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Mali : Zone aéroportuaire de Bamako : Etat, où es-tu?

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Y a-t-il encore un Etat au Mali ? Cette question vaut son pesant d’or au regard de ce qui passe présentement dans la zone aéroportuaire de Bamako. Aujourd’hui, tout le monde est indifférent à ce qui arrive dans cette zone, devenue le nouvel eldorado des grands escrocs de la République, sous le couvert de spéculateurs fonciers.

Le constat est horrible et révoltant. De jour comme de nuit, on assiste à des morcèlements de parcelles à usage d’habitation qui s’opèrent dans cette zone pourtant interdite à toute construction. En effet, en avril 1995, sous le régime du Président Alpha Oumar Konaré, cette zone sur laquelle des pauvres s’étaient installés a été entièrement démolie, déguerpie, au motif qu’elle relevait de la zone aéroportuaire.

Tous les Maliens ont été témoins de ces moments de douleur et de bouleversement en Commune VI du district de Bamako. Des familles entières ont été obligées d’abandonner Bamako, d’autres ont été disloquées. Ceux qui sont retournés dans leurs villages gardent encore les séquelles de cet effondrement social.

Aujourd’hui, cette zone est devenue, sous les yeux des autorités de notre pays, le nouvel eldorado des spéculateurs fonciers qui y ont élu domicile. Des parcelles sont attribuées sous la ligne à haute tension d’Energie du Mali.

Comment comprendre l’indifférence de l’Etat face à cette situation ? D’autant que, selon des personnes que nous avons rencontrées sur le terrain, «cette zone a été démolie alorsqu’IBK était Premier ministre». Elles assistent hagardes au fait qu’aujourd’hui des gens sont en train d’attribuer des parcelles à usage d’habitation dans la même zone alors qu’il est Président de la République. «C’est l’incompréhension totale ici. On ne comprend pas comment cela puisse arriver dans notre pays», nous indique un mécanicien, qui a son garage auto dans la zone.

Ce qu’il faut savoir, selon des informations que nous avons reçues sur le terrain, c’est qu’à la tête de cette mafia se trouvent certains propriétaires terriens de la grande famille Touré de Faladiè, manipulés par un certain Mama Traoré, qui se dit être un envoyé du Maire du District. Sur le banc des accusés figurent le chef de quartier de Faladiè, Madou Touré, le chef de quartier de Banankabougou, Mafing Traoré, un élu communal du nom de Lassina Cissé, Babourama Touré dit Rechero, petit frère du chef de quartier de Faladiè, Sidi Touré dit Vieux, Bani Touré. Selon nos informations c’est Sidi Touré qui serait le chef d’orchestre. Sur la question, nous avons tenté de le joindre. En vain. Nous lui avons même laissé un message, en déclinant notre identité, sans succès.

D’après nos investigations, dans leurs forfaits, les expatriés sont les premières victimes. La même parcelle est vendue à plus de 3 à 5 personnes. Où est le sérieux dans cette affaire ? En effet, selon un témoin oculaire, Cheick Oumar Touré, que nous avons rencontré sur les lieux, l’espace entre la zone aéroportuaire et Faladiè a été morcelé dans les conditions douteuses. Selon lui, plusieurs parcelles ont été attribuées à des personnes différentes. Ce qui fait que personne n’arrive à construire dans ledit espace. Est-ce à dire que l’Etat n’est pas au courant de ce qui se passe?

Des précisions de taille

Cheick Oumar Touré, installé dans la zone depuis 1973, et qui a tous ses documents authentiques, explique que cette affaire est assez simple. Selon lui, toutes les terres appartiennent à l’Etat, et c’est à lui de décider d’en faire ce qu’il veut. Toujours selon lui, quand ces spéculateurs sont venus le voir, il a refusé de pactiser avec eux. Sur la situation, il a tenu à donner des précisions.

«Cette distribution est douteuse. Pour mémoire, la zone a été partagée entre les deux grandes familles Touré (celle d’en ville et celle de Faladiè). L’autre côté du goudron, vers le marché d’alocos, a été donné à Faladiè et l’autre partie à l’autre famille. Les Touré de Faladiè ont vendu toutes leurs parts et maintenant ils ont traversé le goudron pour venir chez nous.

Quand ils venus me voir, je leur ai dit que je n’étais pas d’accord avec cette façon de faire. En ce qui me concerne, j’attends les autorités de mon pays. Le jour où les autorités viendront me voir pour notre domaine, je m’en remettrai à elles, dans les règles de l’art. Tout ce désordre n’aurait pas dû arriver. J’ai toujours dit que cette maison ne m’appartient pas. C’est un héritage familial.

Ce qui se passe dans cette zone ne se fait pas honneur à notre pays. C’est parce qu’il n’y a pas d’autorité de l’Etat qu’ils agissent de la sorte. Je me demande pourquoi le peuple a accepté de donner le pouvoir aux politiciens. Je me rappelle qu’après l’opération de démolition et de déguerpissement de la zone, en 1995, le Président Alpha Oumar Konaré l’avait regretté. Je l’ai vu un jour.Il est venu voir l’immensité des dégâts, il a remué la tête et il est parti. 

Aucun Président de la République n’a eu de la pitié pour les Maliens plus que le Président Moussa Traoré. Aucun de ses successeurs ne peut regarder Moussa dans ses yeux aujourd’hui. Il vaut mieux que tous ces politiciens. Tout ce qu’il a dit sur le Mali est en train de se passer, comme dans un film. Si Moussa était là, la guerre du Nord n’aurait jamais eu lieu. Si ça ne tenait qu’à moi,on allait laisser la gestion du pouvoir aux militaires. Il y a toujours des hommes valables. Le Mali est devenu un pâturage pour toutes sortes de bêtes. Les Maliens devraient tous préférer mourir que de continuer à vivre cette humiliation».

Le mal étant connu, l’Etat, à travers qui de droit, doit se racheter pour que justice soit faite. Si rien n’est fait, cet espace dit zone aéroportuaire sera anéanti à jamais,pour le plus grand malheur des populations les moins nanties. Il vaut mieux agir maintenant,plutôt que de revenir démolir des maisons dans quelque temps.

Youssouf Diallo

Source : La Lettre du Peuple

 

 

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