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Dicko: ‘‘je n’ai pas d’agenda caché’’

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L’imam Mahmoudou Dicko sort enfin de son silence. Il s’est dit inquiet du conflit intercommunautaire, de l’insécurité galopante et du sort du peuple paupérisé et désœuvré. Constatant que le tissu social est abîmé et les forces politiques dispersées, dit-il, l’ancienne autorité morale honnie par le M5-RFP craint que la tenue d’élections dans ces conditions ne conduise le pays à une impasse et appelle à un dialogue national à travers un manifeste qu’il a publié voilà une dizaine de jours. Cependant, la main sur le cœur (et non sur le Coran), l’Imam Dicko que le M5-RFP refuse de suivre aveuglement cette fois-ci réfute avoir un quelconque agenda caché, affirme n’avoir aucun agenda caché et surtout de ne plus, comme à son habitude, clignoter à gauche pour aller à droite.
Se confessant sur la désastreuse aventure qu’il a instrumentalisé et imposé au pays, Mahmoud Dicko avoue à demi-mot que le coup d’État contre son frère et son ami, le président Ibrahim Boubacar Keïta n’aura finalement été qu’une grossière erreur, en tout cas un gâchis et une criminelle désillusion pour le peuple. Un peuple du Mali qui aujourd’hui vivote et survit au quotidien entre insécurité et injustice, exaction et humiliation. Comment s’en sortir ?
L’Homme de Dieu qui avait promis sans l’aval de Dieu la paix, la réconciliation et la quiétude à son peuple doit chercher et réinventer voix et les voies de la restauration de la sécurité, de la fin des affrontements communautaires, du terrorisme et djihadistes. Agitant ses relations supposées ou réelles avec les deux principaux djihadistes qui mettent le pays à feu et à sang depuis 7ans, Amadou Koufa et Iyad Ag-Ghali, Mahmoud nous dit que le «bon sens oblige à chercher une solution» là où, dit-il triomphalement, la victoire militaire contre eux étant impossible. Comme un gourou qui montre le chemin du suicide à ses disciples, l’Imam pyromane, explique que ce n’est pas acceptable d’installer le pays «dans une guerre infinie» car on «met la République en péril». Mais, il ne nous dit pas qu’est-ce la République va devoir offrir ou accepter en contre partie de la paix avec les djihadistes.
Au beau mentir qui vient de loin, comme on le dit chez nous : main yé main tiguila yé. Lisons entre les lignes l’Interview de Mahmoud Dicko ce vendredi à notre confrère de France 24.

France 24 : Il y a quelques jours, après des mois de silence, vous avez publié un Manifeste pour la refondation du Mali dans lequel vous expliquez que la situation du pays est périlleuse, et vous appelez à « un nouveau pacte républicain », je vous cite. D’après vous, est-ce que le Mali est au bord du gouffre ?

Mahmoud DICKO : le Mali est effectivement dans une situation qui n’est pas tellement enviable, souhaitable. Même si on n’est pas dans le gouffre, je pense que pour quelqu’un qui est un observateur avisé, nous devons vraiment faire en sorte que la situation ne puisse pas perdurer de la même manière. C’est pour cela que j’ai publié ce manifeste pour en faire vraiment un appel à l’endroit d’abord de mes concitoyens pour qu’on puisse se mettre tous ensemble. Parce que c’est seulement uni, qu’on peut vraiment relever les défis qui sont devant le peuple malien. Dans peu de temps, peut-être que la communauté internationale a dit d’aller à des élections. Nous allons à des élections pendant que le tissu social est complètement abîmé, les forces politiques sont dispersées. Je crois réellement que la situation mérite qu’on se mette en semble pour voir ce qu’on peut faire avant les futures élections.

France 24 : Alors, vous dites dans ce manifeste « depuis le 18 août 2020, j’ai laissé ma porte grande ouverte. J’ai inlassablement écouté et observé, mais la situation me paraît trop grave pour que je garde silence. Si nous ne réagissons pas maintenant, activement et collectivement, l’État qui nous gouverne n’a plus de sens. Il faut sauver le pays ». Est-ce que ça veut dire que le régime qui été mis en place après ce coup d’État, aujourd’hui, vous dites, nous amène dans l’impasse ?

