La mission d’enquête onusienne déployée à Ogossagou du 25 au 29 mars, soit immédiatement après les tueries du 23 mars 2019, au cours desquelles 157 personnes ont péri, a rendu public ses conclusions préliminaires. L’objet de cette mission comprenait quatre points : « établir les faits, examiner les circonstances et l’envergure de l’attaque, identifier les auteurs et situer les responsabilités des acteurs impliqués », indique Guillaume Ngefa, Directeur de la Division des Droits de l’Homme et de la Protection de la Minusma et Représentant du Haut-commissaire des Nations-Unies aux droits de l’Homme. Cette mission onusienne, en tout cas à ce niveau des conclusions préliminaires, n’a pas réussi à identifier les auteurs, pas plus qu’il s’agissait d’un « groupe composé d’au moins une centaine d’hommes armés, identifiés comme des chasseurs traditionnels (dozos) et accompagnés par une dizaine d’hommes en tenue militaire et d’autres en tenue civile », sans précision sur leur provenance et leur destination. La mission a cependant décrit les faits, les circonstances et l’envergure de l’attaque, et donné des indications sur les responsabilités des acteurs impliqués. En concluant que les assaillants (groupe d’hommes armés) ont mené « une attaque planifiée, organisée et coordonnée sur la partie peule du village d’Ogossagou », la mission onusienne appelle sans ambages la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) et indexe les auteurs de ces évènements abominables comme d’éventuels potentiels justiciables devant l’éternelle Fatou Bensouda, Procureure générale de la CPI. La description du contexte des graves atteintes aux droits de l’homme finit de nous en convaincre : « L’attaque planifiée, organisée, et coordonnée sur la partie peule du village d’Ogossagou s’inscrivait dans un contexte de nombreuses autres attaques similaires par des groupes de chasseurs traditionnels, à l’encontre des populations peules ». La mission d’enquête spéciale sur les graves atteintes aux droits de l’homme commis à Ogossagou le 23 mars 2019, enfonce le clou dans ses conclusions préliminaires : « Malgré son ampleur, cet incident n’est pas isolé mais s’inscrit dans un contexte d’accentuation progressive des violences sur fond de tensions communautaires dans la région de Mopti, où des groupes d’auto-défense communautaire, possédant des armes de guerre, continuent d’agir en toute impunité. Dans le seul cercle de Bankass, plus de 37 cas d’atteintes aux droits de l’homme ayant causé la mort d’au moins 115 personnes, sont attribuables à ces groupes depuis novembre 2018, y compris lors des attaques perpétrées par des groupes de chasseurs traditionnels à l’encontre de civils, dans les parties peules des villages de Koulogon, Minima Maoudé ou encore Libé, entre janvier et février 2019 ». Le statut de Rome de la CPI établit les compétences de la Cour sur les 4 types de crimes : le crime de génocide ; les crimes contre l’humanité ; les crimes de guerre ; et le crime d’agression. Son article 7 élucide sur le crime contre l’humanité et énumère des actes susceptibles, « lorsqu’il est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en connaissance de cette Attaque ». Et si le procureur malien du pôle spécialisé de la lutte contre le terrorisme et la criminalité, Boubacar Sidiki Samaké essayait d’anticiper un peu, pour valoriser les compétences de la justice malienne ?
B. Daou
Le Réublicain