Tout ne semble pas encore acquis pour la réussite escomptée du dialogue politique inclusif en cours de préparation. Si le Pouvoir en place l’annonce porteuse des médicaments aux maux qui rongent le pays, l’ancien Premier Ministre Modibo Sidibé et son groupement politique pensent autrement. Dans une analyse rendue publique le lundi dernier, le leader du parti Fare-Ankawuli expose son caractère réducteur par le contenu, par les acteurs et par la portée d’où l’exigence, selon lui, d’aller vers un dialogue national inclusif.
Notre pays, le Mali, traverse actuellement la crise la plus grave, la plus profonde et la plus dangereuse de son Histoire contemporaine. Une crise menaçant l’existence même de la Nation dans son ensemble. Une situation née de l’incapacité des pouvoirs publics à mettre fin à toutes les formes d’insécurité qui se généralisent et aux affrontements meurtriers mettant en péril l’Unité nationale et le vivre ensemble multiséculaire des diverses communautés maliennes. L’Accord pour la paix et la Réconciliation nationale issu du processus d’Alger qui a été paraphé depuis 2015 peine à enclencher la phase de stabilisation escomptée.
Des faits troublants qui ont conduit à l’idée que seule une solution politique basée sur le principe d’un processus endogène de sortie de crise pourra nous permettre de relever les défis majeurs qui mettent en cause l’Unité nationale, la cohésion sociale et le développement du pays. Mais, avec quelle aventure ? La confusion est là ! Côté Régime en place et une frange importante de l’opposition, le dialogue politique inclusif sera une tribune prométhéenne et salvatrice. D’où l’accalmie depuis la signature de l’Accord du 2 mai 2019 ayant conduit à la mise en place du présent Gouvernement dit de mission conduit par le Technocrate Dr. Boubou Cissé. Mais sur l’autre bord de la rive, d’autres groupements de partis politiques se réservent et se montrent pessimistes avec le DPI.
Un constat qui se matérialise avec la position exprimée par l’ancien Premier Ministre Modibo Sidibé. Position exposée dans une note rendue publique ce lundi dans l’après-midi. «Seul un dialogue national inclusif permettra aux Maliens de se parler et de convenir ensemble des solutions consensuelles aux principaux défis de la Nation et engager les réformes institutionnelles, politiques, économiques et sociales indispensables à notre sécurité et à notre développement… », lit-on dans la déclaration de Modibo Sidibé.
Qu’est- ce que le Dialogue National Inclusif
Différent du dialogue politique qui, selon le Chef du parti FARE-Ankawuli, est réducteur , le dialogue national inclusif sera un facteur qui replace le Peuple au cœur du processus de sortie de crise en redonnant aux Maliens et Maliennes cette chance historique de se parler, de faire le point et de dire ce qu’ils veulent construire ensemble pour leur pays en tant que Nation. «Le Dialogue National Inclusif, comme appellation du Rassemblement des Maliens voulu par un grand nombre d’acteurs, prend en compte toutes les dimensions du Mali en crise, la globalité, la profondeur de la crise, toutes les communautés, toutes les forces, mobilise tous les citoyens de l’intérieur comme de l’extérieur et se veut le conducteur pertinent pour une véritable
Union sacrée…Le Dialogue National Inclusif est, donc, différent du ‘‘dialogue politique inclusif’’ , qui est réducteur par le contenu, par les acteurs et par la portée », explique-t-il avant d’enchainer que l’Accord de gouvernance de mai 2019 qui est à la base de cette aventure est «tout sauf inclusif», mais qui met en scène «une partie seulement des forces politiques, se focalise sur le projet de révision constitutionnelle, réaffirme l’Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus d’Alger (APR), fige à l’avance la gestion des conclusions dudit dialogue et, en contradiction avec l’annonce du Président de la République, il traduit une volonté de main mise gouvernementale sur le processus de dialogue».
Comment ?Autonome et souverain, le Dialogue National Inclusif prôné par Modibo Sidibé est, selon lui, un processus national, endogène, dans le respect de la légalité républicaine et sans interférence extérieure. Toute exigence qui semble le revers de l’aventure déclenchée vu que le Président IBK, dans son discours du 16 avril 2019 à l’adresse de la Nation, a esquissé un mandat du dialogue, mais « il n’a pas enclenché le processus participatif en conviant une rencontre des forces politiques et sociales en vue de convenir du format du dialogue en raison de la profondeur de la crise, étayer le mandat du Président et consacrer ainsi une appropriation du processus », déplore l’Homme au calme olympien avant d’enchainer que cette rencontre des forces politiques et sociales aurait proposé les mesures de nature à créer un changement radical de gouvernance, un climat d’apaisement sur les fronts sécuritaire, politique, économique et social, redonner un sentiment de confiance mutuelle. «Au lieu de cela, le Gouvernement et le Chef de l’État, en décidant de manière unilatérale du format, du contenu et des personnalités devant conduire le
dialogue inclusif, fragilisent la légitimité du processus et le prive du terreau mobilisateur que constituent l’apaisement et le sentiment de confiance mutuelle».
En somme, on peut affirmer sans risque de se tromper que l’ancien Premier Ministre prédit une perte de temps si, toutefois, on ne va vers le Dialogue National Inclusif réel qui est un processus ascendant, du local au national, de la base au sommet et qui doit, au regard des participants, recourir à la notion de Délégués plus que de Représentants.
Seydou Konaté
LE COMBAT