L’Afrique a été la grande absente des débats et des discours des deux candidats à la présidentielle américaine. Parmi ses conseillers sur la politique étrangère, Donald Trump n’a pas de spécialiste du continent. De quoi susciter quelques inquiétudes sur les grandes lignes de sa politique africaine.
Avec notre envoyée spéciale à Washington, Laura Martel
Certains éléments peuvent aller dans le sens d’une continuité dans la politique africaine des Etats-Unis. Le fait que Trump ne dispose pas de spécialiste du continent peut s’expliquer : les postes décisionnaires sur la politique étrangère ne sont pas tous liés à des nominations présidentielles. Donc des membres clés au bureau Afrique du département d’Etat ou du Pentagone pourraient rester en place.
De plus, il n’y a jamais eu de réelle différence idéologique entre démocrates et républicains sur la politique africaine, même si les démocrates sont plus fermes sur la promotion de la bonne gouvernance par principe, quand les républicains, plus axés sur les intérêts du secteur privé, estiment que la libéralisation économique est en soi un facteur de démocratisation
La concurrence avec la Chine est l’un des éléments qui pourraient pousser Donald Trump à s’intéresser au continent. Durant la campagne, Donald Trump a adopté une attitude de confrontation avec la Chine, et les Etats-Unis sont bien conscients d’être très en retard face à l’offensive chinoise en Afrique, en particulier dans le secteur économiques et l’accès aux matières premières. En businessman, Trump devrait adopter une politique pragmatique basée sur les intérêts américains avant tout, économique et sécuritaires, et, en chantre de l’isolationnisme, relayer au second plan les exigences démocratiques.
Moins de pression sur les régimes contestés, c’est d’ailleurs ce qu’espèrent les pouvoirs actuellement en proie à des sanctions, comme le Burundi ou la RDC, dont les dirigeants ont rapidement félicité le président nouvellement élu.
Mais cet isolationnisme pourrait avoir une répercussion négative sur l’aide au développement, si Donald Trump, qui a promis de placer les intérêts des Américains avant toute chose, décidait que l’enveloppe conséquente de l’aide aux pays africains serait mieux utilisée à l’intérieur du pays. C’est du moins ce qu’il a laissé entendre pendant sa campagne.
■ Donald Trump va-t-il mettre fin à l’AGOA ?
Donald Trump va-t-il mettre fin à l’AGOA, cet accord de libre-échange signé en 2000 qui facilite l’entrée des marchandises africaines au marché américain ? Après les Etats-Unis, quelle nation a effectué le plus de recherches Google liées aux élections américaines mardi soir ? Réponse de Google Trends : le Ghana. En plus d’avoir de très nombreux ressortissants aux Etats-Unis, le pays d’Afrique de l’Ouest a exporté des millions de dollars de cacao et d’anacarde vers la première économie mondiale en vertu de l’accord AGOA de libre-échange.
Signe de l’inquiétude après les déclarations du candidat Trump menaçant de remettre en cause une fois élu plusieurs des accords de ce type. Mais contrairement aux accords Alena avec les voisins américains ou le Traité transatlantique, l’AGOA était absent de la campagne.
Trump va-t-il s’en prendre à l’AGOA ? Du côté de l’un des plus importants partenaires commerciaux, l’Afrique du Sud, avec 13 milliards de dollars échangés en 2015, on en doute. Car cela risque aussi de gêner les intérêts de grandes entreprises américaines implantées en Afrique.
Autre obstacle, le Congrès américain. Dominé par le camp républicain, il a reconduit l’AGOA jusqu’en 2025. Mais là encore, rien ne dit que Trump entend revenir sur l’accord. Plus inquiétante pour l’Afrique est la remise en cause répétée par Trump de l’aide au développement ou encore de l’accord mondial sur le climat.
Par:RFI