Suite à l’attaque d’Ogossagou du 23 mars 2019, l’Assemblée nationale du Mali a tenu une plénière d’interpellation du gouvernement sur la situation sécuritaire. C’est le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le général de division Salif Traoré, qui a représenté le gouvernement.
«Tout ce qui a été investi dans la loi de programmation militaire n’a rien servi, parce que nos militaires ont été attaqués et surpris à Dioura. Des civils sont la cible d’hommes armés identifiés. À quoi ont servi les multiples financements de la loi de programmation militaire ?» s’interroge Diallo Aissata Cissé, députée du Rassemblement pour le Mali (RPM).
Avant d’enfoncer le clou : «Nous voulons la démission du Premier ministre parce que c’est lui qui est venu dire ici qu’il va désarmer toutes les milices d’ici le 31 janvier 2019. Il a été incapable de le faire, il doit démissionner parce que le pays ne se limite pas à lui seul. Rien ne va dans ce pays : l’école, la santé. Des grèves partout au Mali, ça ne va pas. Nous devrons faire une motion de censure contre ce gouvernement.»
«Il faut qu’on mette les choses dans leur contexte, nous sommes en guerre depuis 2012. Donc à défaut du Premier ministre c’est le ministre de la défense qui devrait venir nous répondre. Que faut-il faire face à la situation actuelle ? Le pays va mal, l’insécurité s’est généralisée, les conflits communautaires et les amalgames aussi», déclare soutient Dr. Kalilou Samaké de l’opposition. «La série noire continue après Aguel Hoc, Soumpi, Nampala, Dioura, Kouloungo et Ogossagou, va-t-on continuer comme ça ? Qui tue, monsieur le ministre, nous voulons savoir», demande Alkedy Mahamoud Touré de l’opposition.
De fait, certains députés ont fait parler leur cœur en parlant au nom des Peulhs ou des Dogons. Le président de l’Assemblée nationale Issaka Sidibé a dû faire un rappel : «Je vous comprends parfaitement mais l’Assemblée nationale n’est pas le lieu de faire parler son cœur, ou de défendre sa communauté ou son ethnie. Pas de nous, nous sommes des Maliens. Je vous demande d’arrêter de parler au nom d’une communauté.»
Prenant la parole, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le général de division Salif Traoré, a donné des réponses. «Je comprends vos réactions et questionnements, j’ai aussi le cœur meurtri comme vous, honorables députés. Parce que le bilan des trois derniers mois n’est pas du tout bon. Il y a 440 civils et 150 militaires (FAMA, Barkhane, Minusma) qui ont été tués entre janvier, février et mars 2019», selon le ministre de la Sécurité, le général de division Salif Traoré.
«Nous avons plus de 15000 hommes déployés sur le terrain, il y a des camps dans une quinzaine de localités. Aucun officiel n’accuse Dan Nan Ambassagou. Nous avons retiré le récépissé d’une association qui a dévié de ses missions initiales. Le gouvernement ne fait rien que trouver des voies et moyens pour une amélioration de la situation sur le terrain», soutient le ministre Salif Traoré.
«Le gouvernement n’a donné aucune autorisation de port d’arme à une milice, c’est pourquoi nous allons désarmer toutes les milices. Une vaste opération est en cours sur le terrain. Nous sommes en train de travailler avec des pays voisins parce que la question est internationale. Mais avant, nous allons désarmer tous les détenteurs d’armes», ajoute le général Salif Traoré.
«Nous sommes ouverts à toutes les propositions pour une sortie de crise»
Pour lui, «l’enquête est ouverte, les enquêteurs sont sur le terrain. L’interrogation des suspects est en cours. Je ne peux pas dire plus mais c’est une commission d’enquête nationale appuyée par des partenaires. Et les résultats de cette enquête seront connus de tous».
Pour le général Salif Traoré, «Nous allons renforcer notre présence au centre du pays, mais actuellement rien ne peut se faire sans les populations. C’est pourquoi il y aura des aides pour les déplacés, accompagnées des missions de sécurisation sur l’ensemble du terroir».
À la fin de la session d’interpellation, l’Assemblée nationale a adopté une série de recommandations lues par l’honorable Karim Keita, président de la commission de la défense nationale. L’Assemblée nationale : «Condamne avec la plus grande fermeté le massacre des populations civiles survenu à 0gossagou le 23 mars dernier, exprime sa très vive préoccupation face à la situation sécuritaire, qui ne cesse de se dégrader notamment dans les parties du nord et le centre du territoire national comme en témoignent les attaques perpétrées à Dioura et dans le village d’Ogossagou dans le cercle de Bankass dont les victimes se comptent par centaines.
Présente ses condoléances émues aux familles de l’ensemble de la crise et souhaite un prompt rétablissement aux blessés… Prend acte des mesures adoptées par le gouvernement lors du conseil des ministres extraordinaire du 24 mars 2019. Invite le gouvernement à faire toute la lumière sur les circonstances de tous ces massacres pour en identifier les auteurs, à engager contre eux des poursuites devant les juridictions compétentes et apporter aux survivants l’assistance nécessaire».
Sur le terrain à Mopti, le gouverneur a fait le point de la situation de l’attaque. «Les enquêteurs sont sur le terrain, l’interrogation des suspects a commencé. Le bilan est de 157 morts et 65 blessés à ce jour», déclare Sidi Alassane Touré.
Kassim TRAORE
Le Reporter