Le Mali accorde 22 % de ses ressources budgétaires à la reconstruction et le rééquipement de son armée. “Insuffisant”, selon le président et de la République, Ibrahim Boubacar Keita, qui, dans une interview accordée à Jeune Afrique dans son dernier numéro, a rappelé le contexte difficile de la situation sur le terrain et que la “défense du Mali, est aussi la défense de l’Europe“. Il espère sur le soutien “réel“ des alliés, sans “promesses non tenues“, pour reconstruire, au plus vite, les FAma. Il se dit prêt à dialogue avec Amadou Kouffa, pas avec Iyad Ag Ghali
Dans cette première grande interview accordée à un media après sa réélection en 2018, le président IBK est revenu sur les sujets brulants du moment. Sans détours, il évoque la situation sécuritaire du pays : le terrorisme, les violences intercommunautaires, les questions sociales, le dialogue politique… Il dit tout, propose et se montre, de nouveau, prêt à accepter tous compromis, qui ne “favorise pas l’impunité”, pour sauver le Mali.
Fièrement, le président Keita rappelle que le Mali n’est pas “un pays à genoux”, mais plutôt “un pays important” qui se bat pour sa “souveraineté” et qui défend, par ricochet “l’Europe”.
Le combat est complexe, ardu et requiert beaucoup de moyens. C’est pourquoi, insiste IBK, “nos alliés doivent comprendre que, au Mali, c’est aussi l’Europe que nous défendons”. Nonobstant, il rappelle : “notre réhabilitation en tant que nation et en tant qu’Etat ne dépend que de nous seuls, au-delà de l’aide que des pays amis peuvent nous apporter. Ensuite, convaincre ces derniers de cesser de nous égarer par des promesses non tenues : il faut reconstruire et équiper notre armée de toute urgence. Nous consacrons à la sécurité 22 % de nos ressources budgétaires, nous ne pouvons aller au-delà sans réduire en deçà de la tolérance nos dépenses sociales, donc sans assistance extérieure”, précisant que “notre sécurité révèle de nous et de notre souveraineté, de notre dignité”.
Sur le caractère communautaire de la crise du centre, il répond sèchement : “il n’y a pas de tribut au Mali, mais des ethnies qui, en particulier dans le centre, cohabitent depuis des siècles de façon apaisée avec des codes établis de règlement de conflits… Les violences et les clivages auxquels nous assistons sont une excroissance, une contagion de ce qui s’est passé dans le nord au cours de la dernière décennie”. Il analyse : “dans le cadre de leur projet expansionniste et hégémonique, les terroristes djihadistes ont mis à profit les failles et les faiblesses du maillage administratif pour s’insinuer et propager un discours exclusif de haine, le tout sous couvert de la religion. Si l’Etat n’est pas présent dans chaque village, les mosquées, elles, sont partout”.
Malgré tout, IBK, dans son ambition de remettre le pays sur les rails, n’exclut pas un dialogue avec le terroriste Amadou Kouffa, mais pas avec Iyad Ag Ghali. Il estime qu’il n’y a aucune base qui laisse entrevoir la possibilité d’une négociation avec ce dernier qui, rappelle-t-il, “exige l’application de la charia, l’interdiction de l’école républicaine et moderne, le califat, la fin de toutes les valeurs qui fondent notre vivre-ensemble. Nous n’avons rien à nous dire”.
Sur d’autres points, IBK est revenu sur les efforts dans la promotion de la justice, le départ de son ancien PM, Soumeylou B. Maïga, le dialogue national inclusif en préparation, les efforts pour doter l’armée de l’air en transport aérien, etc.
Sory I. Konaté
Mali Tribune