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Terrorisme au Mali : “L’union nationale est la seule réponse” (ministre)

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Au centre du Mali, une semaine après l’attaque des camps militaires de Boulkessy et Mondoro, le bilan passe à quarante morts. Pour le ministre malien des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, la seule réponse est l’union nationale.

RFI : Quelle est votre réaction après l’attaque meurtrière de Boulkessi il y a une semaine ?

Tiébilé Dramé : Que c’est une étape supplémentaire de la guerre que mène le terrorisme international contre le Mali et contre les pays du Sahel et que cette attaque a été perpétrée par les succursales sahéliennes de l’État islamique et que, face à un tel évènement d’une telle gravité, la réponse doit être l’union nationale. Ce pays a besoin d’être rassemblé autour de nos forces armées et de sécurité, devant le sacrifice desquelles je m’incline à l’instar de tout le peuple malien.

On parle de la destruction de nombreux véhicules, et même de deux hélicoptères ?

J’ai vu dans la presse, en France, ici, que deux hélicoptères ont été détruits par les jihadistes, c’est une information qui est fausse, je la démens formellement, il n’y a pas eu d’hélicoptère détruit à Boulkessi. Toutes les leçons seront tirées de cette attaque complexe, et qui montre encore une fois le lien qui existe entre la crise du nord du Mali et la crise du centre du Mali. C’est un lien de gémellité, on voit très bien, que ce soit Ansarul Islam ou l’Etat islamique dans le Gourma, au sud du fleuve Niger, qu’il y a une alliance opérationnelle évidente, et l’État islamique dans le Gourma est dirigé par les chefs terroristes qui ont précisément écumé la région de Gao pendant l’occupation [de 2012 – 2013].

Donc pour vous, l’attaque de Boulkessi est le produit d’une alliance entre Ansarul Islam de Jafar Dicko et l’État islamique dans le Gourma de Abdoul Hakim Sahraoui ?

L’état-major de la force conjointe du G5 Sahel a très vite pointé du doigt la responsabilité de Ansarul Islam, mais tout le monde sait que Ansarul Islam opère avec l’État islamique dans le Gourma, qui est dirigé comme vous le dites par Abdoul Hakim Sahraoui. Abdoul Hakim Sahraoui était le chef de Gao occupée, et il a laissé à Gao des traces indélébiles, tout le monde connait ce seigneur de guerre terroriste à Gao [dans un communiqué, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans, lié à Al-Qaida, vient de revendiquer l’attaque de Boulkessi].

Mercredi, dernier après l’attaque de Boulkessi, les femmes de militaires ont manifesté à Bamako, est-ce que ce n’est pas inquiétant pour l’avenir ?

Je pense que l’émotion des familles des militaires morts au front pour le Mali est compréhensible, mais en même temps, nous devons savoir que ce n’est pas le moment de la division, ce n’est pas le moment de la dispersion, ce n’est pas le moment des critiques qui ne sont pas indiquées. Si notre réponse n’est pas l’union nationale, nous risquons gros.

Ce dimanche, le président Ibrahim Boubacar Keita a déclaré qu’aucun putsch militaire ne prévaudra au Mali, cela n’est pas à l’ordre du jour, a-t-il dit. Mais le scénario de 2012, c’est-à-dire la défaite d’Aguelhok puis le coup de force de Bamako, est-ce que ce scénario ne risque pas de donner des idées à certains ?

Au regard de la constitution malienne, le coup d’État est un crime imprescriptible, le président a raison de rappeler cela, il faut savoir qu’un coup d’État ne sera pas accepté ni au Mali ni ailleurs en Afrique de l’Ouest, la Cédéao ne l’acceptera pas et sur ce point-là elle ne blague pas.

Il n’y a pas d’inquiétudes tout de même ?

Ecoutez, il n’y a pas de raison de ne pas prendre la mesure de tout ce qui se passe dans le pays, cela ne doit pas empêcher d’avoir des positions de principes fermes, et sur ce point-là, les forces démocratiques de ce pays ne doivent pas être prises en défaut.

Donc des précautions sont prises ?

