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Ras bath: le décryptage d’un Janus politico-civil

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Mohamed Youssouf Bathily, dit Ras bath se veut d’abord un rasta, qui se réfère à Bob Marley, celui qui vertement critiquait les tares de la société de son époque, en osant et allant souvent très loin, touchant sans détour dans ses chansons, des pratiques et des personnes qu’on pouvait croire intouchables, à l’époque. Robert Nesta Marley dit Bob a fait des chansons à caractère sensibilisateur, il a critiqué et dénoncé, tentant quelque fois de montrer la voix à ses compatriotes, mais aussi aux citoyens du tiers monde et du monde entier.

Et pointant le doigt sur les maux de la société, comme l’inégalité, la corruption, la discrimination, il montre la direction qui lui paraissait être la meilleure, pour l’amélioration des conditions d’être de l’homme et de la société ; appelle à la lutte sans merci, pour défendre des droits universellement reconnus, mais souvent méconnus par les tenants du pouvoir, les mauvais gouvernants. Bob Marley a touché à des sujets politiques, défendant des droits civils et politiques, mais sans être pour, ainsi dire, politique.

Toutefois, le temps d’un glissement sur le terrain politique, alors que la Jamaïque est à feu et à sang, meurtrie par des clans qui plongent Kingston dans la quasi-guerre civile ; récupéré par le Premier ministre Michael Manely, Bob Marley en décembre 1976, échappe de peu à une fusillade destinée à l’éliminer. Sur scène quelques jours plus tard, il montre au public les traces de la balle qui a frôlé son torse avant d’aller se loger dans son bras (sources Wikipédia).

Au-delà, il est resté de sa vie (6 février 1945- 11 mai 1981), un auteur- compositeur- interprète, chanteur et musicien. Ce qui lui a valu à l’artiste musicien, son succès mondial et une popularité à vie et même à titre posthume. Il reste à ce jour le musicien le plus connu et le plus vénéré du reggae. Le Roi du Reggae doit être fier du Malien qui a relevé certaines valeurs du Rastafari, à la grande satisfaction de nombre de ses compatriotes.

La preuve, des centaines de milliers de Maliens se mobilisent et certains sont prêts à mourir comme lui serait prêt, pour des causes nobles déclarées de transparence, de bonne gouvernance, de justice. Si tant est que telles sont des valeurs de Rastafari, Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath, aura ainsi permis à ce mouvement de connaître une renaissance dans son pays, le Mali et peut être avec tache d’huile au-delà de nos frontières. A l’instar de Bob Marley qui a permis à la musique jamaïcaine et au mouvement rastafari de connaître une audience planétaire (il a vendu plus de 200 millions de disque à travers le monde).

Mais Ras Bath ne fait pas de la production musicale, encore moins de concert, il est juriste publiciste, doublé d’un journaliste ‘’radioteur’’. A ce titre cependant, il peut faire des prestations, des fora et autres conférences débats qu’il peut animer à travers le monde. Ces conférences peuvent faire office de show, si l’on veut continuer dans la comparaison avec son star. Mais seulement la comparaison s’arrête là, on dit qu’elle n’est pas raison. Interrogeons-nous plutôt sur ce que représente cet homme sorti du commun, ajoutons par la force des choses, et jusqu’où peut-il aller ?

Disons vite qu’il n’est pas et ne sera jamais un acteur politique d’envergure au Mali, car cela est contraire à sa nature d’homme providence, qui tire sa substance de ce qu’il fait : la dénonciation, la critique qui choque et qui n’épargne personne, quelque soit l’âge ou l’autorité ou la fonction. C’est la chose qui a manqué au Mali depuis les indépendances et dont le besoin s’est toujours fait sentir.

La nature qui a horreur du vide, s’est servie de l’environnement de mal gouvernance, de déni de justice, de déni de vérité, de déni d’égalité, de corruption généralisée, et de déni de rôle des leaders religieux, pour minutieusement nous modeler cet homme, tel un envoyé de Dieu, pour mettre de l’ordre dans les rangs des ‘’irresponsables’’ tapis dans l’ombre de la mauvaise gestion et de l’enrichissement illicite.

Il fait ses dénonciations volontairement cyniques, « choquer pour éduquer », et à visage découvert, sans calcul sur les risques encourus. Ras Bath est unique en son genre. Ses prestations enregistrées en mode vidéo et bien suivies peuvent certainement motiver des actions de la part de ses vidéo spectateurs. Il sert de vecteur de sensibilisation, d’éducation et d’action, mais sans avoir lui-même, comme pourrait le croire certains, à prétendre à une candidature présidentialiste. Ses mots pourraient faire de lui, un maire, un député, engranger un pourcentage plus élévé que celui de Guimba national à la présidentielle, des voix monnayables.

Mais ce serait la fin d’un mythe, d’une providence, et de la popularité d’un messager qui serait entré dans des calculs politiques et possiblement politiciennes. Ras Bath peut-il rester dans son rôle sans rentrer dans le marigot politique ? Jusque là, il demeure toujours plus proche d’un artiste populaire qui a ses fans et dont les mots comptent, que d’un guide politique, d’un acteur politique porteur d’un projet de société. Le salut pour ses fans et pour la société malienne serait d’ailleurs qu’il en reste ainsi pour aussi longtemps que possible, qu’il garde son statut civil et politique, plutôt que de descendre dans le marigot politique.

Ce qui serait bien dommage car fatal à sa popularité et à sa qualité d’homme providence que des milliers de Maliens voient en lui. Il apporte une immense contribution en choquant les présumés contrevenants, aide à asseoir la transparence et la bonne gouvernance. S’il comprend cela, et si ses camarades comprennent cela, poursuivant ses prestations et conférences débats, il pourra être éternel, comme Bob Marley. Il pourrait s’adjuger une vertu d’utilité publique, la gloire et des médailles. La politique pourrait le conduire irrémédiablement à l’anonymat, au silence, alors qu’il doit continuer à donner de la voix.

Mais qu’en est-il des moyens aujourd’hui mis à la disposition de Ras Bath ? Ces bienfaiteurs ne sont certainement pas des humanitaires, et voudraient certainement un retour sur investissement. Sont-ils connus ? S’il s’agit d’investissement au profit de la bonne gouvernance tant mieux. S’il s’agit de profiter de la popularité de Ras Bath, alors question : est on sorti de l’auberge espagnole ? Un piège à éviter. Car on aura besoin du genre de Ras au Mali d’aujourd’hui. Choquer cyniquement pour…

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Daou

Source: Le Républicain 

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