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Covid-19: peut-on miser sur le couvre-feu pour freiner l’épidémie?

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Emmanuel Macron l’a annoncé mercredi 16 octobre : à partir de samedi un couvre-feu de 21h à 6h du matin sera imposé en Île-de-France et dans huit autres métropoles pour briser la dynamique épidémique. S’agit-il d’une mesure efficace ?

Certes, nous sommes encore loin des niveaux du printemps : plus de 1 600 patients atteints du Covid-19 sont hospitalisés en service de réanimation aujourd’hui contre 7 000 au plus fort de la crise. Mais étant donné la nature exponentielle de l’épidémie, les projections à un mois sont très pessimistes et de l’avis unanime des médecins, il convenait d’agir le plus vite possible. Emmanuel Macron a donc décidé d’instaurer un couvre-feu, une mesure appliquée ailleurs dans le monde, mais également en France. Face une flambée épidémique, un couvre-feu drastique, de 17h à 5h, avait en effet été instauré en juin dernier en Guyane.

L’efficacité de cette mesure a été étudiée par des chercheurs de l’Inserm, de l’Institut Pasteur et du CNRS. Les résultats n’ont pas encore été publiés dans une revue à comité de lecture, mais ils ont été mis en ligne le lundi 12 octobre.

Les auteurs ont constaté qu’effectivement, après l’instauration du couvre-feu, le taux R0 de reproduction du virus était passé de 1,7 à 1,1 : en somme, un malade infecté contaminait moins de personnes saines. Le nombre quotidien de nouvelles infections a ainsi diminué, de 350 par jour à 80 un mois plus tard. Ces progrès sont-ils la conséquence du seul couvre-feu ? Les auteurs de l’étude en doutent. D’autres mesures ont effet été prises simultanément en Guyane, comme la fermeture de la frontière avec le Brésil, un foyer épidémique majeur. Il est donc difficile dans ces conditions de déterminer quelle a été la part de chaque mesure dans la lutte contre l’épidémie.

L’instauration du couvre-feu en métropole soulève une autre question, celle de sa durée. Emmanuel Macron entend le mettre en place durant six semaines, sous réserve d’accord du Parlement. En Guyane, près de quatre mois après, il a été allégé mais est toujours en vigueur. On voit ainsi que s’il est « aisé » d’instaurer une telle mesure, en sortir est beaucoup plus compliqué. Enfin, dernière question, peut-on calquer la situation guyanaise à la métropole, où les densités de population sont bien plus importantes ? Par définition, seul l’avenir le dira.

Pause d’un essai clinique pour un vaccin

Contretemps dans la recherche d’un vaccin contre le Covid-19 : le laboratoire Johnson & Johnson a interrompu son essai clinique de phase 3, la dernière dans le développement d’un candidat vaccin. Celui-ci implique 60 000 participants dont un a manifesté une maladie inexpliquée. Pour cause de secret médical, les détails n’ont pas été révélés, mais cet unique cas est suffisant pour que le laboratoire arrête tout, le temps de tirer l’histoire au clair. Ce genre de mésaventure n’est cependant pas rare, c’est même la raison d’être des essais cliniques : découvrir et corriger tous ces potentiels effets secondaires. Ainsi, le même écueil s’était produit en septembre, pour un autre candidat vaccin contre le Covid-19. Celui développé conjointement par l’université d’Oxford et le laboratoire Astra Zeneca avait causé un effet indésirable chez un des participants de l’essai clinique. Ce dernier avait également été mis en pause, avant de reprendre quelques jours plus tard.

Aujourd’hui, en comptant celui de Johnson & Johnson, dix de ces essais de phase 3 ont tourné court dans le monde, mais aucun en France. La raison est simple : jusqu’à présent, le virus ne circulait pas suffisamment pour pouvoir s’assurer qu’un candidat vaccin protège effectivement. Malheureusement, la situation évolue, et l’Inserm a lancé une grande campagne de recrutement, Covireivac. Cette démarche est inédite dans le pays et 25 000 volontaires se sont déjà inscrits. L’Inserm espère par ailleurs avec cette campagne recruter plus de personnes âgées : « Habituellement, quand on inclut des gens dans des essais cliniques, ils sont plutôt jeunes », explique le Pr. Jean-Daniel Lelièvre, immunologiste-clinicien à l’hôpital Henri-Mondor de Créteil. « Très peu de candidats vaccins se sont intéressés aux personnes plus âgées. Pourtant, parallèlement à ces essais cliniques, est menée la politique vaccinale. Il s’agit de déterminer qui sera vacciné en priorité. Or, on sait que ces personnes seront les plus âgées. C’est pour cette raison qu’en France, on pousse les industriels à réaliser des essais sur les populations âgées car on a assez peu de données », déplore-t-il.

La phase de recrutement lancée par l’Inserm va durer jusqu’à la fin de l’année, moment où les candidats vaccins testés seront choisis. Les essais commenceront dans la foulée.

Premier décès d’une personne réinfectée

Des chercheurs néerlandais rapportent dans les Cahiers de l’université d’Oxford l’histoire d’une femme de 89 ans. Atteinte d’un cancer rare de la moelle osseuse, elle avait attrapé une première fois le Covid-19, ce qui lui avait imposé d’interrompre sa chimiothérapie. Hospitalisée, son état s’était amélioré et elle avait pu regagner son domicile après cinq jours.

Moins de deux mois plus tard, cette femme reprend son traitement anticancéreux, mais très vite, elle déclare à nouveau les symptômes du Covid-19, et à nouveau elle est testée positive. Son état se dégrade et elle décède deux semaines plus tard.

Les chercheurs sont certains qu’il s’agit bien d’une réinfection car ce sont deux souches différentes du virus qui ont été découvertes lors des tests. Ils ajoutent que même si du fait de sa chimiothérapie, les défenses immunitaires de cette femme étaient affaiblies, elles restaient suffisantes pour combattre la seconde infection. Ce cas très particulier illustre toutes les questions aujourd’hui encore sans réponses concernant les réinfections : une dizaine de cas dans le monde ont été rapportés et il apparaît que parfois, la deuxième contamination est plus grave que la première. On lit ainsi dans la revue The Lancet de cette semaine l’histoire d’un jeune homme américain de 25 ans. Lui aussi a été infecté deux fois, la deuxième étant bien plus sévère. Les auteurs concluent : même les personnes qui ont déjà été contaminées doivent continuer d’appliquer les gestes barrières.

RFI

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