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Avec le coup de force des militaires, le Mali replonge dans l’incertitude

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Le Mali s’est réveillé mardi avec la désolation du déjà-vu après l’arrestation la veille par les militaires du président et du Premier ministre de transition, un coup de force mené neuf mois après un putsch et vivement condamné par la communauté internationale.

Le président Bah Ndaw et le Premier ministre Moctar Ouane ont passé la nuit aux mains des militaires qui, lundi, les ont fait conduire de force au camp de Kati, haut lieu de l’appareil de Défense à quelques kilomètres de Bamako, a-t-on appris de source proche des militaires.

Aucune autre précision n’a été fournie par cette source qui s’exprimait sous le couvert de l’anonymat compte tenu de la volatilité de la situation. Les militaires ont jusqu’à présent gardé le silence et leurs intentions demeurent inconnues, malgré les spéculations sur une démission forcée des dirigeants de transition, comme cela était advenu en 2012 ou 2020.

Le Mali, plongé dans une crise inextricable et multiforme depuis des années, allait au-devant d’une journée d’incertitudes, de rumeurs et d’activités diplomatiques et politiques, avec l’arrivée prévue du médiateur des Etats ouest-africains Goodluck Jonathan.

Tandis que les hashtags contre un nouveau putsch au Mali prospéraient sur les réseaux sociaux, la mission de l’ONU dans le pays (Minusma) démentait des tweets usurpant sa charte visuelle pour affirmer qu’un nouveau Premier ministre avait été nommé.

Le président et le Premier ministre ont été arrêtés lundi quelques heures à peine après avoir formé un nouveau gouvernement à la suite de la démission du précédent, confronté à une contestation grandissante.

Les Maliens n’ont aucun doute que ce sont les colonels auteurs du putsch du 18 août 2020 qui sont à la manoeuvre, les mêmes qui avaient alors emmené sous la contrainte le président élu Ibrahima Boubacar Keïta pour le forcer à démissionner après des mois de mobilisation populaire, les mêmes aussi qui ont installé le président et la Premier ministre à leur poste.

Le Premier ministre malien Moctar Ouane, à New Delhi le 16 janvier 2009
© RAVEENDRAN Le Premier ministre malien Moctar Ouane, à New Delhi le 16 janvier 2009

Sous la conduite discrète du colonel Assimi Goïta, nommé vice-président de transition, ils ont conservé la mainmise sur le pouvoir. Ils se sont engagés, sous la pression de la communauté internationale, à rendre ce pouvoir à des civils élus au bout de 18 mois, et non trois ans comme ils l’estimaient nécessaire.

– Le M5 à Kati –La composition du gouvernement communiquée lundi a semble-t-il mécontenté les colonels. Certes elle conserve à des militaires les postes clés mais elle écarte deux figures de l’ancienne junte des portefeuilles primordiaux de la Défense et de la Sécurité.

Carte du Mali localisant la capitale Bamako
© Laurence SAUBADU Carte du Mali localisant la capitale Bamako


La mission des Nations unies au Mali, la Communauté des Etats ouest-africains (Cédéao), l’Union africaine, la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni l’Allemagne et l’Union européenne ont condamné “fermement la tentative de coup de force”. Dans un communiqué commun, ils exigent “la libération immédiate et inconditionnelle” des dirigeants de transition auxquels ils apportent “leur ferme soutien”. Il rejettent par avance tout fait accompli, y compris une éventuelle démission forcée des dirigeants arrêtés.

Scène de rue à Bamako le 12 mai 2021, célébration de la fin du ramadan
© Michele Cattani Scène de rue à Bamako le 12 mai 2021, célébration de la fin du ramadan

Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé lundi dans un tweet “au calme” au Mali et à la “libération inconditionnelle” de MM. Ndaw et Ouane.

Selon des diplomates, le Conseil de sécurité de l’ONU pourrait tenir une réunion d’urgence dans les prochains jours.

Une délégation du Mouvement du 5-Juin, le collectif qui avait mené en 2020 la contestation contre le président aujourd’hui déchu Ibrahim Boubacar Keïta et qui avait été marginalisée par les colonels, s’est rendue dans la nuit à Kati.

Mi-avril, les autorités de transition ont annoncé l’organisation le 31 octobre d’un référendum sur une révision constitutionnelle promise de longue date et ont fixé à février-mars 2022 les élections présidentielle et législatives à l’issue desquelles elles remettraient le pouvoir à des dirigeants civils.

Le doute persiste toutefois quant à leur capacité à tenir leur programme, a fortiori dans un contexte de crise politique renouvelée où les violences jihadistes et autres continuent sans relâche et où s’accumulent les signes de grogne sociale. La principale organisation syndicale vient d’annoncer une nouvelle grève pour cette semaine.

Le Mali, pays de 19 millions d’habitants, et ses voisins nigérien et burkinabè sont pris dans un tourbillon de violences jihadistes, intercommunautaires ou autres qui ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.

sd-kt-lal/jhd 

AFP

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