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Chute de l’Afghanistan aux mains des talibans : Trop de similitudes au Sahel pour ne pas faire le parallèle

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« Sahélistan ». C’est là le terme donné pas bon nombres d’analystes de la situation sécuritaire au Sahel tant la zone, surtout le nord malien, tendait à ressembler à l’Afghanistan, Etat failli voilà plus de vingt ans maintenant. Et la chute, beaucoup trop facile du pays dans les mains des Talibans, en seulement quelques heures quasiment, fait apparaitre le spectre de 2012 au Mali ; et au-delà, du scénario catastrophe que pourrait vivre le pays en cas de retrait des forces françaises Barhkane. Certes, comparaison n’est pas forcément raison, mais les leçons de part et d’autres à tirer, sont les mêmes. C’est prendre en mains son destin sécuritaire ou périr, qu’à Dieu ne plaise !

Plus de vingt ans de présence militaire américaine n’auront pas suffi à la chute de l’appareil étatique afghan ! Dès les premières heures qui ont suivi le retrait massif des GI américains, les Talibans ont saisi l’aubaine pour prendre le pouvoir. Fait encore plus étonnant, ils ne rencontrèrent aucune résistance de la part des forces régaliennes en place. Pire encore, des personnalités politiques de premier plan n’ont pu mieux faire que prendre la poudre d’escampette à l’image du président afghan, Ashraf Ghani, qui s’est réfugié aux Emirats Arabes Unis, avec l’ensemble de sa famille.

Les forces armées afghanes, après tant d’années passées à côtoyer celles américaines, bénéficiant d’entrainements et de financements dans le but un jour de se prendre en change, auraient dû au moins freiner l’offensive talibane. Mais eu lieu de cela, les hommes de Abdul Ghani Baradar ont exécuté une parade jusqu’à Kaboul. La raison est toute simple, et c’est là où le Mali et d’autres pays du Sahel doivent en prendre des graines. C’est que le pays n’en a jamais vraiment pris les rails de la discipline et de la rigueur dans l’édification de l’œuvre nationale par une véritable réforme et opérationnalisation des forces armées locales. Au lieu de cela, l’Administration Afghane s’est rendue coupable d’énormes malversations financières et d’une corruption massive à tous les échelles. A tel point que les Etats-Unis, ayant eu vent de telles pratiques forts décevantes, n’eut d’autres choix que de prendre la décision du retrait de ses troupes en place.

L’amer réalité est que les autorités politiques du pays n’eurent aucun états d’âmes à se servir plutôt que de servir un Etat meurtri par de longues années de guerre et miné par une pauvreté généralisée. A titre d’exemple, ces mêmes autorités auraient gonflé les chiffres des forces armées avec des bataillons fantômes uniquement dans le but d’augmenter le financement octroyé par les USA, et donc, avoir plus d’argents à voler. Ainsi, 46 bataillons fantômes de 800 hommes chacun auraient été déclarées. De quoi fortement exaspérer le pays de l’Oncle Sam, et finalement, la décision forte de Joe Biden de supprimer la présence militaire américaine en Afghanistan est assez logique. Surtout que le pays aura consenti au total 2261 milliards de Dollars et déplorer plus de 2400 morts dans cette guerre d’usure. D’ailleurs, Joe Biden l’aura déclaré haut et fort dans une de ces allocutions ayant suivies le retrait des troupes américaines en disant, en substances, que c’est aux afghans de combattre pour leur propre pays, et qu’ils doivent être prêts pour le faire.

Aux nombres des similitudes de part et d’autres du Sahelistan et de l’Afghanistan, s’il y a bien une qui fait tache, c’est bien cette inconscience politique de la part de la classe dirigeante en place à prendre à bras-le-corps son destin sécuritaire. Destin, qui serait la clé de voute pour un Etat avec des fondements solides.

Et le moins que l’on puisse dire, surtout pour le Mali, c’est qu’une gouvernance vertueuse semble une chimère poursuivie depuis belle lurette par le peuple. Et lorsqu’elle fait défaut dans tout ce qui touche l’institution militaire, cela a de quoi démoraliser les partenaires du pays dans la lutte contre le terrorisme. De plus, plutôt les autorités politiques du pays amorceront le virage de la prise en charge de soi par une moralisation à outrance de la gouvernance dans tous les domaines, plutôt elles s’affranchiront de toute tutelle étrangère sur le pays. Car, comme le prouve l’exemple du retrait américain d’Afghanistan, aucune force étrangère n’a vocation à rester éternellement sur place. Et lorsqu’elle pliera bagages, il faudra que les forces armées locales soient à même de tenir la dragée haute à toute menace dans les limites de son territoire.

Dans le cas du Mali, les craintes sont pour le moins légitimes, car l’insécurité n’est plus concentrée qu’au nord. Le centre et même certaines régions du sud sont en proies à des violences cycliques, souvent avec des corrélations inter communautaires sans que l’Armée en place n’arrive à les maitriser. Que dire alors si Barkhane, en place depuis huit ans, se retrouve à 2500 ou 3000 hommes dans toute la région du Sahel contrairement à 5100 aujourd’hui, comme annoncé par Paris ? L’exemple afghan aura montré qu’une guerre asymétrique est excessivement difficile à mener. L’ennemi se fond dans la masse et profite des moindres failles du système étatique pour étendre ses tentacules. La force combattante en place est obligé à réduire sa puissance de feu et à user d’autres stratagèmes. Il s’agit d’une vrai guerre d’usure, et il est fort à parier que la prise du pouvoir des Talibans reboostera les groupes terroristes au Sahel tel qu’Aqmi.

D’ici 2022, la France ferma ses bases à Kidal, Tessalit et Tombouctou. En ce moment, ce sera l’heure de vérité pour le Mali et le Sahel en général. D’ici là, les autorités politiques du Mali, mais aussi du Niger et du Burkina Faso devront travailler dur afin de prouver qu’elles sont à même de relever leur défi sécuritaire. Mercredi dernier, Gogadji au Faso a été victime d’une attaque meurtrière dont le bilan fut de 65 morts. Fort malheureusement, ce genre d’attaques tend à se banaliser dans la zone, tant elles prennent de l’ampleur. Selon l’ONU, depuis le début de l’année 17500 personnes ont quitté le pays par peur de représailles.

Ahmed M. Thiam

Infosept

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