Au nombre des critiques récurrentes contre le régime du Président IBK, « l’impunité » apparait presque comme une redondance. Les lois et les procédures sont violées, les auteurs et les coupables ne sont pas sanctionnés, dit-on.
Cette situation est décrite et dénoncée, par ses adversaires comme une faiblesse de la part du régime, enfoncé dans la mauvaise gouvernance et dans une incapacité à trouver des solutions aux problèmes des Maliens. L’opinion malienne, de culture et de tradition, se désole de la rupture d’avec le bon vieux temps où le pouvoir était synonyme de l’ordre et de la discipline (fanga ye fanga ye), où le Chef inspirait et incarnait l’autorité et le respect (Fama te a fo ku e ka fo Banan kun), où les parents (Mansaw) étaient respectés, les maitres (karamokow), étaient adulés…
Les temps ont changé, la liberté et la démocratie ont été conquises, mais tout de même. Le Mali est et reste une nation de culture et de mémoire, mais par-dessus tout, une République vivant sous le règne de la loi.
Outre les réseaux sociaux où l’insolence et l’impertinence sont les seules règles, la vie politique malienne, notamment la nouvelle opposition immature et ses relais subversifs, s’est abonnée et installée dans une sorte de violence verbale entretenue par une espèce de déni de vérité, de défiance et de bravade envers l’autorité de l’Etat.
L’objectif affiché de cette stratégie suicidaire à terme étant d’affaiblir davantage et de discréditer l’Etat, dont ils pourraient demain avoir la charge. Le Pire, c’est comme si dans leur folle ambition, justement pour s’approprier de ce même Etat, il n’y avait point de place à la rétrospection.
La rétrospective
Alors s’impose à certains de regarder dans le rétroviseur ! Notamment ceux qui par hypocrisie feignent de s’émouvoir suite, disent-ils, à la « honteuse répression des manifestations pacifiques », de « ces pratiques barbares d’un autre âge », ces « restrictions imposées » qui constituent des « dérives intolérables » par le régime du Président IBK qui fait planer de « sérieuses menaces sur les libertés démocratiques fondamentales, notamment sur le droit de manifestation pacifique et la liberté d’expression ».
La chansonnette intitulée « liberté et démocratie conquises au prix du sang des martyrs », vieille d’un quart de siècle n’emballe plus grand monde. Tant elle a été galvaudée et usurpée par des imposteurs de tout acabit.
De 1992 à nos jours, la liberté et la démocratie, ont été conjuguées et ballotées et à tous les modes dans le silence et la complicité des acteurs de la démocratie. Peu parmi ceux qui s’égosillent aujourd’hui contre la dispersion ou la non autorisation des manifestations ont élevé la moindre la voix avant-hier :
-Lorsque le Premier ministre de la Transition, SE Soumana SACKO, en juin 1991, a ordonné aux Forces de l’ordre de charger et de disperser les jeunes diplômés sans emploi dont un membre du CTSP (Sidi CAMARA) à coup jets d’eau chaude, de matraque et de ceinturon ;
Lorsque le régime démocratique nouvellement installé de l’Adéma-Pasj et de tous ses partenaires des Partis signataires du Pacte Républicain (PSPR) ont empêché des citoyens libres de constituer un parti de leur choix en leur interdisant un nom et en les empêchant de se rassembler pour exprimer leurs opinions ;
-Lorsque l’Adéma-Pasj avait confisqué les idéaux de la révolution et assassiné l’espoir dans ce pays selon un célèbre Manifeste jamais contredit encore à ce jour ;
-Lorsque le président de la Transition, Amadou Toumani Touré, a dit aux manifestants venus réclamer leurs droits, qu’ils peuvent marcher jusqu’à Gao ;
-Lorsque le régime de la grande Adéma livrait chasse et réprimait avec ses « Ninja » opposants, étudiants et scolaires à coup de gazage et matraquage… et les jetait en prison par dizaines, y compris des enfants mineurs ;
-Lorsque de la grande Adéma se donnait le luxe à la tribune du parlement de profaner la mémoire des martyrs «le carré des martyrs nous appartient, c’est nous qui l’avons acheté » sous les ovations des élus abeilles ;
-Lorsque la puissante Adéma sous la houlette de Ladj Bourama et de Soumaïla CISSE, avec le compagnonnage de Modibo SIDIBE et de Tiébilé DRAME, matait et embastillait opposants et journalistes.
Ou encore, hier tout près :
-Lorsque le Général-président qualifiait l’exercice de la liberté d’expression d’opposition à sa personne et traitait les démocrates de « politicien » et de « menteurs ». Seul PPR, avait osé dire, dans les colonnes de Info-Matin, qu’il n’en était pas un.
Lorsque tournant casaque, des « démocrates sincères et des patriotes convaincus » ont tenté et suggéré à un président démocratique élu, Amadou Toumani TOURE, d’ouvrir une Transition après l’avoir fortement incité à briguer un troisième mandat.
