne pouvant aucunement tromper les Maliens qui ne sont pas dupes, contrairement à ce que leur Président pense d’eux. En aucun cas, faute d’assise juridique dans un Etat en vie constitutionnelle « normale », le DNI ne peut constituer une camisole de force ni pour IBK lui-même et son gouvernement, ni pour le peuple malien. Sinon pourquoi alors le Premier ministre Boubou nous avait-il dit qu’il attendait les recommandations du DNI pour présenter sa Déclaration de politique générale qu’on continue d’ailleurs d’attendre toujours dans le mépris absolu de la Constitution ? N’est-ce pas d’ailleurs la raison pour laquelle le régime s’est assis sur les autres actions à court terme définies par le DNI comme des « actions immédiates » et qui portent sur d’autres thématiques ? Que fait IBK des autres actions à court terme, c’est-à-dire immédiates, relatives à ces autres thématiques ? Autre maladresse du Président IBK dissimulé derrière le DNI : le timing de la tenue du DNI mis en relation avec la période d’apparition de l’épidémie du coronavirus en Chine. Les Maliens ne sont pas amnésiques. Le DNI s’est déroulé du 14 septembre au 22 décembre 2019. Pendant cette période, aucun des participants du DNI ne pouvait soupçonner que l’épidémie de coronavirus qui débutait à peine en Chine, allait se muer en pandémie pour envahir le monde entier y compris le Mali. C’est dire combien le Président IBK, qui n’est pas un novice du droit par rapport à la théorie de la force majeure, fait preuve de mauvaise foi manifeste en rappelant que la date du scrutin a été fixée par le DNI dont les participants ne savaient absolument rien du coronavirus. IBK le sait très bien, car c’est de l’évidence même : les participants du DNI n’allaient jamais recommander d’aller à des élections dans ce contexte sanitaire gravement menacé par le coronavirus. Le Président IBK aurait-il préféré l’hécatombe d’abord avant de faire jouer la force majeure qui permet de préserver son peuple de la pandémie du coronavirus ?

 

Le mensonge d’Etat sur de soi-disant « conditions sanitaires lors du scrutin du 29 mars 2020 »

Le contraire serait plutôt surprenant au Mali où l’oligarchie de la pseudo démocratie a pris le peuple orphelin en otage. La gouvernance dans notre pays se ramène aujourd’hui à sa simple expression de jeu de dupe entre un peuple désabusé et sa classe politique d’opportunistes pour qui, tous les coups sont permis y compris le mensonge d’Etat et la manipulation éhontée de l’opinion. En réponse pratique aux préoccupations des populations, le gouvernement n’agit que par du verbiage creux le plus souvent mensonger et hypocrite. Les Maliens se sont certainement bien marrés le 25 mars dernier en entendant le Président IBK asséner que les législatives se tiendront dans le respect scrupuleux des mesures-barrières : « Le gouvernement fera tout pour que cela soit le cas ». Combien de déclarations martiales de ce genre restées lettre morte sous le régime de IBK ? Ce ne sont tout de même pas les mesures de prévention préconisées dans le Communiqué du gouvernement daté du 27 mars 2020 qui vont répondre à cette injonction présidentielle !

En fait, ces mesures participent sinon du mensonge d’Etat et de la manipulation de l’opinion, du moins de la prévention pacotille destinée à créer chez l’électeur crédule, l’illusion que sa participation électorale serait sans danger sanitaire pour lui. La disponibilité des Kits de lavage de mains ou des gels hydroalcooliques à l’entrée de chaque centre et de bureau de vote dont on sait du reste qu’elle n’a aucunement été effective partout, ne procure qu’une protection factice. Il en est de même de toutes les autres préconisations qui sont tout autant folkloriques dans un contexte électoral : les regroupements, la distance minimum d’un mètre, les poignées de mains, le lavage des mains avant et après le vote…Toutes ces préconisations sont des pis-aller auxquels, à cause de son irresponsabilité fautive, le gouvernement se cramponne, à défaut de vouloir protéger la vie des Maliens. Le comble du ridicule qui ne tue plus chez ce gouvernement irrespectueux lui-même de la Constitution et des lois de la République, c’est lorsque son Communiqué du 27 mars 2020 se termine ainsi comme un dernier coup de pied au bon sens des Maliens : « Le Vote est un droit. Se protéger et protéger les autres contre le Coronavirus est un devoir ». Encore une fois, ce gouvernement qui lit dans le sens inverse la Constitution et les lois de la République quand il ne les piétine pas tout simplement, le fait dans le même sens tordu que sa minable gouvernance extravertie qui ne fait pas de place pour nous Maliens. C’est l’hôpital qui se fout de la charité. Ce n’est tout de même pas ce gouvernement qui va faire la leçon de droit. Soyons sérieux ! Si le vote est un droit, le gouvernement peut-il moralement soutenir que ce droit peut s’exercer actuellement dans les conditions de l’élection démocratique ? Si le vote est un droit, le gouvernement aurait-il avalé le tout premier article du tout premier Titre de la Constitution selon lequel « la personne humaine est sacrée et inviolable et tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité et à l’intégrité de sa personne » ? Si le vote est un droit, pourquoi le gouvernement s’assoit-il sur l’article 17 de la Constitution qui dispose que « l’éducation, l’instruction, la formation, le travail, le logement, les loisirs, la santé et la protection sociale constituent des droits reconnus » ? Enfin, si « se protéger et protéger les autres contre le Coronavirus est un devoir » selon le Communiqué du 27 mars 2020, pourquoi ce devoir ne s’imposerait-il pas en premier lieu à IBK et son gouvernement qui ont maintenu le scrutin du dimanche dernier en sachant pertinemment qu’ils violaient ainsi le devoir qui leur incombe à eux avant tout, de protection des Maliens contre le Coronavirus ? Le gouvernement s’est entêté à tenir le scrutin du dimanche en dépit de la futilité des mesures préventives présentées dans son Communiqué qui font, sans doute à dessein, l’impasse totale sur les actes électoraux de dissémination du coronavirus qui sont inhérents au déroulement technioque et opérationnel même du scrutin.