Écoutez, c’est la situation qui peut nous amener dans l’impasse. Parce que le coup d’État devait être une occasion de sceller une certaine réconciliation entre l’armée et le peuple malien. Malheureusement, il faut le constater qu’avec beaucoup de difficultés, et tout ce qu’il y a eu comme haut et bas dans cette situation a fait en sorte qu’il y a encore des méfiances de part et d’autre entre cette armée qui est une armée républicaine, une armée du peuple, entre cette armée et une grande partie de la classe politique malienne.
Nous devrons, aujourd’hui, restaurer cette confiance. On ne peut faire une refondation de notre pays si on ne refonde pas cette situation. Ça va commencer d’abord par la refondation de notre armée, la moralisation de notre armée, et la réconciliation entre l’armée et le peuple ; la restauration de la confiance entre l’armée et son peuple. C’est à partir de cela que nous pouvons ensemble bâtir quelque chose qui va être salutaire pour l’avenir du Mali.

France 24 : Vous ne vous êtes pas vraiment exprimé sur le coup d’État du 18 août dernier. Est-ce que c’était une erreur, ou est-ce qu’il fallait faire partir Ibrahim Boubacar KEITA, quels que soient les moyens ?

Moi je ne parlerais pas d’erreur ou de coup d’État. Le Coup d’État est fait. C’est fait et aujourd’hui, c’est quelque chose qui est derrière nous. L’essentiel, c’est de se mettre ensemble aujourd’hui pour ne plus tomber dans les erreurs passées. C’est pour cela que j’ai fait ce Manifeste. Je pense qu’il fallait le faire aujourd’hui pour alerter l’opinion nationale voir internationale.
Nous sommes dans un monde changeant avec un nouvel ordre mondial qui se dessine à l’horizon. Nous avons des partenaires qui ont des enjeux électoraux comme nous en 2022. Il est temps que le peuple malien prenne son destin en main et que nous-mêmes, nous agissons pour nous, par nous pour essayer de trouver la solution.

France 24 : Le calendrier qui a été mis en place prévoit un retour aux élections d’ici 14 mois. Vous avez dans votre première réponse que vous n’étiez pas favorable à des élections dans les conditions actuelles. Que faut-il faire ? Est-ce qu’il faut repousser ces élections ou est-ce qu’il faut les avancer ? En tout cas, vous semblez penser que le calendrier mis en place n’est pas le bon ?

Je ne parle pas de calendrier, je parle des conditions dans lesquelles nous allons arriver à ces calendriers. C’est ces conditions qu’il fait changer. Pas le calendrier. Je pense que si on va à des élections dans cette situation, dans ce contexte, ça va être difficile. Et ça, je le maintiens.

France 24 : Vous avez aussi, dans ce manifeste, proposé des services de médiateur entre les groupes armés, les groupes civils. Alors, on sait qu’il y a une question qui agite beaucoup au Mali, et plus largement au Sahel. À savoir, est-ce qu’il faut discuter avec les groupes djihadistes ? Est-ce que vous, vous appelez à un dialogue avec des leaders comme Amadou Koufa et Iyad Ag-Ghali pour véritablement parvenir à une réconciliation nationale ? Ou est-ce que vous considérez comme la France, par exemple, qu’il ne faut pas parler avec ces gens-là ?

Je ne sais pas ce que la France dit, ou ce que la France souhaite. La France est un pays souverain, je respecte son opinion. Mais, je pense qu’au Mali ici, nous sommes dans une situation où le bon sens oblige à chercher une solution. Si on ne peut pas, par le bout des armes, arriver vraiment à bout de ces gens-là. Ceux qui nous aident aujourd’hui sont dans l’impasse. Qu’est-ce qu’il faut faire ? On n’arrive pas à les vaincre militairement, on ne parle pas avec eux, on ne discute pas avec eux. Alors, comment on peut accepter d’installer le pays dans une guerre infinie. Mais, le bon sens ne peut pas accepter ça. Il faut qu’à un moment donné le peuple se mette ensemble pour dire, mais qu’est-ce qu’on veut ?
Vous ne pouvez pas nous demander de ne pas parler avec des gens alors que militairement on n’arrive pas à venir à bout de ces gens. Ceux qui nous aident n’y arrivent pas. Et vous ne voulez pas qu’on parle avec eux. Ça veut dire qu’on va rester dans une guerre infinie. Un peuple avec tous les défis qui nous assaillent, avec tous les problèmes que connaît le Mali aujourd’hui, si on doit s’installer dans une guerre infinie, alors là, c’est la République en péril.