Le président est le chef des armées, il s’est exprimé sur le sujet, il a raison au regard de la Constitution, il a raison au regard des instruments sous régionaux, sur la Cédéao, sur ces sujets…

Il y a le centre du Mali et puis il y a le nord du Mali. Le mois dernier, c’était à Bamako, le président du Niger Mahamadou Issoufou a dénoncé le statut de Kidal qui, à ses yeux, est une menace contre son propre pays, il a pointé les responsabilités de plusieurs notables touaregs de la ville de Kidal, notamment le frère de l’Amenokal, dans les attaques de ces derniers mois au Niger, qu’en pensez-vous ?

Je pense que le gouvernement du Mali s’efforce de calmer le jeu par rapport à la question de Kidal, tout le monde a conscience que la situation actuelle à Kidal ne peut pas continuer, et qu’il faut que Kidal revienne au Mali.

Donc le président Issoufou n’a pas tort quand il pointe les notables de Kidal qui sont impliqués dans des attaques sur son territoire du Niger ?

Le gouvernement malien est signataire de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale, en même temps que plusieurs mouvements du nord du Mali. Il est bien entendu – et c’était l’esprit d’Alger déjà, mais c’est l’esprit de l’accord – que tous les signataires de l’accord doivent rompre tout lien avec le terrorisme international.

Le 22 septembre, le président IBK a suggéré que certains articles de l’accord d’Alger étaient discutables, à quel article pensez-vous en particulier ?

Je pense que le président a fixé un principe, l’accord d’Alger est un instrument important de restauration de l’unité du Mali, de restauration de la souveraineté du Mali, de restauration de la stabilité et de la paix au Mali. Un instrument aussi lourd ne peut être mis en œuvre que si le peuple malien y adhère, que s’il y a une appropriation nationale.

Voulez-vous dire que, pour que l’opinion publique malienne s’approprie cet accord, il faut l’amender, il faut rassurer les Maliens sur le fait que cela ne touchera pas à l’intégrité et à l’unité de Mali ?

Il ne faut pas faire comme si c’était un fétiche dont on ne peut pas parler, cela dit les fondamentaux de l’accord ne seront pas mis en cause dans l’esprit du président de la République, mais il est le garant de la cohésion nationale. Quand toutes les forces vives du pays vont se retrouver pour parler de la paix, de la stabilité et de l’unité nationale, on ne peut pas dire qu’un instrument aussi important, qui est l’accord d’Alger, soit un fétiche auquel on ne touche pas, d’ailleurs je note avec satisfaction que la CMA a entendu les appels au calme que le gouvernement a lancés…

Pas tout de suite, Tiébilé Dramé, parce que, dans un premier temps, les groupes armés de la CMA, la Coordination des mouvements de l’Azawad, quand ils ont entendu le président, ils ont décidé de suspendre leur participation au Comité de suivi de l’accord…

Oui, il y a quelques dirigeants de la CMA qui ont toujours un micro et une caméra posés à côté d’eux, et qui multiplient les déclarations quelques fois inflammatoires, et c’est pourquoi le gouvernement les a invités au calme. Ce sont des questions sensibles, des questions graves qu’on ne saurait régler à coup de communiqués, de déclarations, et qu’on ne peut régler qu’à travers un dialogue fécond entre frères. C’est dans cet esprit que je me suis rendu à Alger ce samedi 5 octobre pour discuter, avec le partenaire et frère algérien, de l’accélération de la mise en œuvre de l’accord. Et pour redire que la non-tenue d’une session du Comité de suivi de l’accord ne signifiait pas que le processus était en train de dérailler, loin s’en faut.

Oui, on a été inquiet après l’annulation de la session prévue à Kidal à la mi-septembre…

Oui, cette annulation ne signifie pas que le processus était sur le point de dérailler. Nous nous sommes entendus avec la présidence algérienne du Comité de suivi de l’accord. La prochaine session du Comité de suivi de l’accord se tiendra à Bamako dans un mois. Donc, nous nous retrouverons à Bamako dans quelques semaines pour reprendre les travaux, pour accélérer la cadence.

Avec les groupes armés de la CMA ?

Bien entendu que c’est hautement souhaitable que tout le monde soit présent, il n’y a pas de Comité de suivi sans tous les partis signataires. Je veux dire qu’à côté de cela, il y a des efforts en cours pour que nous nous parlions directement. Les mouvements signataires de l’accord d’Alger ont un grand rôle à jouer pour la sécurisation du territoire, et ils ont un grand rôle à jouer dans la lutte contre le terrorisme, et de ce point de vue là nous devons continuer à nous parler, et de conserve avec nos partenaires et nos voisins pour parvenir à une harmonie.

RFI

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