Opposés à l’actuel projet de loi portant modification de la loi N°2016-046 du 23 septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle, les magistrats du pays sont en grève de 5 jours depuis le mardi 29 novembre dernier. La négociation, tenue courant le 22 novembre, entre le département de la justice et les syndicalistes s’est soldée par l’échec.Le syndicat autonome de la magistrature (SAM) et le syndicat libre de la magistrature (Sylima) avaient déposé un préavis conjoint de grève en date du 9 novembre 2022. C’était pour protester contre une éventuelle adoption du projet de loi concernant la Cour Suprême du Mali. Dans un communiqué conjoint, les deux corporations annoncent avoir tenu, le 22 novembre dernier, de négociation avec le ministère de la Justice et des Droits de l’homme. À cet effet, trois (3) points étaient inscrits à l’ordre du jour. Le premier point portait sur le retrait du projet de loi portant modification de la loi N°2016-046 du 23 septembre 2016, portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle.
Les magistrats estiment que ce projet de loi viole la loi N°2002-054 du 16 décembre 2002 portant statut de la magistrature en ses articles 100 et 101.Aussi, ont-ils soutenu, le même projet de loi porte atteinte à l’indépendance de la magistrature, voire viole le caractère impersonnel de la loi. Le deuxième point de la négociation portait sur la loi N°2002-054 du 16 décembre 2002 portant statuts de la magistrature dont la relecture est, selon SAM et SYLIMA, réclamée depuis sept (7) ans. Et le troisième et dernier point concernait le classement des juridictions réclamé sans succès depuis des années. Sur le premier point, la partie gouvernementale a justifié la modification proposée par le déficit de ressources humaines à la Cour Suprême, et la nécessité de rendre cohérent l’article 18 de la loi N°2016-046 du 23 septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle. Pour leur part, les syndicalistes ont fait, selon leur communiqué conjoint, observer que le maintien, dans l’illégalité absolue, d’une dizaine de personnes (à la Cour Suprême au-delà de leur âge à la retraite) ne peut pas régler la problématique du déficit des ressources humaines à la Cour, ni à la magistrature de façon générale. « La solution se trouve dans le recrutement des magistrats. D’ailleurs, le Mali compte à ce jour 513 magistrats dont plus de 90 magistrats de grade exceptionnel. Et 178 magistrats sont du 1er grade susceptibles de servir la Cour Suprême, aux termes de la loi N°2016-046 du 23 septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant qui prévoit également la possibilité d’utiliser des conseillers et avocats référendaires qui peuvent être recrutés parmi ceux du 2ème grade », lit-on.
Un éventuel de bras de fer entre le Gouvernement et les magistrats ?
Le Gouvernement semble être résolu à adopter le projet de loi, et les syndicats prêts au boycott de toutes les activités de la Cour Suprême. À entendre les syndicalistes, la proposition des syndicats de régler la question relative à la loi N°2002-054 du 16 décembre 2002 qui définit la qualité même du Magistrat a été rejetée d’un revers de main par le Gouvernement. Parce qu’à l’exception de la section des comptes, pour être membre de la Cour Suprême, il faut être d’abord et avant tout magistrat. « Pour justifier ce rejet, la partie gouvernementale nous a lancé à la figure sa volonté indiscutable d’adopter cette loi avant la fin de l’année, aux fins de pouvoir garder des magistrats jugés indispensables pour l’existence de la magistrature malienne ». SAM et SYLIMA font part de l’échec de la négociation. Par conséquent, ils ont appelé, depuis le 28 novembre, leurs militants à observer un arrêt de travail de 5 jours allant du mardi 29 novembre au vendredi 5 décembre 2022 sur toute l’étendue du pays reconductible au besoin. Ce n’est pas tout. Les syndicalistes appellent au boycott de toutes les activités organisées par la Cour Suprême, y compris la rentrée judiciaire 2022-2023 projetée. Aux syndiqués, les deux mouvements tiennent à rappeler « la gravité de l’entreprise néfaste ourdie contre le corps ».S’achemine-t-on vers un bras de fer entre le Gouvernement et les Magistrats ? En tout état de cause, la magistrature se tient droit dans ses bottes contre l’adoption du projet de loi concernant la loi organique de la Cour Suprême. Notons que ce projet de loi met l’accent sur l’âge du départ à la retraite des membres de la Cour Suprême. Lesquels semblent bénéficier de faveur pour pouvoir continuer à travailler même s’ils atteindront l’âge réel prévu par les textes pour la retraite des magistratures du pays. Les syndicats s’opposent à cette faveur.
Mamadou Diarra
Source: Le Pays