France 24 : Est-ce que vous vous proposez d’être intermédiaire entre le pouvoir malien et Amadou Koufa et Iyad Ag-Ghali ? Est-ce que vous avez déjà pris dans contacts dans ce sens ?

Pourquoi vous parlez seulement de Iyad et Amadou Koufa ? Les acteurs sont nombreux. Les problèmes entre les différentes communautés sont là. Ce sont des problèmes qui nous assaillent. Moi, ça me préoccupe plus que toute autre chose. Des gens qui ont vécu ensemble pendant des millénaires, des siècles, aujourd’hui, qui s’entredéchirent, c’est vraiment l’avenir même de la nation qui est en péril.
Quand les communautés composantes cette nation s’entredéchirent, aujourd’hui, il faut trouver une solution. Il faut parlez avec eux, au moins, ces acteurs qui sont sur le terrain. Je pense réellement que ce n’est pas au-dessus de nos moyens.

France 24 : Est-ce que vous voulez le faire, vous ?
Je ne suis qu’un individu. C’est le peuple malien qui décidera de qui doit faire quoi. Mais, il faut qu’on se mette au moins ensemble pour définir ça.

France 24 : Est-ce que vous avez un agenda caché ? Est-ce que vous imam, vous êtes un acteur politique de poids, est-ce que vous avez des ambitions politiques ?

C’est cette affaire d’agenda caché qui hante tout le monde. Je n’ai pas d’agenda caché. Je le dis, je n’ai pas d’ambition personnelle qui est là. Ce qui me préoccupe aujourd’hui, c’est le sort de mon peuple, de mon pays. De ces milliers de personnes qui vivent la misère noire. Qui dans des situations difficiles de précarité qu’on ne peut pas expliquer aujourd’hui. Il y a des milliers de personnes qui n’ont pas d’école, qui n’ont pas de centre de santé, qui n’ont pas d’eau potable. Mais, quel agenda cherche-t-on quand on a un peuple comme ça, et on n’arrive pas à trouver une solution. Quel est l’agenda que moi je vais cacher, pourquoi cacher un agenda si l’ait ? Je suis un citoyen libre de ce pays. Si j’ai un agenda, je n’ai pas besoin de le cacher.

France 24 : IBK, l’ancien président, vous l’avez critiqué peu avant sa chute. Il vous a accusé de vouloir instaurer par la force une République islamique au Mali. On vous sait proche de l’Arabie Saoudite. Vous parlez de Manifeste républicain, est-ce que vous êtes en faveur d’un Etat laïc au Mali ; est-ce que vous pouvez clarifier votre position à ce sujet ?

Pourquoi vous voulez me singulariser tout le temps ? Moi, je fais partie d’un ensemble qui est le Mali. C’est le peuple malien qui décidera de ce qu’il veut. Ce n’est pas l’Imam DICKO qui va imposer.
J’ai beaucoup de respect pour mon grand-frère (IBK), que j’estime beaucoup que j’aime bien. Il a dit ce qu’il a dit, c’est sa pensée, je respecte sa pensée. C’est un droit pour lui de me critiquer ou de penser ce qu’il veut. Mais, je crois qu’il me connaît mieux que beaucoup de gens. Si j’avais cet agenda, je n’étais pas obligé de transformer les mosquées en QG pour lui et l’élire. Lui qui n’a pas de projet islamique. Mais, il est libre de penser ou de dire ce qu’il veut. Je veux tout simplement vous dire, être proche de l’Arabie Saoudite, ne veut pas dire qu’il faut transformer le Mali pour en faire autre chose que les Maliens eux-mêmes ne décident pas.
Non, j’ai beaucoup de respect pour ce peuple malien, c’est un grand peuple, c’est une grande nation. Je sais qu’aujourd’hui, nous sommes dans les difficultés, mais nous avons les ressources pour pouvoir arriver à bout de ça. Et j’aime à le dire tout le temps, si on interroge le génie malien, il nous sortira la solution, pour trouver la voie.

France24 : Qu’est-ce que vous préconisez très concrètement ? On sait que vous préconisez un dialogue, mais bon sang, ce sont des mots, mais des actes ?

Les actes que je préconise, je ne peux pas les concrétiser seul. C’est avec le peuple malien, c’est ensemble que nous allons le faire. Si j’ai des idées, je les partage avec le peuple, et c’est au peuple malien d’apprécier ce qu’on doit faire de ces idées.

Info-Matin

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