 

Les actes électoraux de dissémination du coronavirus ou « l’analyse Corona » de la loi électorale

La loi électorale qui ne sait rien du coronavirus, est truffée de dispositions opérationnellement propices à la dissémination vertigineuse de la pandémie de coronavirus. Les mesures de prévention agitées par le gouvernement n’y pourront absolument rien, sauf à faire des entorses à la loi électorale. Un survol rapide des articles vecteurs de dissémination à grande échelle du coronavirus donne une idée sur les risques majeurs de contamination auxquels ont étés les Maliens hier dimanche 29 mars 2020.

Article 80 : la manipulation des bulletins de vote par le président du BV et les assesseurs à travers leurs signatures

Article 82 : le nombre d’électeurs par BV allant à 500 personnes

Article 90 : l’électeur prend un bulletin unique déjà souillé par les signatures du président et des deux assesseurs ; l’électeur appose le doigt sur l’encre rigide souillé au fil des différents votes effectués dans le bureau de vote ou alors il utilise un stylo déjà souillé par celui qui est passé avant lui pour marquer d’une croix son vote sur le bulletin ; l’électeur doit plier le bulletin unique souillé avant de l’introduire dans l’urne ; après son vote, l’électeur signe ou appose son empreinte digitale sur la liste d’émargement souillée en utilisant l’encre ou le stylo souillé ; l’électeur trempe obligatoirement son doigt dans l’encre indélébile souillée ; un assesseur appose le cachet “a voté” déjà souiller sur sa carte d’électeur qui sera souillée par un assesseur auquel celle-ci est remise ;

Article 91 : l’urne qui entre-temps aura transité un peu partout, est manipulée par les assesseurs qui devant constater qu’elle est vide avant de la fermer par scellé.

Article 93 : les opérations de dépouillement impliquent de nombreux actes de manipulation des documents électoraux déjà souillés y compris par des scrutateurs : bulletins de vote, listes d’émargement…

Article 95, 96,97, 98, 99 : manipulations des documents de procès-verbaux, feuilles de dépouillement, enveloppes scellées et cachetées. Ces différents documents souillés sont ensuite transmis à la Direction générale de l’administration du territoire, à la Cour constitutionnelle et à la commune. Les assesseurs vont devoir les trimbaler également dans les QG de campagne des candidats

Article 101 : les listes d’émargement souillées notamment par les signatures du président, des assesseurs et délégués sont transmises dans les communes

Article 164 : les procès-verbaux souillés sont manipulés par les membres des commissions de centralisation à Bamako, dans chaque cercle et au niveau national.

Il faut préciser que les pauvres délégués de la CENI et de la Cour constitutionnels qui supervisent et contrôlent l’ensemble des opérations électorales dans les bureaux de vote ont également été exposés au coronavirus lors du scrutin d’hier.

Le pire est que la perspective du second tour de ces législatives prévu pour le 19 avril prochain signifiera pour les Maliens, une augmentation des risques pris au premier tour et par voie de conséquence des cas de contaminations du premier tour.

 

Vers le second tour de tous les dangers ?

Imaginer une explosion- que personne bien entendu ne souhaite pour notre pays- des cas de contamination d’ici le 19 avril 2020 ! Que Dieu nous en garde. Cela dit, ce serait de toute façon faire preuve de naïveté, étant donné ce qu’on observe dans les autres pays, de penser que les choses pourraient s’améliorer dans les 20 prochains jours de ce premier tour de scrutin. IBK et son gouvernement qui sont enfermés dans leur fuite en avant du premier tour au forceps, vont-ils continuer à sacrifier leur population ou consentir à reporter ce second tour ? Il est évident qui s’il venait à se tenir malgré tout, le second tour va se dérouler avec des matériels et des document électoraux déjà tripotés lors du premier tour, c’est-à-dire des matériels et documents souillés. Ce qui signifiera aussi bien pour les agents électoraux que les électeurs et autres observateurs ou superviseurs, des risques supplémentaires de contamination par le coronavirus.

Jamais, l’expression de bétail électoral n’aura été convenable pour qualifier le comportement électoral des Maliens qu’on a vu se faire convoyer un peu partout dans le pays, un peu comme du bétail qu’on amène à l’abattage.

Dr Brahima FOMBA

Université des Sciences Juridiques

et Politiques de Bamako (USJP)

L’Aube

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