L’ONU a frappé un grand coup vendredi en sanctionnant une cinquantaine de navires et sociétés accusés d’aider la Corée du Nord à contourner les sanctions internationales, en dépit d’une récente détente diplomatique sur le dossier nucléaire de Pyongyang.
C’est la première fois que le Conseil de sécurité, agissant à la demande des Etats-Unis, désigne une liste d’entités aussi large dans le cadre de l’embargo économique frappant la Corée du Nord, a précisé un diplomate sous couvert d’anonymat.
En 2017, à l’initiative de Washington, le Conseil de sécurité a imposé trois séries de sanctions économiques à la Corée du Nord qui touchent notamment ses exportations de charbon, de fer, sa pêche et son textile et limitent ses approvisionnements en pétrole. Ces mesures ont été décidées après des tirs de missiles et un essai nucléaire menés par Pyongyang, jugés menaçants pour la stabilité internationale.
Au total, 15 navires et pétroliers nord-coréens voient leurs avoirs gelés et 13 d’entre eux sont aussi interdits d’entrée dans les ports du monde entier.
Douze autres bateaux battant pavillon étranger, voient également leurs avoirs gelés et sont interdits d’entrée dans les ports internationaux, selon un document obtenu par l’AFP.
L’ONU gèle par ailleurs les avoirs mondiaux de 21 compagnies maritimes et d’import-export, dont trois basées à Hong Kong et notamment Huaxin Shipping, qui a livré du charbon nord-coréen au Vietnam en octobre 2017.
Deux autres sociétés chinoises – Shanghai Dongfeng Shipping et Weihai World Shipping Freight – sont aussi accusées d’avoir fait transporter sur leurs navires du charbon nord-coréen.
Douze sociétés nord-coréennes sont accusées d’être impliquées dans des livraisons frauduleuses de pétrole et de carburant.
Les autres compagnies sont basées à Singapour, dans les îles Samoa et les îles Marshall, et au Panama.
– “Marchés lucratifs” –
Un homme d’affaires, Tsang Yung Yuan, est frappé d’une interdiction de voyager et d’un gel de ses avoirs pour avoir organisé des livraisons illégales de charbon depuis la Corée du Nord, avec la complicité d’un intermédiaire nord-coréen basé en Russie.
Les sanctions ont été approuvées dans un contexte de rapprochement prudent entre la Corée du Nord et les Etats-Unis, d’une part, et la Corée du Sud d’autre part, après plusieurs mois d’escalade des tensions.
Le président américain Donald Trump a accepté le principe d’une rencontre inédite avec le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un, qui devrait se tenir d’ici fin mai, faisant naître l’espoir d’une issue diplomatique à la crise nucléaire.
Un rarissime sommet intercoréen doit également se tenir le 27 avril à la frontière des deux Corées, après une visite surprise de Kim Jong Un cette semaine en Chine.
Mais Washington insiste sur un maintien des sanctions jusqu’à ce que de réels progrès soient enregistrés dans les tractations en vue du démantèlement du programme d’armes nucléaires de Pyongyang.
Un rapport des experts de l’ONU chargés des sanctions contre la Corée du Nord publié en mars indiquait que l’adoption entre fin 2016 et 2017 de quatre trains de sanctions a fait émerger des “marchés lucratifs” pour des trafiquants cherchant à fournir du pétrole à Pyongyang et à lui faire exporter ses ressources naturelles.
Selon le rapport, la Corée du Nord a exporté entre janvier et septembre 2017 des produits interdits, notamment du charbon, générant des revenus estimés à près de 200 millions de dollars.
Il évoque des pavillons de navire trompeurs, des transferts en mer de produits illicites entre navires et de la documentation frauduleuse destinée à masquer l’origine du charbon.
Pour s’approvisionner en pétrole, le régime reclus utilise différents canaux, en s’appuyant sur des étrangers, des entreprises étrangères et sur le système bancaire international.
Les Etats-Unis avaient initialement proposé de sanctionner 33 navires et 27 sociétés, mais la Chine avait suspendu la demande afin d’avoir “plus de temps” pour enquêter.
Pékin est le premier partenaire économique de la Corée du Nord mais soutient les sanctions économiques de l’ONU.
AFP