Notre pays est le seul dans la sous-région à avoir un nombre élevé de centrales syndicales. Malgré cette pléthore de syndicats, les travailleurs de la fonction publique et du secteur privé broient du fer à cause des conditions de vie et de travail. Les syndicalistes sensés défendre leur intérêts semblent gagner plus dans les mots d’ordres de grèves que les militants. Les multiples séances de négociations autour des mêmes points de revendications en témoignent. Les préavis de grèves sont-ils devenus des fonds de commerce pour les syndicalistes ?
La grève par définition étendue est une entente, un accord des salariés d’une usine, d’une entreprise, d’une profession, pour cesser leur travail jusqu’à ce qu’ils aient obtenu une augmentation de salaire ou certains autres avantages. Les maliens dans leur grande majorité ont constaté avec amertume que les négociations entre l’Union National des Travailleurs du Mali (UNTM) et le gouvernement n’ont pas donné d’issu. Toute chose qui a conduit au mouvement d’arrêt de travail des syndiqués, les 9, 10 et 11 janvier 2019.
La grève est, certes, un droit fondamental consacré par la constitution de la République du Mali. Mais dans un pays traversant une crise sociopolitique et sécuritaire, aller en grève de 72 heures n’impacte-t-il pas négativement la volonté des plus hautes autorités d’organiser un forum social annoncé pour laquelle occasion une nouvelle grille salariale a été proposée par le gouvernement pour 2019 ?
Yacouba Katilé, secrétaire général de la plus grande centrale syndicale au Mali, en l’occurrence l’UNTM, disait lors d’une de ses dernières sorties :« C’est face au mépris du gouvernement vis-à-vis de l’UNTM que nous sommes allés en grève de 72 heures ».Dans ce discours, nous constatons qu’il s’agit plutôt d’une question d’orgueil que la recherche d’un compromis quand il s’agit de comprendre que ce dernier préavis de la centrale est l’un des plus contestés et boycottés de son existence.
Dikson Authentik, un jeune mathématicien, informaticien, écrivain et slammeur, disait : « Nous devons réfléchir et essayer de mettre en place un système de grève qui nuit aux dirigeants et non à la population ».
La récente grève a été globalement suivie sur l’ensemble du territoire, à l’exception de certains services centraux de Bamako. Avant de faire un tour d’horizon de l’ensemble des services et syndicats affiliés à la Centrale, son chef annonçait déjà à la presse que le mot d’ordre a été respecté par la majorité des travailleurs avant de narguer ses détracteurs que leur souhait n’a pas été exaucé. Il a poursuivi que les 13 syndicats affiliés à la centrale ont suivi le mot d’ordre à l’exception de certains du SYNTADE qui ont fait des déclarations pour saboter la grève. Pour clore, il a dénoncé l’attitude du ministre du travail qui, selon lui, est dans une logique de diviser pour mieux régner, en recevant un militant sanctionné de toutes les instances du SYNTADE.
Le pays a été certes paralysé pendant 72 heures mais il nous est parvenu que bien de services et ou structures n’ont pas suivi le préavis. Il s’agit de : une partie de la douane, les impôts, la police nationale, l’EDM, la SOMAGEP, la SOMAPEP, une grande partie des agents de santé, des magistrats et greffiers, une bonne partie de la CMSS, plusieurs banques de la place, certains transporteurs, le secteur des mines et bien d’autres syndicats.
Pourquoi tant de bisbilles entre les travailleurs et le gouvernement ? Notre pays est au bord de l’implosion si nous n’abandonnons pas les considérations rétrogrades. Il convient de s’accorder sur l’urgence et de se réinventer notre fibre humaine ou patriotique, de redéfinir de nouveaux contrats sociaux, de panser certaines de nos valeurs sociétales.
Aux syndicats de toutes les centrales, nous en appelons à la fibre patriotique au regard du contexte difficile du pays afin de contribuer à l’apaisement du climat social déjà délétère. Cela pour le bonheur des maliens.
Quant au gouvernement, il doit engager un dialogue franc avec tous les syndicats afin de trouver une issue heureuse aux différentes négociations. Le forum social initié par le gouvernement devrait être un créneau à saisir pour jeter les bases d’un satisfecit pour tous les travailleurs.
Par IKC
Source: LE RAYON