Lorsque ces démocrates véreux condamnaient du bout des lèvres le putsch de SANOGO qu’ils avait appelé de tous leurs vœux et prenaient nuitamment rendez-vous avec l’Homme fort de Kati…
Qui sont-ils aujourd’hui à se plaindre, faire des complaintes, se lamenter, hurler dénoncer des dérives « restrictions imposées », des « dérives intolérables » de « sérieuses menaces sur les libertés démocratiques fondamentales, notamment sur le droit de manifestation pacifique et la liberté d’expression » ? Des loups qui crient aux loups ? L’autre dirait : un peu de retenue, vous avez les mains trempées dans le sang des Martyrs et votre pied a glissé dans celui de la lente agonie de notre peuple. Alors, taisez-vous !
Le bal masqué
La critique est facile, encore qu’il faut déjà se l’appliquer à soi-même. Non, la politique, au Mali, c’est un monde à part avec ses vertus et ses mœurs propres à elle. Un peu comme dans « les formules de politesse » de John Petit-Senn, c’est « un perpétuel bal masqué où les cœurs se présentent tous sous des dominos roses et riants ; c’est entre eux un continuel échange d’hypocrisie et de dissimulation ; on s’y dit tout, sauf ce qu’on pense ; on y paraît tout, sauf ce qu’on est ; le plus vertueux est celui qui y fait le moins de dupes ; le plus heureux, celui qui ne l’est pas lui-même. »
Sauf que même en politique, « tous les vices ouvrent la porte au repentir, hormis l’hypocrisie » (Jean Baptiste Say). Celle-ci « croit échapper à tous les yeux, un rayon de la vérité luit ; il perce le nuage ; l’illusion se dissipe ; le prestige s’évanouit ; le scandale seul reste, et l’on voit à nu toutes les difformités du vice grimaçant la vertu »
Ceux qui brandissent la sacralité de la liberté comme alibi et prennent comme prétexte leur restriction, au nom de la Constitution, seront-ils prêts demain à la place du Président IBK, la politisation de l’armée ?
L’adversité politique ne doit pas conduire à l’injustifiable, dans cette affaire de restriction d’une manifestation politique le 20 janvier. Ce serait ouvrir la porte à toutes les confusions possibles et imaginables. Sinon, pourquoi interdire aux militaires de faire la politique ?
Le 20 janvier 1961 marque le départ du dernier soldat français et la naissance de l’armée malienne. Elle est et doit rester dans ce cadre, strictement militaire.
En effet, le 20 janvier 1961, devant le corps diplomatique convoqué à l’occasion, le Président Modibo KEITA annonçait la création de l’Armée malienne dont l’acte de naissance avait été signé le 1er octobre 1960, huit jours après la proclamation de l’indépendance du Mali.
La célébration de cette date anniversaire constitue donc un moment privilégié de rétrospection, d’analyses approfondies et de projections en vue de la cohésion sociale et du renforcement de l’unité nationale.
En effet, à l’instar des armées de tous les pays, l’Armée malienne symbolise l’outil d’expression de l’indépendance et de la souveraineté nationale. L’Armée du Mali est et reste le principal instrument de la cohésion nationale, de garantie et de préservation de notre unité, c’est-à-dire de l’affirmation de la République, à travers toutes ses composantes.
Quincy Wright a dit : « l’État social et politique d’une nation est toujours en rapport avec la nature et la composition de ses armées ». La nôtre est nationale. Elle a, tout au long de son cheminement, comme l’a rappelé le Président de la République, rempli toujours cette fonction avec fierté, pour le bonheur des populations et de la nation maliennes.
A-t-on changé de paradigme dans notre pays pour accepter la politisation de l’armée ? L’armée nationale doit évoluer en dehors des travers et des vicissitudes politiques. Sa date anniversaire doit être un moment pour converger et un moment de communion et non de déchirements ou d’égarement.
La préservation des impératifs
Le Mali est démocratie pluraliste, depuis 26 ans qui a consacré et fait du respect qu’il fait aux droits et libertés.
Autant, l’État doit veiller à la préservation et au renforcement de ces libertés constitutionnelles, autant il est aussi de son devoir régalien de protéger et de préserver la sécurité des Maliens (fortement mise à mal plus par des cris d’orfraie des droits-de-l’hommistes que les terroristes), l’ordre public, l’État de droit, l’unité et la cohésion nationales.
Dans un pays post-crise engagé dans une implacable lutte contre le terrorisme, la préservation de ces impératifs est d’ordre constitutionnel, de même que celle de la paix sociale, de la sécurité publique, de la tranquillité et de la quiétude des Maliens.
La démocratie et l’État de droit impliquent en effet l’acceptation d’un ensemble de règles obligatoires qui permettent la vie au sein de la communauté nationale et l’organisation de la République. Sans ces règles édictées dans l’Intérêt général, la Nation ne survivra pas.
C’est pourquoi l’Ordre public doit être préservé. Il le sera sans préjudice des libertés garanties par la Constitution. L’État doit assumer !
Rétablissement sécurité ordre public État doit assumer…
Par Mohamed D. DIAWARA
Source: Info-Matin