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France: après l’incendie de Lubrizol, l’État montré du doigt par le Sénat

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Suivi sanitaire « problématique », moyens insuffisants… Dans un rapport publié ce jeudi 4 juin, La commission d’enquête du Sénat sur le spectaculaire incendie de Lubrizol dénonce « des angles morts inacceptables » dans la prévention des risques industriels en France. Elle épingle au passage le gouvernement et en particulier l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn.

« À l’instar du suivi sanitaire proprement dit, l’identification du risque sanitaire telle que pratiquée par le ministère de la Santé, a été à la fois tardive et incomplète », écrivent les rapporteurs Christine Bonfanti-Dossat (LR) et Nicole Bonnefoy (PS) dans leurs conclusions sur « l’accident industriel majeur » de Lubrizol. Un incendie spectaculaire sans victime « apparente », qui a fait l’objet de « 200 000 tweets en 24 heures ».

Survenu le 26 septembre sur le site Seveso seuil haut, l’incendie avait provoqué un immense nuage de fumée noire de 22 km de long avec des retombées de suie jusque dans les Hauts-de-France. Près de 9 505 tonnes de produits chimiques avaient brûlé dans cette usine de lubrifiants automobiles et sur le site voisin de Normandie Logistique.

Méthologie problématique

Pour la commission présidée par le centriste Hervé Maurey, la méthodologie adoptée par le ministère de la Santé, dirigé alors par Agnès Buzyn, pour le suivi sanitaire est « problématique ». « La décision publique de lancement d’un suivi sanitaire reste suspendue à la découverte incontestable d’un risque avéré », estiment les sénatrices, malgré « l’incertitude sur la toxicité des fumées émises lors de l’incendie ».

Or, poursuivent les deux rapporteurs, « il ressort […] qu’il est impossible de se prononcer de manière définitive sur l’impact sanitaire de l’incendie Lubrizol, au vu des seules données récoltées dans le cadre de la surveillance environnementale, ces dernières étant totalement ou partiellement inexploitables ».

Même « à court terme, malgré un bilan globalement rassurant, demeurent un risque d’exposition au benzène pour les populations situées sur le site de l’usine Lubrizol le jour et le lendemain de l’incendie ainsi qu’une incertitude importante concernant les dioxines et furanes ».

 

Décision prise dans l’urgence

Les sénatrices dénoncent en outre la décision du ministre de l’Agriculture « prise dans l’urgence le 11 octobre » de lever l’interdiction de vente du lait produit dans plus de 200 communes. Cette décision prise « trois jours avant la publication du premier avis de l’Anses [autorités sanitaires, NDLR], paraît prématurée : elle n’a pas pu tenir compte des fortes réserves émises […] confirmées dans les avis subséquents », selon le rapport. Le gouvernement a ensuite « fait fi du caractère incomplet de l’analyse des prélèvements d’air ».

La ministre de la Transition écologique et solidaire n’est pas en reste. Son objectif affiché à la suite de la catastrophe « d’augmentation de 50% des contrôles d’ici 2022 à effectifs constants » est « peu réaliste », selon le rapport. Car « depuis quinze ans […] le nombre de contrôles » des sites industriels classés « a pratiquement été divisé par deux ». Pour les sénatrices, il faut « renforcer les moyens humains et financiers consacrés » à la prévention.

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Angles morts dans la politique de prévention depuis 40 ans

Le gouvernement n’est ainsi pas le seul épinglé dans ce rapport. « La politique de prévention des risques industriels déployée depuis 40 ans en France laisse apparaître des angles morts importants et inacceptables », écrivent les rapporteurs. « Les crédits budgétaires alloués par l’État à la prévention des risques technologiques diminuent tendanciellement depuis plusieurs années », ajoutent les sénatrices.

Les élues de la Haute Assemblée pointent en outre « le nombre réduit de sanctions prononcées, leur faiblesse et le taux de classement sans suite plus élevé pour les infractions environnementales que pour la moyenne ». Cela est « perçu par certains observateurs comme le signe d’une forme d’indulgence des pouvoirs publics vis-à-vis des industries », poursuivent-elles.

Par ailleurs, « il est urgent de revoir la doctrine de communication de crise de l’État. Vouloir rassurer à tout prix fait perdre de vue l’objectif principal: informer le plus clairement possible et en temps réel ».

RFI

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