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CNT, réformes, trêve sociale, insécurité : Dr Modibo Soumaré voyage bien

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En dépit de la survivance d’un pessimisme excessif qui a conduit trop souvent nombre d’acteurs à accuser explicitement le CNSP d’intentions cachées et perverses, l’heure doit être à l’adoption de stratégie pour ne pas perdre de vue les réformes à mettre en œuvre. Il serait ainsi absurde de les abandonner aux seules mains incertaines des militaires.

 

La méthode du pouvoir en place quasi- unanimement condamnée par sa brutalité – laquelle est contraire à la courtoisie de rigueur dans les relations avec  la classe politique et les organisations de la société civile – le jugement du Dr Modibo Soumaré est déjà plus balancé. Si la dramatisation au grand jour des problèmes et des excès théâtraux doit être systématiquement proscrite, il n’en demeure pas moins qu’on ne doit pas franchir la ligne au-delà de laquelle l’excès de souplesse dans la forme traduit la capitulation ou l’inconsistance de forme. Cela signifie que les propositions de réformes politiques et institutionnelles devraient toujours chercher à poser les problèmes plus clairement et  le plus nettement possible et , en particulier ne pas rechigner à coller aux attentes des populations, à mettre les militaires en face de leurs contradictions qui se manifestent entre leurs intentions et leurs actes. Que nul ne se berce d’illusions en croyant que les réformes tant attendues peuvent  être faites sans une participation inclusive des chapelles politiques – les premières concernées – et les organisations de la société civile.

L’Union pour la République et le progrès (URP) prédisait sous le régime défunt que si les gouvernants ne pratiquaient pas un dialogue constructif suivi d’actes concrets conduisant à l’amélioration des conditions de vie des citoyens et du climat sécuritaire très dégradé, la pouvoir allait se trouver dans la rue, à la portée de n’importe quel aventurier. Or cette prédiction s’est totalement réalisée avec le renversement du président de la République Ibrahim Boubacar Keïta. Bien évidemment tirant les leçons, les militaires doivent jouer un jeu flexible, pragmatique qui coïncide avec des valeurs universelles de la démocratie et avec les aspirations des Maliens et des Maliennes au changement. Toute option, toute ruse byzantine, comme on le constate aujourd’hui est néfaste, contreproductive.

Les égos au frigidaire !

Le leader de l’URP souligne avec force son penchant à faire progresser la concertation avec les centrales syndicales et les syndicats autonomes dans des voies motivées par le respect, la considération et la franchise. C’est seulement à ce prix que les chances sont grandes d’accéder à une trêve sociale. Le répit ainsi obtenu autorise de concentrer les efforts dans la lutte contre l’insécurité rampante et le retour à la paix.

Les divisions apparues ont gêné l’irruption d’un bloc compacte contre la clé de répartition des 121 sièges du Conseil national de la transition (CNT). La junte militaire qui n’est probablement pas dupe de la valse hésitation, n’en allait pas moins les exploiter avec son opiniâtreté habituelle. Ni l’équilibre des forces indispensable, ni le consensus nécessaire à sa composition n’ont existé. Et l’élection à sa tête du colonel Malick Diaw fit voler en éclats le peu de crédit accordé à cet organe législatif et isola davantage les militaires.

Nonobstant, on peut mettre pour quelques temps au frigidaire les égos et accorder le bénéfice du doute aux treillis. D’une part, un pessimisme excessif a conduit trop souvent nombre d’acteurs à accuser explicitement le Conseil national pour le salut du peuple (CNSP) d’intentions cachées et perverses qui peut-être n’étaient qu’inconscientes ou virtuelles et que de toute façon il eût mieux valu ignorer. D’où la tendance à dénoncer dans toutes ses initiatives, fût-ce les plus bénignes, les noirs desseins de caporalisation de la transition. D’autre part, il serait bienséant, au niveau de la stratégie à adopter, de ne pas abuser de la dramatisation des diverses au point de perdre de vue les réformes à mettre en œuvre. Il serait ainsi absurde de les abandonner aux seules mains incertaines des militaires. D’une façon générale, la classe politique doit s’atteler à ficeler des propositions concrètes de réformes à travers un cadre de concertation et se battre pour les faire adopter. Les jérémiades ne sont plus de saison !

Les militaires klaxonnent et vont droit dans le mur

Il se trouve à l’intérieur du pays de telles tensions, une somme d’éléments d’hostilité, qu’un motif politique ou social, voire sécuritaire est susceptible de provoquer une action disproportionnée, une véritable implosion. Autrement dit, il appartient aux gouvernants de contenir, à l’entendement de maîtriser les émotions de l’âme pour circonscrire l’avancée djihadiste. Leur place n’est point aux premières loges des régions ou des cercles – nomination de gouverneurs militaires et préfets – mais sur le champ de bataille. D’ailleurs Dr Modibo Soumaré  ne cesse d’insister sur la signification de la réponse qu’apportent les autorités de la transition au siège sans fin de Farabougou et l’extension des tentacules de la pieuvre djihadiste aux localités environnantes notamment Dogofri, Goma. Ici, comme ailleurs, notamment au centre du Mali, les militaires klaxonnent et avancent droit dans le mur. En vérité, si rien n’est fait contre cette horde de bandits qui écument villes et villages, pillent, incendient, violent, assassinent, les populations n’auraient d’autre alternative que de crier leur ras-le-bol général dans la rue.

Cumulativement au levier militaire, il convient d’investir massivement dans les programmes sociaux de base – adduction d’eau potable, électrification, construction de centres de santé, d’écoles, de routes – lutter contre le chômage, afin de briser la capacité de recrutement des groupes djihadistes. L’extrémisme a pour moteur la pauvreté et pour embrayage l’idéologie.

De telles pistes nécessitent des coupes drastiques dans les coûts de fonctionnement de l’Etat. Les plus hautes autorités doivent donner l’exemple. Des avantages exorbitants sont accordés aux chefs d’institutions, à des catégories socioprofessionnelles, au chef de file de l’opposition – dont le parti bénéficie en outre des subventions étatiques – contribueront à alimenter la cagnotte.

Le Mali souffre de l’immixtion des leaders religieux et des militaires dans la sphère politique. Leur présence dans un domaine réservé aux hommes politiques affaiblit ceux-ci et l’Etat et corrompe insidieusement le moral de la nation. Il est de bon aloi d’écarter dans la future loi toute possibilité d’amnistie des putschistes dans l’optique de guérir le Mali de la férule militaire et empêcher les leaders religieux de faire des escapades dans la politique, à moins de se débarrasser de grand boubou de prêcheur. La survie de notre démocratie, son approfondissement et en partie la stabilité du pays en dépend.

Georges François Traoré

SourceL’Informateur

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