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À Nioro du Sahel : l’Etat s’écrase !

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Dire que, dans notre pays, la religion (à tout le moins les leaders religieux musulmans) en impose à l’Etat, n’est qu’une lapalissade. Au Mali, désormais, et ce, depuis qu’IBK en a donné le ton, c’est à l’horloge religieuse que tous se réfèrent pour prendre telle ou telle décision.

Chaque ministre, chaque président, tous ceux qui ont une parcelle d’autorité ont leurs «petits» marabouts et ceux-ci s’en donnent à cœur joie. Au point que l’Etat a foutu le camp, petit à petit, au profit des mosquées et autres lieux de prêche et domiciles de prêcheurs.

L’image peut faire l’affiche d’un film avec pour titre : «le marabout et ses talibés». La voilà illustrée : le Chérif de Nioro, assis au centre, en véritable patron et chef de famille, exprimant un certain triomphalisme sur l’Etat tout entier ; à côté de lui, le Premier ministre, ministre de l’Economie et des Finances assis, sagement, comme un fils que l’on vient de sermonner, ou que l’on vient de mettre en garde de manière ferme.

Le ministre de la Défense, en tenue militaire, sans ses rangers, décoiffé et désarmé, ressemblant à quelqu’un qui vient de faire allégeance à un mentor ; assis à même le sol, le ministre de l’Administration et le ministre des Affaires étrangères et son désormais sourire légendaire (depuis qu’il est ministre il ne fait que rire).

La posture de ce dernier est des plus ridicules : il se tient assis, à terre, aux pieds du Chérif de Nioro, tel l’élève coranique qui vient de revoir son maître après plusieurs années d’absence.

L’image aurait été risible, totalement risible, s’il ne s’agissait pas de celle du Premier ministre, ministre de l’Economie et des Finances, et de trois chefs de départements ministériels se tenant dans une position des plus petites (à travers eux l’Etat tout entier) autour d’un homme qui, malgré tout le respect que nous lui devons et que nous avons pour lui, ne tient aucun rôle officiel dans l’architecture administrative et institutionnelle nationale.

En tout cas, si c’était pour s’attirer les faveurs du Chérif, pour ce qui concerne le futur référendum (et c’est apparemment le cas), c’est un échec total. Le résultat est nul. Le patron spirituel de Boubou, d’IBK et de l’ensemble du gouvernement a dit, une nouvelle fois, son refus de soutenir tout changement de constitution et a d’ailleurs mis en garde le Premier ministre contre toute tentative d’organisation du référendum. Alors, à quoi bon s’aplatir de la sorte ?

Cette visite, faut-il le rappeler, n’est pas une première et, encore moins, la seule au cours de laquelle l’Etat s’est «écrasé» en face du Chérif de Nioro. On se souvient, il y a de cela quelques semaines, c’est le président de la République, en personne, qui s’était déplacé pour aller implorer le pardon du Chérif ; tout cela appuyé par quelques gouttes de larmes pour marquer sa sincérité à celui qu’il appelle, on ignore pourquoi, «mon père».

Moussa Touré

SourceNouvelle Libération

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